« Un tel coup d'Etat est-il un acte valide au regard de la Constitution du 20 juillet 1991, révisée le 25 juin 2006, et est-il susceptible de modifier en toute légalité ladite Constitution ? »
La réponse à cette question ne peut être paradoxalement que « oui » :
En effet, la constitution révisée le 25 juin 2006 l’a été par des militaires putschistes, il est normal que de nouveaux militaires putschistes profitent de cette légalité « modifiée » par des putschistes.
Mais mieux encore la constitution du 20 juillet 1991, elle-même, a été confectionnée et instaurée par un militaire putschiste qui a légalisé sa présence à la tête de l’Etat en se faisant élire. Pourquoi ce ne serait pas le cas de Aziz?
Une constitution apportée par un putschiste, modifiée par des putschistes, ne peut valoir que pour des putschistes et le rôle du conseil constitutionnel en charge de la constitutionnalité des lois violées ne peut qu’être le garant d’une constitution de « putschistes » qui assure la légalité de leur putsch.
La question de Ould Boulkheir prête à une dangereuse équivoque.
En effet, en décrivant le coup d’Etat de Aziz par « un tel coup d’Etat », Ould boulkheir, montre bien que pour lui ce « coup n’est pas comme les autres » et que le coup d’Etat du 6 août 2008 est différent des autres coups d’Etat et avait donc une nature propre qui pose spécifiquement la question de son caractère « d’acte valide au regard de la Constitution du 20 juillet 1991. » !
Le Conseil Constitutionnel pourrait donc bien lui répondre : « le coup d’Etat du 6 Août 2008 est conforme à la constitution et sa légalité ne fait pas de doute. En effet, se référant aux précédents, la modification constitutionnelle du 26 avril 2006 a été l’œuvre de putschistes issus du coup d’Etat du 3 Août 2005, et la constitution du 20 juillet 1991, elle-même, est l’œuvre d’un putschiste issu du coup d’Etat du 12 décembre 1984»
Raisonnement logique. A moins que Ould Boulkheir ne considère que le coup d’Etat du 3 août 2005, n’en était pas un. Et que celui du 12 décembre 1984 était « une passation de service ».
En effet, pourquoi le coup d’Etat du 12/12/1984 et celui du 3/8/2005 seraient-ils si différents de celui du 6/8/2008 ?
Et pourquoi ce dernier coup d’Etat ne pourrait pas porter à la constitution de 1991 toutes les modifications qu’il jugerait nécessaires à l’image de ceux qui l’on précédés ?
Si Maouwiya ould Sid’ahmed Taya et Ely ould Mohamed Vall ont modifié la constitution pourquoi pas Mohamed Ould AbdelAziz ? Un putschiste vaut bien un autre, surtout quand il est son fils spirituel !
Si Messaoud a accepté que Ely ould Mohamed Vall modifie la constitution pourquoi ne l’accepterait-il pas pour Mohamed oul abdel Aziz ? Faut-il refuser à un cousin ce qu’on accorde à un autre ?
La question de Messaoud ould Boulkheir porte en elle-même les germes de sa contradiction. Et la vraie question est bien plus fondamentale que de s’attacher à dénoncer la « légalité » apportée par des putschistes, par rapport à celle dictée par d’autres putschistes.
En effet, la question posée par Messaoud ould boulkheir pourrait se résumer en une phrase : « Y a-t-il des putschs plus légaux que d’autres ? »
On comprend que répondre à cette question requiert un haut niveau de crétinisme, qui, il faut l’avouer, n’épargne pas les institutions fussent-elles constitutionnelles.
Si une question se devait d’être posées avec son lot de corollaires c’est bien celle-ci :
« Au nom de quelle légalité le conseil constitutionnel continue-t-il de fonctionner ? »
En d’autres termes : « comment une structure constitutionnelle, prévue et organisée par une constitution violée et dont le « garant », à savoir le Président de la République est violemment empêché de remplir ses fonctions par des putschistes, continue-t-elle encore à fonctionner ? »
L’article 24 de la constitution de 1991 ne dispose-t-il pas que « Le Président de la République est le gardien de la Constitution. Il incarne l’Etat. » ?
Une seconde question en découlerait donc naturellement et qui fut développée par le Président de l’Assemblée nationale dans sa lettre du 22 avril 2009, adressée au Conseil constitutionnel:
Elle pourrait être posée comme suit :
« Comment le Conseil Constitutionnel peut-il juridiquement accepter et valider les dépôts de candidature à la présidence de la république puisque sa décision « constatant » la vacance de la présidence de la république recourt à un fondement juridique fallacieux ? »
Or ne pouvant sur la base de l’article 41 de la constitution, ni constater matériellement, ni formellement « l’empêchement » ou la vacance de la présidence de la République, le conseil constitutionnel, ne pouvait donc procéder à l’acceptation des candidatures à la présidence de la république et a fortiori juger de leur validité !
Le Conseil constitutionnel ne peut donc procéder à valider des candidatures pour une présidence dont le titulaire, bien vivant et au fort de ses capacités physiques et mentales, réclame ses fonctions !
En définitive on le sait désormais, poser des questions à des autorités fictives vidées de leur substance légale et légitime n’aboutit qu’à des réponses « sous contrainte martiale » et n’avancera en rien la cause des défenseurs de la Démocratie. Et à défaut donc de poser des questions, s’en tenir aux affirmations sans équivoques constitue la seule voie pour défendre la légalité et l’Etat de Droit. De ces affirmations nous en retiendrons une :
« Sans le Président de la République dûment élu, garant de la constitution et incarnation constitutionnelle de l’Etat, toutes les autres structures de l’Etat sont caduques, y compris le conseil constitutionnel lui-même ».
En effet, dans les Etats "confisqués" on ne pose pas de questions aux institutions fantômes. On affirme, ses convictions face aux hors-la loi.
Pr ELY Mustapha