C’est probablement parce
que nous avons une centaine de prix Nobel que nous fermons l’accès du Supérieur
à la jeunesse. Tuer les esprits dans l’œuf, barrer l’accès au savoir est la
meilleure des méthodes des dictatures et la basse œuvre des médiocres. Les premiers pour maintenir les peuples dans l’ignorance,
les seconds pour ne pas être la risée de leur ignorance.
Empêcher une jeunesse
d’accéder au savoir est en soi un crime qui mériterait une sanction
exemplaire. C’est une continuité dans la destruction de l’éducation de la
jeunesse inaugurée depuis des décennies et qui s’est honteusement illustrée avec le
régime sortant, qui vendait à tour de bras les écoles pour céder leurs terrains
à des commerçants véreux au prix fort.
Les motivations d’une telle décision
d’empêcher les candidats de plus de 25 ans de s’inscrire au Baccalauréat n’est
en fait qu’une politique visant à terme à abêtir le peuple afin de surfer sur
son ignorance. « L'ignorance toujours mène à la servitude », dit le
proverbe espagnol.
A-t-on jamais vu à
travers le monde, une jeunesse battue, trainée, ensanglantée par qu’elle veut accéder
au savoir ? Une population scolaire dont le nombre est inférieur à un
quartier de Tunis et que l’on continue, à réduire à frustrer et à avilir !
Le savoir, le moral et la
santé de la jeunesse importent peu à ce ministre. Un choc si violent est
difficile à oublier et il ne fera qu’accroitre la détermination d’une jeunesse
à se battre pour son droit à l’éducation et au savoir. Droit qui, partout dans
le monde, est garanti et l’accès au
savoir est encouragé.
Ce ministre semble
privilégier une vision mesquine, étroite et bureaucratique de la gestion de
l’enseignement supérieur. Ainsi, sa préoccupation n’est pas de porter
l’enseignement supérieur au niveau de celui des autres nations, mais au
contraire de se préoccuper davantage de la charge de son ministère.
Barrer violemment et de façon barbare, la
route du savoir à une jeunesse qui réclame son droit à une inscription au baccalauréat,
au lieu de mettre une administration capable
de gérer et d’organiser, humainement et matériellement, les inscriptions
nouvelles (candidatures libres notamment) et d’assurer le passage à ces
candidats. Il est plus facile de battre un élève que de l’éduquer.
Depuis des années que ce
ministre, traversant les régimes successifs, est en charge de l’Enseignement supérieur,
ce dernier n’en est que plus médiocre. Il faut dire qu’il s’est inscrit dans la
continuité de ses prédécesseurs. Des diplômes dévalués, des enseignements d’une
qualité décriée et des enseignants dévalorisés. Au-delà de cette médiocrité
généralisée de l’Education et de l’Enseignement, les injustices criantes,
menant aux grèves, aux sittings, aux revendications, ont introduit, les
tensions et les violences au sein de ce qui se devait d’être un havre de paix
et de sérénité : le savoir.
Les conventions
internationales, auxquelles la Mauritanie est partie, imposent la non-discrimination
sous tous ses aspects.
Ainsi la Convention sur « la
lutte contre la discrimination dans le domaine de l'enseignement » (Adoptée
par la Conférence générale de l’UNESCO a sa onzième session, Paris, 14 décembre
1960), tout en rappelant la Déclaration universelle des droits de l’Homme du 10
décembre 1948 à laquelle se réfère le préambule de la Constitution mauritanienne
de juillet 1991, entend par Discrimination :
« Toute discrimination, exclusion, limitation
ou préférence, fondée sur la race, la couleur, le sexe, la langue, la
religion, l’opinion politique ou toute autre opinion, l’origine nationale ou
sociale, la condition économique ou la naissance, a pour objet de détruire
ou d’altérer l’égalité de traitement en matière d’enseignement et notamment :
a.
D’écarter une personne ou un groupe de l’accès aux divers types ou degrés d’enseignement
b.
De limiter à un niveau inférieur l'éducation d'une personne ou d'un groupe ;
(…) »
Article 4 :
Les États, parties à la
présente Convention s'engagent en outre à formuler, à développer et à appliquer
une politique nationale visant à promouvoir, par des méthodes adaptées aux
circonstances et aux usages nationaux, l'égalité de chance et de traitement en
matière d'enseignement, et notamment à:
a.
Rendre obligatoire et gratuit l'enseignement primaire; généraliser et
rendre accessible à tous l'enseignement secondaire sous ses diverses formes; rendre
accessible à tous, en pleine égalité, en fonction des capacités de chacun,
l'enseignement supérieur; assurer l'exécution par tous de l'obligation
scolaire prescrite par la loi;
b.
Assurer dans tous les établissements publics de même degré un enseignement
de même niveau et des conditions équivalentes en ce qui concerne la
qualité de l'enseignement dispensé;
c.
Encourager et intensifier par des méthodes appropriées l'éducation des
personnes qui n'ont pas reçu d'instruction primaire ou qui ne l'ont pas reçue
jusqu'à son terme, et leur permettre de poursuivre leurs études en fonction
de leurs aptitudes;
(…) »
La Mauritanie, n’a curieusement jamais ratifié
cette convention qui date de décembre 1960, d’autant plus qu’elle ignore aussi
la recommandation de la Conférence générale de l'Organisation des Nations Unies
pour l'éducation, la science et la culture, réunie à Paris de décembre 1960 concernant
la lutte contre la discrimination dans le domaine de l'enseignement. Tout comme
elle ignore celle de la Conférence générale de cette même organisation (Paris
du 21 octobre au 12 novembre 1997) sur la responsabilité qui incombe aux Etats
d'assurer l'éducation pour tous conformément à l'article 26 de la Déclaration
universelle des droits de l'homme (1948).
Ainsi donc, c’est une politique nationale de l’Education et de l’enseignement
qui ignore les normes et principes posés par les conventions internationales en
matière de discrimination, entrainant ainsi les dérives que l’on sait et qui, aujourd’hui,
font de l’enseignement supérieur une « corvée » pour le Ministère qui
en a la charge et qui à défaut de mettre la volonté et les moyens pour
promouvoir l’enseignement et le savoir chez ceux qui les réclament, les met en saignements à défaut d’enseignement.
Pr ELY Mustapha
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