lundi 14 septembre 2020

De la responsabilité de la Presse mauritanienne dans la corruption : morale, éthique et ‎déontologie. Par Pr ELY Mustapha

Les médias mauritaniens traversent tous les régimes. Et c’est en cela que, de la Presse écrite à la presse audiovisuelle, ce secteur porte une lourde responsabilité dans ce que la corruption est devenue en Mauritanie. Non point que ce secteur, par essence, l’encourage, mais qu’il contribue à promouvoir ceux qui en sont les barons.

Dans sa liberté d’informer, le journaliste mauritanien joue un rôle primordial, mais la question est : ne contribue-t-il pas à l’enracinement des non-valeurs en Mauritanie. Non- valeurs qui président à la corruption : le mensonge, le vol et la dissimulation.

Certes, la définition du journaliste à laquelle nous nous attachons ici, n’est pas simplement celle de celui (ou celle) qui s’est fixé(e) pour métier de rechercher et de délivrer l’information au public, ce qui engloberait même le concierge d’immeuble, mais le vrai journaliste. Celui qui dans cette noble mission s’est fixé une éthique dans l’action, une morale dans le comportement et une déontologie dans la profession.

 Ceux des journalistes qui, dans cette optique, ont essayé de garder leur indépendance, et leur dignité, ont soit disparu soit vécu chichement sur leurs ressources propres avec tous les harcèlements des régimes que l’on sait.  Alors que ceux qui se sont encoquinés avec les régimes ont reçu leur rétribution de la honte et payeront le tribut de leur turpitude.

Or aujourd’hui, plus que jamais, le journalisme mauritanien se doit de devenir un instrument au service des valeurs sociales et participer à combattre les non-valeurs qui minent, depuis des décennies, le pays.

J’avais consacré un article à la corruption des intellectuels et autres collaborateurs qui entourent, nos dictateurs et sur l’obligation de les combattre, considérant qu’ils étaient leur talon d’Achille montrant que ces collaborateurs ne sont ni plus ni moins que le véritable moteur qui maintient la dictature en marche. Ils sont son talon d’Achille. Son point faible. Et c’est en frappant son talon d’Achille que l’on met à genou le système qu'il porte. (voir Combattre autrement : le Talon d’Achille de nos dictatures : https://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/combattre-autrement-le-talon-d-184353 ).

Aujourd’hui, le dictateur s’en est allé, mais ceux qui l’ont « construit », porté adulé, facilité le forfait sont encore là,  continuent à corrompre le système et aux aguets afin de continuer à pourrir tout système qui se met en place.

Toujours sur la scène politique, ces tyrannosaures veulent se faire une nouvelle virginité, en reniant et en vilipendant leur maître d’hier.

Certes, la démocratie impose de laisser s’exprimer ces vendus de régime en régime, mais rien n’impose aux journalistes de vulgariser leurs dires et leur image dans le public.

Si cela est, alors les médias mauritaniens continuent à contribuer à la corruption.

En effet, il doit être contraire à la déontologie et à l’éthique journalistique de donner la parole à des individus qui ont publiquement, notoirement, et preuve à l’appui, soutenu les régimes corrompus.

Comment un média, digne de ce nom, peut-il encore inviter sur un plateau ou sur ses colonnes des personnes qui hier ont contribué, par leurs actes leurs paroles et leur vil soutien, à un régime dont les pontes sont aujourd’hui traduites devant la justice ?

Lorsqu’un personnage aujourd’hui, condamne publiquement Aziz et demande son jugement pour corruption, alors qu’hier même il l’érigeait le bon Dieu, trompant ainsi le peuple et mettant en péril toute une nation, alors c’est un véritable crime que de lui donner aujourd’hui la parole. 

 

Une inestimable contribution des médias mauritaniens serait de boycotter tous ceux et celles connu(e)s sur la scène politique qui ont contribué directement aux dégâts causés par le régime. Et parmi ceux-ci, ceux et celles qui les ont soutenus en connaissance de cause de leur délinquance. Car ils sont aussi complices des criminels.

 

En effet, la morale cet « ensemble des valeurs supérieures qui conduisent chacun à différencier le bien du mal et qui devraient fonder les conduites humaines, tout au moins pour les individus conscients de leurs devoirs et responsables de leurs actes », doit dicter à nos journalistes, tout au moins ceux définis plus haut, d’avoir des positions de principe sur le traitement, dans leurs moyens d’information, de ces vils membres de cette classe politique qui détruit le pays,

Allier à cette morale, forgeant les principes, une éthique personnelle de l’action qui dicte en permanence de renoncer à donner un quelconque espace médiatique d’expression à ces criminels politiques.

Il en va, ainsi, de la vérité, de la dénonciation des maux du pays et de la santé mentale de tout un peuple, trahit par des individus qui le vendent au premier dictateur venu et qui ne pensent qu’à leurs bas intérêts.

A la morale des principes et l’éthique de l’action, pratiquer la déontologie de la profession et faire que chaque acte de journaliste soit le reflet, non pas seulement d’une mission d’informer, mais d’un acte de responsabilité à l’égard de toute une nation.

 Dans une nation meurtrie par une classe politique du ventre, de la délation, de l’indignité et qui s’affiche sans honte dans la vilénie et le déshonneur, le rôle du journaliste se doit d’être, aujourd’hui, celui d’un militant et d’un résistant.

Un militant, car face à cet envahissement du pays par une classe politique corrompue, le journaliste a le devoir de ne pas contribuer à sa prolifération. Résistant ensuite, face à ses appels qui le mettent à contribution pour continuer à s’afficher et induire le peuple en erreur.

En somme, tant la morale, l’éthique et la déontologie, appellent aujourd’hui bien plus qu’hier, le journaliste mauritanien à prendre ses responsabilités face à cette gangrène de l’État et l’empêcher de continuer de se propager à travers les médias.

Le journaliste mauritanien se doit urgemment, de repenser son rôle dans cette société mauritanienne politiquement abusée et que les médias, à travers l’audience qu’ils donnent à ceux qui l’abusent, l’abusent davantage.

 

Pr ELY Mustapha

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Pr ELY Mustapha

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Poésie de la douleur.