jeudi 9 octobre 2008

En notre âme et conscience

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Ce qu’il faut croire et ce qu’il faut vouloir

Voilà ce que tout homme libre se doit, en cette crise qui frappe le pays , de croire :

- Le terme « rectificatif », est une aberration. Il doit être banni du langage démocratique. La démocratie ne se rectifie pas, elle est ou elle n’est pas. (sur ce point voir mon article « la démocratie peut-elle rectifiée ? »)

- Les « militaires» ne sont pas habilités à dicter ce que doit être la démocratie, ou ce qu’elle n’est pas. Ce qui n’est ni leur rôle ni leur mission. Et ils ne sont pas mieux placés à ce propos que les charretiers de nos banlieues.


- Sidi ould cheikh abdallahi est l’élu du peuple pas celui des militaires ». Lorsqu’un peuple s’exprime à 52 % pour désigner son président. Qu’il l’accepte, que ses adversaires le reconnaissent comme tel à l’instar de la communauté internationale, Il devient absolument contraire au droit, à la logique démocratique d’accepter sa destitution parce que c’est voulu par des militaires limogés.

- Les putschistes n’ont jamais été préoccupés par l’intérêt du pays et ne sont pas venus sauver la nation du chaos et de la guerre civile. Ils ont pris le pouvoir pour perpétuer une hégémonie de leurs corps sur l’Etat. Hégémonie ayant duré trente ans et dont la perte subite en 2007 leur pesait lourd.

- Contrairement à la logique de certain, Sidi ould Cheikh Abdallahi, n’est pas une personne commune. Il est constitutionnellement « l’incarnation de l’Etat » mauritanien. Réclamer son retour ce n’est pas réclamer sa personne « ut singuli », mais un « symbole » élu par un peuple dont il faut respecter la volonté. Car ce que les militaires ont fait par leur putsch c’est piétiner cette volonté à travers celui qui la représente. Croire le contraire parce que des militaires durant la campagne de sidioca l’ont soutenu , c’est la pire des erreurs. Sidioca, qu’elles que soient les personnes qui l’ont soutenu, qu’elles que soient celles qui ont voté pour lui , lorsqu’il a reçu l’assentiment du peuple, est devenu le président de la république. Une représentation d’un Etat.
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Croire le contrairen c’est croire que toute force qui porte un président au pouvoir a le droit de le destituer hors des voies constitutionnelles. C’est accepter le putsch permanent contre les institutions élues. Et il n’ ya pas un président de la République au monde qui ne doive son élection à un lobby (syndical, industriel commercial, financier etc…) ou à un corps constitué (social, militaire , paramilitaire etc..) . Justifier la destitution du président de la république parce qu’il a reçu un soutien de militaires voulant assurer leur présence au pouvoir, c’est aller dans le sens de la violence contre le peuple qu’il représente et contre la légalité qui lui assure son rôle constitutionnel.

Aussi, le rejet total du putsch, dans ses acteurs, dans son argumentation, dans ses objectifs et dans sa finalité est le devoir de toute personne éprise de paix et de justice. De toute personne qui porte l’idéal de respect pour un peuple mis aux fers par ses propres forces armées asservies à un bataillon présidentiel sous la coupe d’un général assoiffé de pouvoir, imbu de sa personne et préoccupé de ses intérêts personnels accumulés et partagés avec une junte ayant sévi durant trente ans et qui continue à vouloir sévir.

Maintenant que l’on a exposé, en notre âme et conscience ce qu’il faut honnêtement croire, il serait alors important qu’une croyance se doit d’être accompagnée de sa pratique. Qu'est-ce qu'un homme libre se doit de vouloir?

la porte de sortie : Comment ?

Il ne fait pas de doute que nous n'acceptons pas les putschistes au pouvoir et jamais nous ne les accepterons. Au nom de cet idéal maintes fois exprimé et que nous partageons avec les bonnes consciences ici et ailleurs.

La seule solution qui prévaut et qui doit prévaloir, c’est d’aménager à ces putschistes, qui en tant normal auraient dû être passibles de la cour martiale, une porte de sortie.

On ne dira pas, comme certains commentateurs, une « sortie honorable »,car ce que ces militaires putschistes ont fait ne mérite pas que son dénouement soit lui-même qualifié d’honorable. Y a-t-il un point d’honneur à piétiner un peuple, à séquestrer ses représentants, à bafouer l’ordre constitutionnel de la République, à dilapider les biens publics pour une mauvaise cause et à mettre toute une nation en danger social, économique, financier national et international ?

Si une porte de sortie il y a, elle n’aurait pour but ni d’assurer un honneur, ni une dignité à ses militaires putschistes, mais de leur permettre de quitter le pouvoir comme ils y sont venus : par la petite porte. Celle d’une amnistie librement consentie, leur permettant de retourner à leurs emplois militaires sans autres formes de procès.

Ils savent qu’ils ne sont que provisoirement en position de force du fait des armes qu’ils détiennent face à des civils démunis et des représentants légitimes séquestrés mais il savent aussi que leurs heures sont comptées car l’étau national et international se resserre chaque jour d’avantage. Tôt ou tard, ils n’auront de salut que dans la négociation de leur reddition.

Mais, comme on a pu déjà le montrer, la souffrance d’un peuple dicte de trouver une solution, car à moyen et long terme ce ne sont pas les putschistes qui souffriront de malnutrition.
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Alors qu’elle porte de sortie ?

Celle qui permettrait d’évacuer les militaires et d’utiliser la légalité à cette fin. Et la légalité passe avant tout par le retour des dirigeants légitimes et la restauration de la volonté du peuple.
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Cette condition est la seule qui garantisse la continuité de la démocratie naissante mauritanienne en, barrant la route aux putschs futures qui viendront encore et toujours sur la base de ce précédent, « redresser » la démocratie.

Cette condition est la seule qui satisfasse la communauté internationale menaçante et dont les menaces risquent de mettre un pays et son économie à genou.

Si une telle condition est réalisée, tout le reste peut faire l’objet de renégociations et d’aménagement auxquels on a déjà consacré plusieurs articles . Dont voici quelques éléments :

1- Extraits de mon article « Entre charybde et Scylla » (à lire ici)

«Au-delà de tout cela, le peuple reconduirait sa démocratie bafouée pour laquelle la personne de sidi compte moins que la symbolique présidentielle qu’elle représente.

Un réaménagement des pouvoirs, une révision de la constitution pour asseoir un pouvoir équilibré entre le premier ministre et le président, une redéfinition du rôle du parlement dans ses relations avec l’exécutif, l’institution de moyens de contrôle sur l’action gouvernementale et une mise en jeu des responsabilités des gestionnaires publics, l’interdiction des proches du président, ascendants ou descendants directs (épouse, enfants) , durant son mandat , d’exercer une haute charge publique (administration publique ou entreprise publique), de servir d’intermédiaire ou de négociateur dans toutes les affaires publiques de quelque nature que ce soit, d’entreprendre des projets publics ou de créer des organismes régis par les lois sur les associations etc. Une telle interdiction pourrait, par exemple, recevoir une compensation financière intégrée dans les émoluments du président.

Les solutions sont multiples. Il suffit de les envisager et de les concrétiser juridiquement. »

2- Extraits de mon article : le général limogé ou la solution à la crise (à lire ici)

(Dialogue entre le général putschiste et son ombre)

" Le général limogé : Raisonnons logiquement. Toi, tu sais que tu ne peux pas rester, mais tu ne veux pas que sidi revienne. Sidi veut revenir. La communauté internationale t’oblige à restaurer la légalité. Les partisans du retour de Sidi sont intransigeants. Ceux qui ne veulent pas du retour de Sidi le sont autant. Donc la solution ne peut être que mi-figue mi-raisin.

Le général putschiste : « Mi-figue, mi-raisin ? »

Le général limogé : « Etant donné que désormais la seule voie possible est le retour à la légalité. Il n’y a que deux solutions. La première solution: Le retour à la légalité, mais sans toi et sans sidi. La seconde solution : le retour de la légalité, avec toi et avec Sidi. »

Le général putschiste : « En effet, comment peut-on envisager cela ? »

Le général limogé : La première solution consiste en ce que toi tu décides de quitter le pouvoir en confiant le pouvoir à une autorité constitutionnelle pouvant organiser des élections dans les plus brefs délais. L’autorité la plus indiquée constitutionnellement est bien entendu le Président du Sénat, qui gérerait les affaires courantes en faisant revenir le gouvernement légal et organiserait les élections présidentielles dans les délais prévus par la constitution en cas d’empêchement du Président de la République….C’est une solution envisageable, mais il y a un problème. Outre les multiples oppositions dont certainement celle qu’affichera l’actuel Président du Sénat à une telle solution, il faut dire qu’il y a une grave entrave : la séquestration du Président de la République par un putschiste, ne fait pas partie des cas d’empêchement prévus par la constitution. C’est donc une solution caduque.»

Le général putschiste : « Et la seconde solution ? »

Le général limogé : « La seconde solution : Le retour à la légalité avec toi et Sidi. Sidioca est réinvesti dans ses fonctions, avec à la clef des décrets d’amnistie des putschistes et de leur nomination à des emplois préservant leurs grades et leurs avantages éloignés du centre de décision politique. Un projet de réforme de la constitution sera élaboré. Sidi dissoudra l’Assemblée nationale convoquera des élections législatives et demandera au gouvernement de déposer sa démission et de gérer les affaires courantes en attendant l’élection d’une nouvelle Assemblée parlementaire. Il réélira un nouveau premier ministre et un gouvernement emportant le consensus de la Nouvelle Assemblée. Un référendum est organisé après consultation préalable des acteurs politiques sur un projet de révision de la constitution dans le sens de l’équilibre des pouvoir entre les autorités exécutives et législatives. »



En définitive, au-delà des solutions envisageables il nous importait ici de montrer que la lucidité et l’avenir de notre pays nous imposent de ne croire les putschistes ni dans leurs argumentaire, ni dans leurs intentions, ni dans leurs objectifs, ni dans leurs volonté de servir le peuple. Et de ne vouloir que ce qui va dans le sens du respect de la volonté du peuple.
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Et que ce qui nous importe ici, c’est qu'une solution à la crise soit trouvée pour épargner au peuple la misère (voir notre article « triste ramadan ») et pour cela il faut agir non pas en entérinant ce que les putschistes on fait , de l’accepter et de construire dessus, mais d’exiger que toute solution passe nécessairement par un respect de la légalité constitutionnelle, qu’elle soit trouvée dans le cadre de cette légalité et nulle part ailleurs !

Accepter autre chose, c’est accepter la loi de la force, c’est accepter l’humiliation d’un peuple, c’est accepter un précédent d’un « redressement » de la démocratie qui inaugure , si on ne le refuse pas , ici et maintenant et pour toujours, les mille et un «redressements » à venir de putschistes qui attendent leur tour, imbu de l’expérience putschiste impunie de leurs ainés.

Aussi en notre âme et conscience nous disons : Oui à la solution de la crise. Non à sa solution hors de la légalité constitutionnelle, et hors du respect de la volonté du peuple et de ses dirigeants légitimes qui doivent être le passage obligé de toute solution à venir.

Pr ELY Mustapha

3 commentaires:

  1. Excellent prof!!

    La clarté de votre exposé va fairedes jaloux!!

    Les mauritaniens sont habitués à la langue de bois.

    Vous écrivez en votre nom ce que vous pensez et cela force le respect.
    Que ça plaise ou ça ne plaise pas, continuez à nous parler avec votre sincérité, on en a besoin!

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  2. j'ai oublié de signe mon commentaire:
    le vétèran.

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  3. Prof,
    Vous publiez des articles et vous vous faites des commentaires et .... des éloges!!!! Yeaatass wi chemmet errassou

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Pr ELY Mustapha

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Poésie de la douleur.