lundi 31 mai 2021

L’Etat va-t-il dans le mur …de Kane ? Par Pr ELY Mustapha

 On avait pourtant bien averti dans notre analyse publiée ici-même que la démarche de Ghazouani  demandant d'éponger la dette  n'était pas viable dans la conjoncture économique internationale actuelle. (Voir ici : (https://cridem.org/C_Info.php?article=745266 )

Outre la fin de non-recevoir essuyée par le gouvernement, les évènements nous ont donné raison puisque voilà que le ministre de l'Economie, Kane Ousmane, dans une interview, ne parle plus d’éponger la dette mais de ... "réaménager le service de cette dette " (Kane Ousmane,  interview -Jeune Afrique. Lundi 31 mai 2021) .

Ainsi donc beaucoup de déplacements chers payés et de moyens dégagés pour en arriver là, alors qu'il suffisait de suivre l'évolution de la conjoncture... pour éviter d'aller dans le mur ...occidental.

Et de mur, il y’ en a bien un ! Puisque le ministre de l’économie lui-même déclare, à propos de la situation financière de l’Etat :  « nous avons un mur devant nous »…dans lequel l’Etat pourrait aller  tout droit…et , encore pas plus tard que l’année prochaine ! .

Terrible n’est-ce pas ?

Pire encore le ministre de l’économie déclare : « nous pouvons rembourser la dette…mais il faudrait y consacrer la totalité du budget… »

Effrayant n’est-ce pas ?  

Voilà un ministre de l’Economie qui nous dit que si les occidentaux ne réaménagent pas le service de la dette mauritanienne qui a atteint plus de 55 % du PIB...l’Etat doit fermer boutique !

Cela ne signifie qu’une chose que l’Etat mauritanien va vers la faillite, par cessation de paiement.

Les déclarations, certes franches et directes de ce ministre de l’Economie, font froid dans le dos. « Notre dette est insoutenable » déclare-t-il !

L’Etat mauritanien, va-t-il donc dans le mur…de Kane Ousmane ?

En ne pouvant plus emprunter, il est obligé de négocier des aménagements et autres services des « restos du cœur » des instances financières internationales.

Mais l’aménagement du service de la dette est-il une solution ?

Un aménagement qui permettrait à un gouvernement de souffler sur une période définie, pour enfin passer la charge de l’endettement au prochain gouvernement, puisqu’il est certain qu’aucun réaménagement d’un service de la dette ne donnera lieu à son remboursement, ni durant (partiellement) ni après (totalement) ce réaménagement. Ce sera encore et toujours l’accroissement de l’endettement sur la période.

Pourquoi ?

Parce que pour que le remboursement d’un emprunt puisse se faire :

- il faut que l’affectation des ressources obtenues par cet emprunt soient affectées à des investissements productifs, générateurs de valeur ajoutée et de plus-values, enrichissant l’Etat (par l’imposition),  la nation par la création de richesses (bénéficiant aux agents économiques) et participant à la formation brute de capital fixe de qualité et en quantité pour supporter l’infrastructure de développement.

- il faut que l’Etat puisse disposer d’une administration moderne et de compétences permettant de mettre en œuvre les programmes et les projets financés sur l’emprunt et capable de les initier, les gérer et les mener à terme avec profit et avantages pour le pays.

 

Or les ressources chèrement obtenues par l’emprunt sont aujourd’hui « jetées » dans des projets non viables, improductifs, confiés à des incompétences notoires (militaro-tribalo-mercantilistes) et à des administrations incapables de gérer un parapheur.

Voilà où a mené la dette, qui hypothèque déjà pour 100 ans les générations futures…et l’on demande son réaménagement sinon son effacement…pour continuer à emprunter ! Toujours au nom du peuple-Sisyphe.

Pour son effacement, nous savons ce qu’il en advint. En attendant que le cabinet européen, chèrement payé (600 000 euros) par l’Etat mauritanien, puisse guider les responsables mauritaniens vers le lieu où se trouve l’éponge, qu’en est-il du « réaménagement » ?

On le sait le réaménagement ne se fait pas pour les beaux yeux du débiteur, il est toujours accompagné de conditionnalités de la dépendance (politique, économique, financière etc…) garantissant le remboursement de la dette et la compensation, à terme, du manque « à gagner » sur le service de la dette au profit, bien-entendu, du créancier.

Le réaménagement vise à modifier « le profil » du service de la dette dont le but ultime n’est pas d’atténuer la dette elle-même, mais sa charge sur le débiteur.

Le réaménagement de la dette telle qu’il nous semble être visé par l’Etat mauritanien est certainement celui qui va être accompagné par un prêt (encore !)  …pour le réaménagement de la dette ou encore  mieux par des dons pour son allégement.

En effet, les dons pouvant ne pas être des versements à l’Etat, mais peuvent prendre la forme d’une annulation d’un remboursement de principal (venu à échéance ou pas). Mais aussi d’une remise d’intérêts ou d’une réduction des taux d’intérêts.

Dans tous les cas un réaménagement de la dette, fera l’objet d’un processus où interviennent des opérations de remise de dette, de rééchelonnement et de…. refinancement. Tout un programme à négocier, à renégocier…

Alors comme d’habitude, bienvenue au club ! De Paris ou de Londres.  Le cercle infernal de la dépendance financière.

Comment en sommes-nous arrivé là ?

 Simple et notoire : endettement durant des décennies pour servir les pillages, détournements des biens publics, marchés pipés, corruption etc. etc.

Les causes et les effets de toute cette pagaille d’Etat, nous en avions traité ici-même.

Et ce qui est encore plus dramatique c’est qu’aucune redevabilité n’est requise des gouvernants passés et leurs collabos encore aujourd’hui dans les rouages du pouvoir. Des dizaines de personnes bien connues en Mauritanie, ont amassé des fortunes qui comblent largement cette dette et bien au-delà.  Et on veut encore faire payer leurs méfaits aux générations actuelles et futures par le « réaménagement du service de la dette » et autres reports de l’endettement morbide !

L’Etat va-t-il donc dans le mur ?

Tous les indicateurs du tableau de bord de la gouvernance économique et financière de l’Etat sont au rouge.

Si Kane Ousmane a évoqué ce « mur », qui n’est pas une fiction, c’est que son pessimiste a ses raisons. Et un pessimiste, dit-on, n’est qu’un optimiste averti.

 


Pr ELY Mustapha

 

dimanche 23 mai 2021

G5 : Ave Caesar, morituri te salutant ! Pr ELY Mustapha

Le chef d’état-major des armées françaises vient de déclarer : « il se pourrait qu’on reste au Sahel encore dix ans ».

Pourquoi donc cette sale guerre, et pourquoi dans tant d'années encore, des familles entières pleureront leurs êtres chers ?

Ces soldats français, qui vont se battre sur le front du terrorisme, nous interpellent, nous invitent à réfléchir sur des questions aussi existentielles que celles de savoir :

-          Pour qui se battent-ils loin des frontières de leur patrie ?

-          Pourquoi après tant de soldats français morts sur le front, cette guerre continue encore à faire des milliers de victimes ?

-          Pourquoi sur un territoire, certes vaste, mais aussi identifiable et délimitable que le Sahel, facilement visible par satellite, jusqu'au grain de sable, des bandes terroristes à moto échappent encore à tout contrôle ?

-          Pourquoi avec la présence de 5 armées, en infanterie, en corps mobiles, en blindés, en aviation, en troupes héliportées sur le terrain, le terrorisme à moto fait des milliers de victimes ?

-          Pourquoi de réunions en réunions, de stratégies en stratégies, de millions d’euros en milliards, le G5 n'arrive pas à éradiquer le terrorisme au Sahel ?

-          Pour qui, pour quoi donc tant d'âmes sont prises au sahel ?

-          Pour quelles politiques innomées de ces pays sont-elles sacrifiées ?

-          Pour quelles mines, et mauvaises mines, sautent-elles sur les mines ?

-          Pour quel destin, pour quels césars, pour quel nérons?

 

Prions pour que ces gladiateurs, qui, pour dix ans encore descendront pour nous, et avec certains d’entre-nous, dans l'arène du Sahel, ne verront jamais le destin, poing fermé, baisser son pouce.

 Ave César...

Pr ELY Mustapha

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Poésie de la douleur.