dimanche 29 juin 2008

Où Allez-vous, monsieur le Président ?


Adieu Sidioca

On ne quitte pas sa maison quand il y a péril en la demeure. Sidioca s’est envolé pour l’Egypte. Laissant un Etat en difficulté, malade de sa pitoyable gouvernance. Maladie qui pourrait très vite se transformer en gangrène généralisée étouffant ce qui reste encore d’espoir de changement.

Où allez-vous monsieur le président ?

Est-ce ainsi qu’un chef suprême des armées abandonne son pays entre des roumouz El vessad, paralysant tout le système et des généraux agrippés à un pouvoir qu’ils tiennent en tenailles ?

On ne quitte pas une nation qui a besoin de vous. Sinon cela ne peut signifier que deux choses : Où vous êtes incapable de la diriger ou que vous avez adopté la politique de la fuite en avant. Ici la politique du sans-soucis, là la politique de l'autruche.

Sinon que signifie ce voyage, pour aller à un sommet qui pourrait bien se passer de vous le temps de résoudre les problèmes de votre pays ? Vos pairs sauront le comprendre.

En décidant de voyager par ces temps d’incertitudes, auriez vous l’intention de démontrer au monde que vous avez la certitude que tout cela est insignifiant ? Que vous maitrisez la situation ?

Nul doute que personne ne vous croirait eut égard à la situation actuelle du pays. Situation manifestement instable.

Où allez-vous , monsieur le Président ?

Manifestement, vous avez érigé les voyages en mode de gouvernance, comme si vous cherchez à échapper à votre condition… de Président. Mais cette fuite ne résoudrait ni vos souci de gestion du pouvoir, ni ceux des mauritaniens qui attendent de vous bien plus que des attitudes de pigeon voyageur.

Un leader, fait face avec son peuple et en première ligne aux dangers qui le menacent. Il ne le confie pas à ses ennemis.

Où allez-vous, monsieur le Président ?

Depuis, votre investiture, toutes les difficultés s’accumulent. Et la meilleure des choses que vous avez pu trouver, c’est de nommer aux postes clefs ceux-là même qui ont mis le pays à sac. Avez-vous jamais, vu dans la sagesse populaire un sage confier son patrimoine à des brigands ?

En voyageant vous ne les résoudrez pas. Ce ne sont ni vos pairs africains, ni arabes qui vous sortiront de l’ornière. C’est vous ! Debout et responsable devant le peuple de ce qui lui arrive.

Où allez-vous monsieur le Président ?

Vous avez été élu pour redonner espoir à ce peuple qui attend à perdre haleine, que sa soif, que sa faim, que sa misère soient enrayées par vos actes sur le terrain. Et vous, vous voyagez ?

Mais que rapportez-vous de ces voyages ? Souvent rien, sinon des dons, des crédits, bref une mendicité internationale qui s’étale au grand jour et qui tient ce peuple dans les chaines de la pauvreté et de la dépendance.

Car voyez-vous, monsieur le président-voyageur, même les dons au peuple s’engouffrent dans l’escarcelle de ceux qui pillent l’Etat et que vous avez ramenés dans les rouages de l’Etat.

Vous voyagez donc à grands frais, et vous voyagez donc pour rien. Sinon de dire que nous avons une démocratie..et que nous vivons dans la misère. Superbe message aux nations du monde.

Où allez-vous, monsieur le président ?

Vous auriez dû rester chez vous. Agir en Président élu dont le peuple attend beaucoup. Agir et vite !

Agir, signifie mettre en œuvre ses pouvoirs constitutionnels et résoudre les problèmes de la nation. Une nation que des groupuscules sans scrupules sont en train de mettre à mal.

Agir, c’est prendre les mesures suivantes :

- Révoquer le gouvernement et constituer une cellule de crise sous la direction directe du Président de la République, chargée de gérer les affaires courantes des départements et superviser le déroulement des mesures d’urgence à venir.
- Dissoudre immédiatement le parlement et convoquer des élections anticipées

- Assigner par Décret les généraux dans leur rôle de militaires en posant des règles strictes d’interactions du système militaire avec le système politique . Soit en éloignant ceux qui « squattent » les allées du pouvoir, soit en les ramenant à leur juste rôle de gardien des institutions républicaines. Une remise au pas forcée s’il le faut.

- Convoquer les partis politiques et la société civile et l’associer pleinement au mouvement démocratique du changement, à sa préparation et sa réussite.

En définitive, tout remettre à plat, par la contrainte légale s’il le faut. C’est là la condition essentielle de tout changement.

Car si vous ne faîtes pas cela immédiatement, monsieur le Président, vous aurez manqué l’occasion de sauver votre pays et son peuple de l’insoutenable situation d’ôtage politique et économique dans laquelle il se trouve.

Hélas ! Vous avez décidé de voyager dans une insouciance qui n’a d’équivalent que la confiance qui semble-t-il vous placez dans ceux que vous avez laissé derrière vous.

Mais qu’avez-vous laissé derrière vous ?

Un peuple affamé, un pays sous-développé, un Etat aux mains d’irresponsables déclarés et une Nation dont le destin se joue entre des courants loyaux (ou dissidents) véreux et des militaires qui confondent leurs intérêts et ceux de la Nation.

Alors si dans de telles conditions, monsieur le Président, votre conscience, ou au moins votre cœur ne vous empêchent pas de voyager, alors vous avez entamé le début d’une chute politique dont les conséquences sont imprévisibles.

Enfin, en vous souhaitant bon retour de voyages dans votre pays miséreux, on vous dît : « Adieu Sidioca »

Pr ELY Mustapha

vendredi 27 juin 2008

Crise, quelle crise ?


Se soumettre ou se démettre

Tout le monde parle de crise en Mauritanie. Et l’on se met à penser (à rêver ?) de quelque chose qui va changer.

Espoirs certainement déçus car il ne sagit pas en fait de « crise », mais d’une « pseudo-crise, » qui sera bien plus que décevante pour l’avenir du pays.

En effet, une poignée de personnes d’un parti d’un ancien régime reconstitué sous un nouveau nom, qui démisionne, et l’on parle de crise. PRDS, PRDR et autres transfuges partisans, Adil et autres Mithaq, indépendants-dépendants …

Démissionnaires d’un parti , Adil, hétéroclite, constitué par un Premier ministre, à carrière plus hétéroclite encore, au profit d’une majorité qui l’est devenue par « déclaration » et suite à une élection présidentielle. Une majorité née après-coup.

Pour comprendre le peu d’intérêt qu’il faut accorder à la supposée « crise », il faut d’abord comprendre ce qu’est cette majorité de laquelle certains membres ont décidé de faire dissidence.

La majorité actuelle, qu’elle s’apelle « ADIL » ou autre chose n’est pas un parti au sens institutionnel, mais simplement au sens légal. C'est un parti à récipissé, pas un parti de lutte et de convictions idéologiques. C’est une collection d’individus qui viennent de tous bords et principalement de ces « indépendants « (« un fourre-tout ») qui soutinrent le Président de la République lors des dernières élèctions et qui sont eux-mêmes un foisonnement de personnes de tous bords, et particulièrement du parti de l’ancien régime et des politiciens satellites qui gravitent avec leurs formations et structures partisanes éphèmères autours du pouvoir.

Aussi, ADIL, est un parti qui fut constitué de ce ce magma, non identifiable qui s’auto-appelait « Majorité présidentielle » (et qui n’avait pas de nom auparavent), et qui regroupait les indépendants, les transfuges du PRDS, du PRDR et des opportunistes de tout bord .

En battant trompettes et tambours, l’actuel premier ministre a su regrouper ce microcosme politique et constituer un parti nommé « Adil ». C’est autant dire que les conditions qui ont poussé à sa création expliquent largement la présupposée crise qui « semble » le secouer.

Adil est un « parti d’intérêts bien négociés ». Des intérêts dans lesquels l’intérêt personnel rivalise avec l’intérêt national. Survivance de pratiques récentes et qui dominent encore les esprits.

La constitution de ce parti est l’expression même d’une volonté de « partage de l’Etat ». Aussi ce qui se négocie au sein de ce parti, c’est la part de chacun dans le pouvoir. La crise vient de là. Les dernières nominations gouvernementales, ont laissé pour « compte » beaucoup de ceux qui s’attendaient à trouver « le (ou les) sièges promis », « les postes ou les avantages attendus ».
Leur déception que d’autres les aient dévancés et qui n’étaient pas meilleurs qu’eux dans le passé, ni du point de leur gestion des deniers publics, ni dans leurs aptitude à s’enrichir, leur est restée de travers.

Pourquoi « eux et pas moi » !

Alors pourquoi « eux et pas moi » ? Voilà une simple phrase qui explique toute la pseudo-crise qui semble secouer le système. Cette pseudo-crise n’est pas née d’une volonté d’améliorer les choses ni de préserver les intérêts supérieurs de la nation. C’est une pseudocrise de la frustration de certains à l’égard d’autres. Une réaction de gens qui se connaissent bien et qui voudraient regagner les terrains de chasse et de cueillette d’autrefois perdus.

Dans cette guerre larvée, autour d’un président en contemplation, s’affrontent les barons d’Adil.
D’un côté, ceux qui mordent la main de celui qui, par soif de pouvoir, a essayé de les rassembler sous la houlette d’un président passif, à savoir le Premier Ministre afin d’en faire une force qui le soutiendrait dans ses ambitions politiques.

De l’autre côté, ceux qui après avoir reçu de plein fouet les dernières nominations, ont trouvé chez les militaires des alliés déçus avec lesquels ils partagent les préoccupations d’influence.

Entre le marteau et l’enclume, l’actuel premier ministre se trouve pris au piège d’un parti qu’il a par mille et une entourloupettes constitué et qui aujourd'hui le met en difficulté.

En effet, ce que n’a pas compris l’actuel premier ministre, c’est que le parti qu’il a constitué , est un amalgame d'individus dont certains ont pour seule conviction politique partisane unificatrice l’ambition de rompre avec un passé qui les taraude et un avenir qu’ils veulent influencer dans le sens de leurs intérêts. Et le premier ministre est devenu un frein à cette ambition car il n’a pas su gérer le flux des influences intéressées. Il est devenu la cible à abattre. Car on le sait certains de ces individus ont déjà montré par le passé qu’ils pouvaient s’allier avec le diable.

Alors crise, quelle crise ?

On parlerait de crise,si le moteur de la crise venait d’un vent salutaire contraire . Une réaction de l’opposition. Une destabilisation politique due à une opposition forte qui pourrait imposer aux pouvoirs politiques une direction à suivre. Une réaction positive à la crise politique et socio-économique du pays. Or cela n’est pas le cas. Même si les membres de la dissidence de « Adil », font à l’opposition un appel du pied en se déclarant son « alliée objective ». Cela pourrait réveiller les vieux démons de qui l’on sait.

Ce à quoi nous assistons aujourd’hui , n’est rien de tout cela. C’est une pseudocrise, initiée par ceux qui sont au centre du sytème et qui continuent à le gérer. Des membres mécontents d’un parti qui ne doit son existence qu’à un rassemblement d’individus agglutinés autour d’un pouvoir et à la recherche du pouvoir. Et qui par leurs « pseudos» coups de gueule, veulent faire croire, qu’ils agissent dans l’intérêt de la nation.Il n’agissent en fait que dans leur propre intérêt bien connu.

Que sortira-t-il de cette pseudocrise ?

Certainement pas un Etat aux structures gouvernementales et politiques assainies. Certainement pas un revirement par rapport à la politique de la gabégie et de l’influence militaro-commerçante en place.

Ce qui en sortira, on le sait déjà, tient en deux options. Le premier ministre, (comme disait un certain Gambetta –qui lui n’est pas mauritanien), devra soit « se soumettre, soit se demettre. » (voir mon article précédent intitulé "A quoi sert et ne sert pas un premier ministre" en cliquant ici )

En se soumettant, ce qui n’est pas improbable, vue sa carrure politique, il consacrera les influences de ceux qui ne sont pas mieux que ceux qui sont déjà en place , avec en prime un poids militaro-politique encore plus lourd. Avec beaucoup davantages aux frais de l’Etat et du Trésor public, pour faire taire la pseudo-dissidence.

En se demettant, ce qui n’est pas improbable non plus, vue son incapacité à gérer les institutions qui lui firent confiées, il laissera sa place à un autre premier ministre, qui négociera encore une autre crise qui consacrera encore l’autre aile de la gabégie en attente d’être assouvie.

Dans tous les cas, se sera toujours turban blanc et blanc turban

Et qu’aurions-nous gagné dans tout cela ? Rien.

Ou plutôt si. Nous aurions admiré pendant quelques jours une autre mascarade de celles qui , depuis la transition (inclue), s’égrennent en chapelets entiers sur la tête d’un pauvre peuple méprisé.

Alors crise, quelle crise ?

Pr ELY Mustapha

mercredi 25 juin 2008

Petit guide non illustré pour comprendre les militaires


Du militaire, en général , et du militaire mauritanien en particulier

Du militaire en général

Un militaire c’est un individu qui a une arme. C’est donc un individu qui a un prolongement artificiel. Un appendice qui l’on ne retrouve pas dans la nature. L’examen de toutes les espèces animales vivantes montre qu’un tel appendice n’existe pas. L’arme au poing c’est spécifique au militaire. Certes tous les individus non militaires peuvent posséder une arme, mais pour le militaire c’est vital. C’est elle qui justifie son existence. Si on lui supprimait cet appendice, le militaire ne serait plus militaire. Il sera tout sauf militaire.

Un militaire, ça revêt un uniforme, parfois kaki, quand il est en cérémonie, parfois bariolé (on dit « léopard ») quand il cherche à passer inaperçu dans la brousse. Même s’il n ya pas de brousse et plus de léopards, comme en Mauritanie. C’est donc un individu changeant. Parfois, habillé de blanc, parfois, de gris, parfois rayé, son rôle est de passer inaperçu, quand l’ennemi guette. Si on n’empêche le militaire de se confondre avec l’environnement, il ne sera plus militaire. Il sera tout sauf militaire.

Un militaire, ça porte sur les épaules, des « épaulettes ». Le militaire s’élève à son niveau d’épaulettes, plus il y a d’étoiles plus il monte au firmament. Plus ces étoiles sont jaunes plus le claquement des bottes de ceux qui en ont de moins jaunes est strident. Le militaire porte sur ses épaules son avenir . Si on supprimait ses étoiles, le militaire ne sera plus militaire. Il sera tout sauf un militaire.

Un militaire, ça prend racine dans les casernes. Ces espèces de forteresses dont les murs sont plus hautes que n’importe quelle bâtisse avoisinante. Forteresses que le militaire se construit pour se protéger. Le citoyen lui, qui doit être protégé n’étant pas dans la forteresse, on comprend donc qu’elle visent essentiellement à protéger le militaire…contre l’ennemi extérieur . Le citoyen est à l’extérieur. Sans forteresse, le miliaire n’est plus un militaire. Il sera tout sauf un militaire.

Un militaire, ça répond aux ordres. Un point c’est tout. Et un ordre est un ordre. On ne discute pas les ordres. On les exécute. Le militaire n’a pas le choix. Et il n a pas à comprendre. Sa conscience c’est celle de celui qui donne les ordres. En somme sans cette conscience déplacée de bas en haut, le militaire n’est pas un militaire. Il peut être tout sauf un militaire.

Un militaire, c’est discipliné. Il doit ramper sous des barbelés acérés en pleine canicule, traverser en rampant un marécage puant, se rouler dans la vase aux lombrics, escalader toute hauteur, se balancer à une corde arrimée à un hélico en folie..Tout, tout. Le militaire doit passer toutes les épreuves même les plus inutiles dans la discipline la plus totale. Sans cette discipline, le militaire se poserait des questions sur ces choses bizarres qu’on lui fait faire. Or le militaire n’a pas à se poser des question. Sans cette discipline, le militaire ne serait plus un militaire. Il sera tout sauf un militaire.

Un militaire ça porte forcément quelque chose sur la tête. Un haut de tête parfois mou en tant de paix relative (un béret), parfois solide en tant de non paix (casque). Bien que la « non paix », c’est le climat naturel dans lequel vit le militaire. Sous son casque souvent en fer, le militaire se protège des balles perdues que l’appendice de son ennemi pourrait bien lâcher. Mais le militaire portant tout le temps son casque, on comprendra donc qu’il est psychologiquement en temps de « non paix ». Sans son casque le militaire ne serait plus un militaire. Il sera tout sauf un militaire.

Un militaire ça n’aime pas le désœuvrement. En temps de paix, sa guerre c’est la corvée. Corvée qui dépend de la place qu’il occupe dans la hiérarchie militaire. De bas en haut, cela va du nettoyage des latrines, aux coups d’Etat. Bien que ces derniers puissent parfois se confondre avec le premier, il n’en reste pas moins que chaque militaire dispose d’une corvée. Sans corvée, le militaire ne serait plus un militaire. Il sera tout sauf un militaire.

Le militaire, ça défile. Surtout dans les cérémonies. Le roulement de tambours , et c’est la parade. Démonstration de treillis, démonstration de force. Le monde animal, nous apprend comme toutes espèces font la parade. La parade est l’expression d’un sentiment à extérioriser par l’espèce en question. Le militaire, parade. Dans la rue ou dans la caserne. Sans parade, le militaire ne serait plus un militaire. Il sera tout sauf un militaire.

Du militaire mauritanien, en particulier.

Le militaire mauritanien... est un militaire. Tout ce qui fut dit plus haut s’applique à lui. Sauf que en Mauritanie tous les militaires ne se valent pas.

En effet, en Mauritanie, il y a deux types de militaires. Ceux qui le sont vraiment et ceux qui ne le sont plus. Ceux qui ont une simple solde, et ceux qui vivent sur l’or. Les premiers s’échelonnent en grade entre le gobby de quartier et le commandant. Les seconds entre le lieutenant-colonel et le colonel ( ou le général)

Il y a donc deux espèces de militaires en Mauritanie. Ceux qui vivent la misère et s’emploient à constituer un corps d’armée et ceux qui se sont perchés au sommet de l’Etat et qui ne veulent plus en descendre. Ainsi il y a dans l’armée deux classes. Les très hauts gradés qui parasitent l’Etat et les autres qui végètent en dessous (les parias).

Comment donc comprendre la classe des hauts-gradés et celle des « parias » de l’armée?

Le militaire de la classe des hauts-gradés, est souvent un putschiste ou il fut dans les parages. Il a occupé le sommet de l’Etat, ou des postes importants et dispose d’un réseau d’alliances et d’intérêts qui le maintient à sa place. Le militaire de la classe des « parias », est un putschiste, malgré lui. Car sans lui, pas d’armée, donc pas de putsch. Il fut utilisé et oublié.

Le militaire de la classe des hauts-gradés, est souvent très riche. Il a amassé une fortune en manipulant les rouages de l’Etat, son influence et ses relations. Le militaire de la classe des « parias », n’arrive pas à joindre les deux bouts. Il dispose d’une solde qui a fondu face à la cherté de la vie, comme neige au soleil.

Le militaire de la classe des hauts-gradés, n’a plus rien de militaire. Il est devenu un politique parmi les politiques. La seule chose qui le différencie, c’est son appendice à recul qu’il brandit ostensiblement en tenant la place. Le militaire de la classe des parias, sait que son chef est devenu un politique, qui profite justement de son existence à lui pour faire ce qu’il veut. Et cela le travaille.

Le militaire de la classe des hauts-gradés ne peut plus justifier sa présence au sommet de l’Etat, alors il use de sa dissuasion, de mille façon montrée, pour tenir en respect ceux qui voudraient l’écarter. Le militaire de la classe des parias se sent alors frustrée face à une hiérarchie qui ne pense plus à lui, mais à ses intérêts inavoués.

Le militaire de la classe des hauts-gradés a tellement vécu à la tête du pouvoir qu’il pense que plus rien ne peut se faire sans lui. Le militaire de la classe des parias est tellement resté au bas du pouvoir qu’il pense désormais que plus rien ne se fera avec lui.

Le militaire de la classe des hauts-gradés a donc acquis cette mentalité de clans à appendices qui veut tout s’approprier, y compris les rouages du pouvoir. Les militaires de la classe des parias ont, quant à eux, acquis cette mentalité de laissés-pour compte qui n’ont rien ; même pas la garantie d’un monde meilleur. Malgré les ressources dont bénéficie leur corps (voir mon article : « Faut-il supprimer l’armée » en cliquant ici).

Pour comprendre donc le militaire mauritanien, il faut comprendre ces deux mentalités qui imperceptiblement s’entrechoquent au sein d’un corps armé et qui détermineront certainement le devenir de l’institution militaire. Une poussée à la Coriolis, imperceptible mais certaine.

Pr ELY Mustapha

La barre d’outils de Haut et fort !

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Le web mauritanien …à portée de main



Yahoo ! s’en était fabriqué une, Google aussi. Et voici la barre d’outils du blog Haut et fort. Totalement orientée vers le Web Mauritanien.



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Pr ELY Mustapha

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mardi 24 juin 2008

Petit mauritanien

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Je ne sais si, dans vingt ans, tu liras cette lettre mais je ne souhaite qu’une chose : que tu la lises dans une Mauritanie prospère et fière de son passé et sûre de son avenir.

Petit Mauritanien,

Aujourd’hui , tu as cinq ans je te regarde gambader sur tes frèles jambes et je m’interroge.
Je m’interroge sur ce que te laisseront les générations d’aujourd’hui et sur le poids que déjà te font supporter celles d’hier.

Que vont-t-elles te laisser en héritage ?

De quelque côté que je me retourne je ne vois que la désolation d’un sous-développement orchestré.
Tes airs de jeux sont des dépotoirs à ciel ouvert .Une capitale en ruine noyée dans les immondices où les routes sont des nids de mort où rugissent des tacots branlants à tombeau ouvert. Des nids de desespoirs producteurs de l’handicap et pourvoyeurs des gémissiments des accidentés qui peuplent les lits à descente de nos hôpitaux insalubres.

Ton univers d’écolier est une aire de non-savoir . Une école où l’instituteur, prophète de jadis, est dévenu dans une société sans repères, l’icône de l’ignorance et le pôle de l’irrespect. Vivant en dessous du seuil de subsistance et s’accrochant à qui mieux mieux aux haillons d’une société qui a rangé le savoir aux rayon de l’inutile. Qu’aurais-tu appris, mon enfant, dans ce miasme éducationnel sinon à prendre les chemins de la déliquance ?

Qu’auras-tu reçu en héritage de tes pères ?

Ils ont pillé le pays et ses ressources. Ils ont laissé un pays exangue où des miliers de citoyens végétent dans une pauvreté criante dans des bidons-villes aux relents de misère instituée. Des familles entières vivant de vent et d’espoir et que déciment en silence la soif, la faim et la maladie.

Petit Mauritanien,

Je sais que tu ne comprendras pas pourquoi sur une terre d’Islam tant d’hommes et de femmes ont pillé les ressources de la communauté . Comment ils ont appauvri leur pays et hypothéqué ton avenir. Comment ils ont crée la ségrégation entre toi et ton frère au nom de leur désir de pérennité. Te laissant ainsi supporter le schisme social de leur bétise raciale. Tu te demanderas si les préceptes spirituels et moraux de l’Islam furent l’une des préoccupations de nos gouvrnants et tu n’auras pas tort.

Que vont-t-ils te laisser en héritage ?

Un Etat fragilisé par la culure de l’intérêt personnel , du clanisme et la corruption dans lequel demain tu ne seras peut-être qu’un maillon qui perpétuera la chaine.
Tu ouvriras les yeux sur un pays aux ressources naturelles épuisées où le sable, aux pieds nus, est une braise et le soleil, sans toit, un enfer. Car ils auront tout emporté dans leur voracité jusqu’à la dernière sardine des côtes jadis prospères de ton pays.

Depuis des dizaines d’années que les richesses de ton pays sont exploitées, elles n’ont jamais contribué à un développement durable.

Tu ne pourras compter ni sur un tissu industriel d’envergure, ni sur une production nationale compétitive sur les marchés internationaux, ni sur une technologie exportée , ni sur un savoir faire qui aurait fait notre fierté nationale ou internationale. Rien.

On ne t’aura laissé, en pillant tes richesses, que du vent. Un pays comptant parmi les pays les plus pauvres du monde ayant un indice de développement plus bas que le niveau d’une mer qu’ils auront exploitée à outrance et pollué à satiété.

Aujourd’hui je te regarde et le sourire innocent que tu m’adresses fait mal et j’y mesure toute l’ampleur de l’injustice que l’on te fait.

Je ne sais si en lisant dans vingt ans cette lettre, au moment où peut-être je ne serai plus là , tu aurais eu droit, toi et tes enfants , à une école studieuse, à un cadre de vie sain à un travail épanouissant et à une vie heureuse dans un pays développé .

Je ne le sais pas. Mais je le souhaite vivement. Bien qu’au moment où j’écris cette lettre, j’ai un doute profond en celà.

Non pas un doute en ce que notre pays puisse se redresser un jour et t’offrir une vie heureuse à laquelle tu auras généreusement contribué par ton savoir, tes efforts et ton travail, mais un doute quand à l’ampleur du sacrifice qu’il faille consentir par une société minées par les non-valeurs.

Certes nous inaugurons aujourd’hui une ère démocratique mais elle sera ce qu’en feront ses acteurs. Soit le catalyseur d’un changement qui te bénéficiera dans vingt ans, soit le début d’un changement dans la continuité dont tu souffriras encore dans vingt ans et au-delà.
Petit Mauritanien,

L’espoir est permis que demain soit meilleur qu’aujourd’hui ; et toutes les bonnes volontés de ce peuple oeuvrent à cela.

Mais si cela n’était pas le cas, sache au moins dans ta misère future, dont nous sommes responsables, que nous étions dans le passé plus misérables que toi. Et que si nous ne t’avons rien laissé en héritage, c’est que nous étions encore moralement plus méprisables. Un épisode à gommer de l’histoire des peuples.
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Récrée-toi une Nation nouvelle. Et ne te retourne pas.
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Pr ELY Mustapha
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P.S: Cet article fut publié, il y a exactement un an , à la veille d'une démocratie naissante pleine d'espoir. Et nous le republions pour que mémoire reste, face à ce qui , hélas, n'a pas changé.

lundi 23 juin 2008

Au Fonds ....des choses

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Quels chiffres, croire ?

La question est la suivante :

Pourquoi le rapport, pour 2006, adressé au comité national pour « l’initiative transparence des industries extractives « (CNITIE) fait-il apparaître 208 445 000 dollars, de revenus pour le compte pétrolier alors que le rapport d’audit fait apparaître uniquement la somme de 175 699 512 dollars soit une différence nette de 32 745 488 dollars !

Quasiment 33 millions de dollars ne sont pas trouvables.

1. D’où viennent ces chiffres ?

La méthode :

On a comparé entre le rapport national sur l’initiative pour la transparence des industries extractives pour l’année 2006 adressé à CNITIE, préparé par Le cabinet Ernst &Young (Expert indépendant ) et publié le 31 juillet 2007 , d’un côté,

et le rapport d’audit externe du Fonds national des hydrocarbures effectué par Price Waterhouse coopers présenté le 18 avril 2007, de l'autre.

Les chiffres :

Le rapport 2006, précité, fait apparaître un revenu pour le fond national des hydrocarbures de 208 445 000 dollars répartis comme suit :

Redevances superficielles annuelles : 297 000 dollars
Bonus : 107 861 000 dollars
Profit oil : 88 933 000 dollars
Impôts directs sur les bénéfices : 9 646 000 dollars
Contribution à la formation des agents de l’administration : 1 708 000 dollars

Le rapport d’audit externe quant à lui fait apparaitre un montant de : 175 699 512 dollars dont voici la répartition :

Le commun des mortels remarquera donc la différence entre ces deux montants.
2. Pourquoi ces chiffres sont-ils différents ?

Si l’on s’en tient d’abord à la bonne foi de ceux qui gèrent ces ressources, l’on ne peut qu’en tirer la conclusion qu’une part de ces montants aurait été affectée à des emplois différents ou que les déclarations des sociétés pétrolières sont erronées. Ceci équilibrant cela.


Mais étant des esprits libres, nous ne pouvons pas concevoir que de telles ressources aient pu être ici déclarées et attestées par des cabinets indépendants de confiance internationale (Ernst and Young ) en fin d’exercice de l’année 2006 et qu’ils soient rapportés différemment par un audit externe du Fonds sur la même période 2006 par un autre cabinet d’audit de même renommée (PriceWaterhouseCoopers)..

Aussi nous croyons que ces chiffres sont différents pour une raison essentielle :

Pour établir son rapport 2006 le premier cabinet (Ernest&Young) agissant en tant qu'expert indépendant, a bien reçu les déclarations de versements effectuées par les sociétés pétrolières à l’Etat mauritanien, d’un côté. Et il a aussi reçu les déclarations de versements reçues par l’Etat lui-même, de l’autre. Ceci lui a permis de faire les rapprochements entre ce que les compagnies attestent avoir versé à l’Etat et ce que l’Etat dit avoir reçu des compagnies pétrolières.

Ce cabinet déclare même que « le rapprochement entre les déclarations consolidées des compagnies extractives des secteurs miniers et pétroliers, d’une part et les déclaration de l’Etat d’autre part n’a pas mis en évidence d’anomalies significatives.»

Donc les 208 445 000 dollars de revenus pétroliers reçus par l’Etat sont donc bien appuyés sur les rapprochements des déclarations des parties (Compagnies pétrolières et Etat).


Quant au second cabinet d'audit externe ( PriceWaterhouseCoopers), il n’a tout simplement pas reçu les Etats déclaratifs de versement lui permettant de vérifier la réalité des chiffres en faisant les rapprochements nécessaires. Il s’est tout simplement fié aux montants fournis la Banque centrale de Mauritanie !

En fait PriceWaterhouseCoopers, a complètement éludé la moitié de son travail d’audit, en n’ayant pas la possibilité de contrôler la réalité des ressources versés dans le fonds, en amont, et donc de réaliser un Etat des rapprochements lui permettant de vérifier la différence entre les fonds versés par les compagnies pétrolières et les fonds que l’Etat dit avoir reçu.

Donc, en éludant ce contrôle en amont qui seul permettait de connaître des montants réels versés par les compagnies pétrolières à l’Etat, PriceWaterhouseCoopers a réduit son audit à une congruité.

Cet audit a ignoré les dispositions de l’article 9 de l’ordonnance 2006-008 du 04 avril 2006 qui dispose en son alinéa 3 : « Le rapport annuel (...) inclut l’audit financier du Fonds national des Hydrocarbures (…) et le rapprochement certifié entre le paiement des sociétés et les revenus du fonds. ».

Aussi l’audit de PriceWaterhouseCooper, a tout simplement entériné les chiffres en ressources et emploi fournis….par la banque centrale. Or la banque centrale n’a déclaré à ce titre que 175 699 512 dollars !

Et cet auditeur de déclarer dans son rapport : « Nous n’avons pas obtenu les preuves du respect au 31 décembre 2006 des dispositions de l’article 9 de l’ordonnance relatives à la publication par le ministère des finances de rapports trimestriels et annuel sur le fonctionnement du fonds. Il s’ensuit que nous n’avons pu nous assurer du rapprochement entre les sociétés pétrolières et les revenus enregistrés dans le compte du fonds. »

Voilà donc l’explication. Le contrôle en amont (montant des ressources reçues des sociétés pétrolières) n’ayant pu être réalisé, l’audit s’est limité à la vérification d’Etats financiers de gestion du Fonds en emploi sur des ressources prédéclarées (sans possibilité de vérifier leur réalité).

3. Quels sont alors les vrais chiffres ?

Voilà une question que chaque citoyen se devrait de poser. Et que d’ailleurs il se pose dans un Etat où la gabegie n’est point absente. Et où tout prête à la suspicion. Ces rapports datant de l’année dernières se devaient d’avoir entrainé un lever de bouclier des institutions chargées de surveiller la transparence des industries extractives , or l’inertie complaisante semble avoir imbu tout le système.
A la question « Quels sont alors les vrais chiffres ? », il convient de répondre avec beaucoup de prudence. D’abord en posant les jalons à sa réponse, avant de fixer les responsabilités, ensuite.


Ce qui milite en l’incertitude des chiffres :

- L’existence des écarts entre les déclarations des sociétés pétrolières et celles de l’Etat, quant aux montants reçus, fait planer une certaine réserve quant aux chiffres finaux. En effet dans le rapport de 2006 , le cabinet Ernest & Young indexe certain écarts entre les montants déclarés par les compagnies et ceux reçus par l’Etat. Toutefois ces écarts t apparus en 2006 parfois en faveur des Compagnies pétrolières (288 000 dollars), d’autres fois en faveur de l’Etat ( 4 972 000 dollars), influencent peu les chiffres globaux déclarés, à moins qu’ils ne soient amplifiés par l’absence de sincérité des déclarations des uns et des autres.

- L’absence de transparence dans l’information sur la gestion du fonds des hydrocarbures. L’auditeur PriceWaterhouseCooper le signale : « Nous n’avons pas obtenu les preuves du respect au 31 décembre 2006 des dispositions de l’article 9 de l’ordonnance relatives à la publication par le ministère des finances de rapports trimestriels et annuel sur le fonctionnement du fonds. ».

- L’audit effectué par PriceWaterHouseCooper a porté sur un exercice s’étalant sur 6 mois uniquement de l’année 2006. En effet, me cabinet déclare : « Nous avons audité le Tableau des ressources et des emplois ainsi que les notes qui les accompagnent (états financiers) du Fonds national des revenus des hydrocarbures (FNRH) pour l’exercice clos le 31 décembre 2006, premier exercice commençant exceptionnellement le 14 juin 2006 ». Cet exercice ne s’ étalant que sur 6 mois donne une autre réalités des chiffres qui ne seraient donc pas le reflet du revenu annuel du fonds, mais d’un premier exercice de six mois.

Ce qui milite en l’inexactitude des chiffres :

- L’écart constaté entre les chiffres présentés par Ernst & Young (Expert indépendant), et ceux présentés par PricewaterhouseCooper (auditeur), est trop grand pour ne pas laisser planer le doute. C’est à l’autorité chargée de la gestion du fonds de justifier ces écarts. Cela n’est pas encore fait.

- L’amalgame des chiffres, nous retrouvons des appellations qui semblent être des fourre-tout. Telle celle de « primes et bonus », où un montant 100 millions de dollars payés par l’opérateur Woodside a pris place (suite à l’accord à l’amiable intervenu le 6 juin 2006 concernant la révision du contrat de partage de production).Un détail des rubriques apporterait plus de clarté.

- Les revenus des placements bénéficiant d’un contrôle relatif . « Les revenus des placements sont des paiements d’intérêts dont bénéficie le Fonds National des Revenus des Hydrocarbures (FNRH) dans le cadre des opérations que la Banque Centrale de Mauritanie effectue pour son compte sur le marché monétaire international. ». Les placements, leurs modalités et les revenus qu’ils génèrent sont laissés à la discrétion du gestionnaire du fonds. Le projet de loi sur la gestion du FNRH, déposé devant Parlement en 2007, se devait de résoudre cette situation. Sa suite tarde à venir.

- Enfin, les multiples tensions qui existent au niveau des acteurs gérant le FNRH, les procès, scandales et autres accusations portant sur la gestion publique des contrats pétroliers ont généré un environnement peu propice à la confiance.
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En conclusion :

Le respect de l’ordonnance 2006-008 est impératif pour un meilleur respect des modalités de contrôle de la gestion du fonds des hydrocarbures à travers notamment son auditeur externe ainsi que les organismes de surveillance et de garantie de la transparence des opérations sur les hydrocarbures.

L’évaluation de la politique de l’Etat à l’égard des sociétés pétrolières afin de juguler les dérives d’une administration publique encline depuis plusieurs années aux chemins de traverses.


Mais, franchement, peut-on vraiment croire, que face à tant de flux financiers provenant du pétrole et des mines, il n’ y ait pas quelque part un mouvement de malversation qui s’est déjà constitué ? Difficile de ne pas l’admettre. Mais qu’est-ce qui pourrait retenir la main de celui qui soustrait les biens de l’Etat, si ce n’est l’Etat lui-même.
Et l’état de l’Etat laisse à désirer.


Pr ELY Mustapha

mardi 17 juin 2008

Commissionné dans une commission

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V.I.P
(Very Important Person)


Ça y est je suis dans une commission. Oui, vous vous avez bien lu. Je suis dans une commision. En fin de liste. Oui tout-à-fait, en fin de liste. Oui comme un élève retardataire qui se place en bout de file. Les petits devant les grands derrière. Merci qui ? Merci le rédacteur de ce décret. Car par ordre alphabétique , j’aurai été certainement parmi les premiers de la liste. Mais voilà, je suis au bout, mais pas à bout. Bien que mon nom n’ait jamais figuré en fin d’une liste quelconque, dans ces circonstances cela avait-il un grand intérêt ? L’intérêt du décret n’est-il pas justement de rémédier à une situation qui, elle, est au bout du rouleau. L’Education nationale, dans toutes ses facettes, de la préscolaire à la professionnelle.

Mais deux questions "existentielles", me taraudent l’esprit, moi "l’outsider et le réfractaire" : d’abord, « pourquoi moi ? » et ensuite « que « veux-t-on de moi » ?

Je suis important

Et c’est alors que je découvris le décret n° 2008-111 daté du 7 mai 2008 qui dispose en son article 2 : « la commission comprend quatorze membres choisis parmi les personnalités de nationalité mauritanienne connues pour leurs compétences, leur intégrité morale, leur honnêteté intellectuelle et leur impartialité. » !

Voilà on vient de me le dire officiellement par un décret présidentiel, contresigné par pas moins de cinq ministres à la suite du Premier Ministre lui-même, que je suis une personnalité vraiment importante, je dirai même très très importante. Les Anglais appellent mon genre de personne : VIP (pour les non anglicisants cela signifie : « Très importante personne » -Very Important Person ».

Et tout cela c’est moi : Compétent, intégre moralement, honnête intellectuellement et même impartial ! », de quoi mériter le prix Nobel ! Ou le prix Chinguitty.

Aussi, je me jette un satisfecit et je me gonfle les chevilles.
Cependant, quelque chose me chiffonne un peu. Le rédacteur de ce décret, n’a pas pris le temps de nous dire si tous ces qualificatifs sont cumulatifs pour une même personne ou s’il faut en choisir un au hasard qui vous sied le mieux. Ou si chaque membre de la commission devait choisir celui qui lui plait.

Qu’à cela ne tienne, maintenant , je sais qui je suis. Tout-à-fait! Je suis tout cela. C’est formidable quand on vous renvoie votre image. Ça résoud bien des interrogations existentielles. Et surtout quand on le dit à votre place. Et en plus haut et fort ! Le bonheur quoi.

Donc un conseil si vous pouvez être membre d’une commission n’hésitez pas. Non seulement c’est bon pour le CV, (je dis bien « C » pas « R »). Ça ajoutera une ligne à votre CV : « ancien membre de la commission d’Etat... etc etc. »

Mais le pire dans tout cela c’est quand on dit que vous êtes tout ça, il faut soit prouver que vous l’êtes, soit que vous ne l’êtes pas. Et dans les deux cas, c’est le piège.

Soit on essaie de n’être rien du tout et être un membre tout court. Et comme dans cette commission nous sommes quatorze, c’est facile de passer inaperçu. Il suffit de se taire et de regarder. Ecouter ce qui se dit, noter sagement tous les propos et acquiescer de temps à autre de la tête surtout quand c’est le président de la commission qui parle. Cela aura des effets immédiats, il se retournera toujours vers vous quand il sera en difficulté, vous deviendrez alors son allié , muet et salutaire. Et comme après tout comme, l’a dit le décret, vous êtes une « personnalité très importante », même votre silence le sera aussi. Cette attitude est fortement recommandée dans le genre de commissions dont le rôle est d’adjuger quelque chose. Les commissions des marchés publics, élèvent ce genre de membre au rang suprême de la notoriété. Dans la commission pour l’Education, cette attitude n’est pas indiquée. Aussi j’ai décidé d’être très éduqué ( ce qui est – défense d’en rire – mon état naturel), c’est-à-dire jouer mon rôle de commissionné. Travailler sans concession aucune sur les principes et valeurs qui me sont chers et qui font la trame de ce blog. Et que certains de nos chers amis ont exprimé ( Voir les messages, sur ce blog, de Maatala, de Lambda, de Yanis, de Hamid et de tant d’autres.)

Qu’attend-t-on du VIP ?

La première question existentielle (sachant maintenant qui je suis) étant résolue , il me reste à resoudre la seconde question existentielle à savoir : « Que veux-t-on de moi ? »

En jetant un coup d’œil à l’article 5 dudit décret je suis effaré par ce qui m’attend : « Le cadre de la commission porte sur la définition des missions assignées à l’Education et à la formation , les contenus globaux de formation et la détermination d’aptitude et de compétences ainsi que des valeurs communes à promouvoir, en vue de former une génération de mauritaniens soucieuse de l’unité du pays, enracinée dans nos valeurs originelles et ouverte aux éxigences de la modernité. ».
La commission des Etat généraux, n’ est ni plus ni moins qu’une mission civilisationnelle. Son instrument « l’Education et la formation ». Vaste continent, puisque le décret en donne le contenu : « l’Education et la formation comprennent précisément :
- Le préscolaire
- Le fondamental
- L’enseignement originel
- Les enseignements secondaire et supérieur
- La formation technique et professionnelle »

En somme , un travail de coureurs de fond à perdre haleine. C’est autant dire que tous les qualificatifs rapportés par le décret créant cette commission ne suffiraient pas et qu’il faudrait y ajouter : « personnalité mauritanienne, sachant garder son calme, capable de se retenir dans les moments difficiles, pouvant travailler en milieu de stress permanent, ayant un haut degré de responsabilité pour ne pas mettre les pieds dans le plat, sachant parler en regardant droit dans les yeux son interlocuteur pour se faire comprendre sans ambiguité et surtout ayant le sens du travail collégial sans concesssion sur ses convictions personnelles. »

Bref, être « éduqué » aux commissions à plusieurs membres.

Comment la commission va-t-elle procéder pour abattre cette charge de travail? « La commission , suivant l’article 6 dudit décret, procède à la préparation, l’organisation et l’exécution des différentes phases des Etats généraux de l’Education et de la formation (EGEF). A ce titre, elle devra :

- Dresser un état des lieux exhaustif du système éducatif national dans son ensemble
- Engager et superviser un large processus de concertation à l’échelle du pays autour des problèmes de l’Education et de la Formation ;
- Formuler des solutions appropriées, en impliquant toutes les forces vives de la Nation
-Organiser et superviser le déroulement des Etats généraux de l’Education et de la formation et préparer les documents de synthèse. »
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Aussi dès son installation la commission s’atellera à :

- Définir son approche méthodologique et le chronogramme de ses activités ;
- Produire et soumettre au Gouvernement un rapport diagnostic du secteur Education-formation;
- Définir et soumettre au gouvernement un rapport définissant une stratégie de développment du secteur éducatif .

A la fin du processus, la commission devra remettre au gouvernement un rapport général des EGEF, comportant le diagnostic, la vision, la stratégie du secteur de l’Education/Formation et les actes des EGEF. »

On comprend maintenant pourquoi pour être membre de cette commission il faut être "VIP" (je le repète : Very Important Person- comme moi).

Mais rassurons-nous la commission ne va pas torturer ses VIP, elle va s’appuyer sur une pléiade d’individus pour l’aider à remplir sa mission. L’administration publique, tous secteurs confondus, avec ses experts et ceux qui pensent l’être , les consultants nationaux et internationaux et bien d’autres ressources humaines sont à sa disposition…

La commission devra aussi dans le cadre de sa mission « tenir des réunions avec les partis politiques , les élus, les organisations professionnelles et toutes autres parties jugées utiles , soit à son initiative, soit à la demande de ceux-ci »

Ainsi chacun peut demander à exprimer son avis devant la commission . Une bonne chose, les sans-voix constituant la majorité de ce pays. Ceci est renforcé par le fait que « La commission peut sur une question déterminée, entendre toute personne dont elle juge l’avis utile à l’accomplissement à sa mission, comme elle peut avoir recours à l’expertise nationale et internationale »

Donc la commission sera très bien secondée et aura davantage un rôle de supervision ce qui fait qu’en tant que VIP, je me demande d’ailleurs ce que je vais apporter à cette commission qui va faire appel à tous les experts de la république et d’ailleurs. Bon du moment que j’y suis, on ne sait jamais je pourrai être utile à quelque chose. Par exemple, dire ce que je pense. N’est-ce pas un grand privilège qui m’est, à l’instar de mes collègues, offert ?
Merci qui ? Merci celui qui, après mure réfléxion, m’a mis à la fin de la liste.

Le VIP face au budget de la commission

L’argent. Voilà ce qui nous unit dans le besoin et… dans l’opulence. Un VIP se doit d’être « budgétisé ». D’où viendra l’argent ? Et comment sera-t-il géré ? Préoccupations d’un VIP qui vient tout droit des finances publiques. L’argent du contribuable. Eduquer le contribuable avec son argent. Difficile mission n’est-ce pas ?

La commission dispose d'un budget qui est à la charge de l’Etat. Fixé, comme le mentionne le décret, en concertation avec le ministère de l’Education Nationale, il sera mis « à la disposition de la commission dès son installation pour lui permettre de remplir au mieux sa mission ».

La gestion du budget de la commission se fera suivant les règles, principes et techniques de la comptabilité publique puisqu’un comptable éxecutant ce budget sera nommé par le ministre des finances.

Rassurant n’est-ce pas ? C’est donc un contrôle de régularité sur les ressources financières mises à la disposition de la commission. En effet « les fonds alloués à la commission sont des deniers publics soumis à ce titre aux contrôles prévus par les lois et réglements en vigueur. »
L’ordonnateur principal du budget étant le président de la commission.

Pour ne pas s’étaler sur les défaillances du contrôle de régularité des finances publiques, je renvoie le lecteur à mes écrits et pour une appréciation globale, à ce lien

En conclusion, il s’avère qu’avec tous les VIPs qu’elle compte, et tous les qualificatifs qui les mettent dans le champ de l’infaillibilité, la commision semble partie pour accomplir sa mission.
Cependant toute institution ne se juge qu’à son action sur le terrain et la réalisation des missions qui lui sont assignées.

Aussi j’ai été ces derniers jours à Nouakchott, pour le vérifier.

La commission a-t-elle siégée ?

La commission a-t-elle commencé son travail ?

La commission travaille-t-elle d’arrache-pied pour réaliser ses objectifs ?

Ses membres s’entendent-ils tous très bien sur ses objectifs, sa mission et ses moyens ?

Hélas je ne pourrais vous le dire.

Article 4 du décret créant la commission: « Dans l’exercice de leurs fonctions, les membres de la Commissions sont soumis à une obligation de réserve ».

Heureusement pour nous, « la commission rend public ses activités et ses propositions par voie de presse ou par toute autre voie jugée utile », sans cela j’aurai été un « VIP » sans-voix et, pour moi , cela ne vaudrait pas toutes les commissions du monde.

Pr ELY Mustapha

mardi 3 juin 2008

Bilinguisme et langue officielle

La grande confusion

Lorsque l’on parle, de réforme de tout système éducatif, les yeux sont braqués sur la langue. C’est autant dire qu’ils ne peuvent la voir que si on la tire. Mieux encore on l’étale . "Uniglottes", "biglottes", "polyglottes" se font un devoir de penser que sans la langue, il n y a pas de salut au palais de la connaissance. Mais quelle langue, faut-il tourner sept fois dans sa bouche avant d’en user ?
La langue est d’une importance capitale. Elle est le vecteur de la connaissance et du savoir.

Le débat actuel autour de la langue est biaisé par le fait que si la réponse recherchée est bien claire, les questions par contre sont très mal posées.

Ainsi la question : « Pourquoi ne veut-on pas du bilinguisme en Mauritanie dans l’éducation nationale » est extrêmement mal posée.

Et sa réponse pour la redresser ne peut-être que : « toute personne douée de raison et de culture ne peut nier que le bilinguisme se doit d’être institué dans l’éducation en Mauritanie. » Il y va de la survie et du développment même du pays. L’enfermement linguistique est aussi fatal aux civilisations que le papier à mouche, aux mouches.

L’Ecole mauritanienne se doit de former les générations mauritaniennes dans toutes les langues. Les langues sont les clefs fondamentales du renforcement et de la compréhension entre les peuples et les nations .
Que le législateur impose d’enseigner dans nos écoles, le français, l’anglais ou toute autre langue européenne ou asiatique est en soi une initiative à saisir au vol. Les seuls critères dans le choix prioritairement de l’enseignement de ces langues sont :

- Leur intérêt pour la coopération et le dialogue avec les autres pays et prioritairement avec-nos pays africains frères frontaliers ou lointains. Ainsi dans ce cas le français et l’anglais, d’abord, mais aussi l’espagnol et le portugais s’imposent d’eux-mêmes.

- L’apport pour le dialogue et la collaboration avec les autres nations du monde et surtout celles qui ont des relations historiques avec notre pays et auxquels lient des accords de coopération judiciaires, économiques et financiers. Le français et l’anglais s’imposent encore, à côté de langues de pays qui prennent une dimension exponentielle dans l’économie mondiale, telle que la Chine.


- L’apport pour la compréhension et la défense des intérêts du pays face aux institutions financières publiques, nationales et internationales (Système financier et monétaire international, institutons de Bretton Woods ). L’anglais est là une langue très importante.

- L’apport au rayonnement économique et culturel du pays, qui ne peut se faire qu’en passant d’abord par la langue et la culture des autres. On ne promeut pas sa culture en usant de sa propre langue. Dans cette optique, l’enseignement de toutes langues, notamment celles des Nations-Unies, s’impose par lui-même.

En definitive oui, l’école Mauritanienne se doit d’être principalement bilingue. Accessoirement trilingue ou polylingue, les limites ne doivent être que l’intérêt que revêt l’enseignement ou l’apprentissage de telle ou telle langue pour le pays, tel que souligné dans les points précedents.
Toutefois, il ne faut pas confondre bilinguisme (ou polylinguisme) de la nation et le monolinguisme officiel de l’Etat.
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Le bilinguisme de la nation sauvegarde et développe les intérêts économiques, sociaux, culturels et internationaux spécifiés.

Le monologuisme officiel de l’Etat sauvegarde et protége la cohésion et la continuité des institutions administratives de l’Etat. En assurant, l’uniformité de la langue de travail, de la langue de communication et la compréhension de tous de l’action des autorités publiques.

Lorsque la constitution dispose que la langue officielle de l’Etat mauritanien est la langue arabe. Cela signifie que les actes publiques, les interventions publiques en sommes le vecteur de la communication de l’Etat avec ses citoyens est la langue arabe.

En effet, sans une langue officielle commune, c’est à la fois le dédoublement des actes, c’est l’incompréhension linguistique entre les acteurs publics . Celui-ci parlant le français ou l’anglais celui-là parlant l’arabe et personne ne peut emettre un acte matériel (documents administratifs et officiels) ou engager une communication compréhensible par l’autre.

Et la bonne justice impose que tous les citoyens soient traités également à travers les actes officiels qui les concernent dans une transparence que la pluralité des actes, leur traduction si elle est engagée mettra certainement en cause.
Aussi si pour arriver à l’unité du système administratif et d’information de l’Etat et pour désigner quelle sera la langue officielle de l’Etat mauritanien, ce sera incontestablement la langue arabe.

N’est’il pas curieux, en effet, que sur les plateaux dans nos medias officiels, le journaliste pose des questions en français au négromauritanien (ou au maure qui ne comprend pas l’arabe) qui répond en français et au maure (ou au négromauritanien qui ne comprend pas le français) des questions en arabe et réponde en arabe .

Le premier ne comprenant pas ce que dit le second et inversement et l’auditeur ne comprendra que la moitié du débat et peut-être moins. Mettons cela à l’échelle de l’Etat et l’on pourra saisir l’ampleur de la catastrophe pour la Nation.

Avoir une langue commune de dialogue à l’echelle officiel est un impératif. Il y va de la compréhension et de la cohésion de tous, mais aussi de la bonne gouvernance.

Et quelle langue s’impose le mieux dans le contexte mauritanien ? Il ne fait pas de doute que c’est la langue arabe pour des considération multiples que l’on a développé dans un article précédent (voir mon article à cette adresse : Pour une Mauritanie plurilingue : esquisse d’une solution. http://haut-et-fort.blogspot.com/2007/09/pour-une-mauritanie-plurilingue.html )

Mais, si au vu des élèment évidents développés l’arabe doit jouer son rôle de langue officielle, la question fondamentale est : pourquoi remet-on en cause de cette langue comme langue officielle de l’Etat mauritanien?

Si l’on simplifie , l’on peut dire que les raisons à cela peuvent être ramenées au rattachement de cette langue , consciemment ou inconsciemment, à :

- un courant politique
- un courant extrémiste
- une volonté d’assimilation
- un mouvement rétrograde

1.Le rattachement de l’arabe à un courant politique

Lorsque l’on examine les argumentaires de ceux qui rejettent la langue arabe, on y retrouve une référence explicite aux mouvements militants ou panarabes pour lesquels l’arabe est la langue du pays tout entier. Les Nasséristes , les Baathistes , pour ne citer que ceux-là placent l’adoption de la langue arabe au centre de leur lutte.

Les dernières années qu’à vécues le pays , notamment celle d’une arabisation à outrance et forcénée souvent appuyée par ces mouvements panarabes ou par ceux de leurs girons, a imprimé à ceux-là même qui refusaient l’arabe, un argumentaire supplémentaire pour la rejeter. La violence avec laquelle cette langue a été introduite dans le système éducatif et les exclusions qu’elle a engendrées, n’ont pas été favorables à son acceptation.
Ceux qui ont mis en place ces réformes, l’ont fait loin de toutes considérations pour le pays et le respect des idéaux de la population. Ils ont mal servi la langue arabe sur une terre sur laquelle elle est, elle-même, un symbole de tolérance.

Ceux qui pronaient l’intolérance des « arabes » de Mauritanie et leur politique agressive dans la gestion de l’Etat ont trouvé un filon inépuisable qui leur a permis de s’inscrire en faux par rapport à cette politique, d’en faire un cheval de bataille par lequel souvent ils s’en sont servi pour émouvoir la communauté internationale.
Voici le premier tableau négatif. La stratégie d’enseignement de la langue arabe de ces dernières années a d’autant été rejetée qu’elle a encore ternie celles à venir.

2 . Le rattachement de cette langue à un courant extrémiste

Ce n’est pas l’air du temps qui démentira. Tous ceux qui ont commis des attentats extrémistes en Mauritanie sont des arabes. Les arabes et par assimilation, les « arabisants » sont donc dangereux. La langue arabe c’est la langue de l’extrémisme. C’est le 11 septembre de l’éducation.
Pourquoi apprendrions-nous à nos enfants une langue qui est celle des extrémistes. Ne serait-elle pas une langue qui développe en elle-même un syndrome d’intolérance et de violence ? Idées occidentales développées à la veille d’un certain attentat et qui inconsciemment peuplent le sommeil de ceux qui n’en sont pas encore reveillés.

Simplification hasardeuse des choses qui prend sa source dans une désinformation généralisée qui, malheureusement, est confortée par la réalité amère et violente de ces derniers jours.

Mais la langue arabe, n’a jamais été la langue de la violence . C’est une langue de paix et de tolérance. Et il n’est point ici utile de rapporter le flot infini des humanités de cette langue qui couvre des siècles et des siècles de ressources inépuisables. Ce serait une offense aux esprits de la civilisation universelle. Ce serait en effet, un irrespect manifeste vis-à-vis de cette langue et des civilisations millénaires qu’elle a engendrées que de s’échiner à montrer ses vertus et ses richesses.

3. Le rattachement à une volonté d’assimilation

Ce que craint toute culture c’est qu’elle ne soit assimilée par une autre plus importante ou plus puissante dans son rayonnement humain ou géographique. La disparition d’une culture est toujours un drame pour l’humanité. Ceux qui rejette la langue arabe comme langue officielle, craignent cette assimilation qui est interprétée dans le sens de l’affaiblissement de leur culture et en fin de compte à sa disparition face à une culture dominante véhiculée par la langue arabe. Cette attitude est-elle justifiée on pense bien que non. En effet, les langues nationales se devant d’être enseignées et développées ne perdront ainsi ni leur place ni leur importance dans l’espace culturel national. Au contraire elles s’enrichireront mutuellement et rempliront le rôle qu’elle ont toujours joué : le dialogue. Et lorsque le dialogue existe, il n’ y a point d’assimilation mais enrichissement par les différences. Toute l’histoire de la sous-région a montré que les langues et les cultures ont toujours coexisté. Et cette affiramtion d’assimilation n’a pris son essor que face à l’instrumentation de la langue arabe par des régimes et des groupes politiques qui en porté moralement, physiquement et matériellement préjudice à la constituante négro-africaine mauritanienne ont accrédité cette liaison entre langue arabe et assimilation. Or ni la langue arabe n’est véhiculatrice d’assimilation , ni les cultures des différentes communautés mauritaniennes n’en sont dans un situation d’assimilation les unes des autres mais, depuis toujours, dans un mouvement perpétuel d’enrichissment mutuel.
En faisant disparaître la crainte générée par des pratiques politiques récentes, on réajustera l’attitude des uns et des autres face à la langue arabe.

4. La langue arabe engendrerait un mouvement rétrograde

S’il est une attitude des plus injustifiées et qui met dans le ridicule absolu ceux qui l’adoptent est celle de considérer que la langue arabe est une langue rétrograde. Une langue qui ne sied ni au développement ni à l’ouverture sur les sciences et le savoir modernes . Et par conséquent sont adoption dans le système éducatif ou en faire une langue officielle constituera un handicap au développement du pays et à son ouverture sur le monde. En somme la langue arabe est un frein au modernisme.

Le ridicule d’un tel raisonnement n’a d’équivalent que le dégré d’ignorance, de la langue arabe elle-même et de la civilisation arabe, dans lequel se trouvent ceux qui le tiennent

Tout cet espace ne suffirait pas à démontrer l’amplitude de cette erreur, mais une chose est certaine, la langue arabe est un vecteur certain de développement , de modernisme et il ne tient qu’à ceux qui l’utilisent de rejeter toute volonté de réduire son rayonnement national et international.

Et quelle meilleure illustration pourrions-nous trouver pour conclure que ces vers du poête Hafedh Ibrahim faisant "s’exprimer" la langue arabe sur les faiblesses qu’aujourd’hui , à tort, on lui porte :


رَجَـعْتُ لـنفسي فـاتَّهَمْتُ حَـصَاتي ** ونـاديتُ قَـوْمي فـاحْتَسَبْتُ حَـيَاتي

رَمَـوْني بـعُقْمٍ فـي الشَّبَابِ وليتني ** عَـقُمْتُ فـلم أَجْـزَعْ لـقَوْل عُدَاتي

وَلَـــــــدْتُ ولـمّا لـم أَجِـدْ لـعَرَائسي ** رِجَــالاً وَأَكْـفَـاءً وَأَدْت بَـنَـاتي

وَسِـعْتُ كِـتَابَ الله لَـفْظَاً وغَـايَةً ** وَمَـا ضِـقْتُ عَـنْ آيٍ بـهِ وَعِظِاتِ

فـكيفَ أَضِـيقُ اليومَ عَنْ وَصْفِ آلَةٍ ** وتـنـسيقِ أَسْـمَـاءٍ لـمُخْتَرَعَاتِ

أنـا الـبحرُ فـي أحشائِهِ الدرُّ كَامِنٌ** فَـهَلْ سَـأَلُوا الغَوَّاصَ عَن صَدَفَاتي

فـيا وَيْـحَكُمْ أَبْـلَى وَتَبْلَى مَحَاسِني ** وَمِـنْكُم وَإِنْ عَـزَّ الـدَّوَاءُ أُسَـاتي

فــلا تَـكِـلُوني لـلزَّمَانِ فـإنَّني ** أَخَــافُ عَـلَيْكُمْ أنْ تَـحِينَ وَفَـاتـــــــي

أَرَى لـرِجَالِ الـغَرْبِ عِـزَّاً وَمِـنْعَةً ** وَكَــمْ عَــزَّ أَقْـوَامٌ بـعِزِّ لُـغَـــــــاتِ

أَتَــوا أَهْـلَهُمْ بـالمُعْجزَاتِ تَـفَنُّنَاً ** فَـيَـا لَـيْـتَكُمْ تَـأْتُونَ بـالكَلِمَـــــــاتِ

أَيُـطْرِبُكُمْ مِـنْ جَـانِبِ الغَرْبِ نَاعِبٌ ** يُـنَادِي بـوَأْدِي فـي رَبـيعِ حَـيَاتي

وَلَـوْ تَـزْجُرُونَ الـطَّيْرَ يَوْمَاً عَلِمْتُمُ ** بـمَا تَـحْتَهُ مِـنْ عَـثْرَةٍ وَشَـتَـــــاتِ

سَـقَى اللهُ فـي بَطْنِ الجَزِيرَةِ أَعْظُمَاً ** يَـعِـزُّ عَـلَـيْهَا أَنْ تَـلِينَ قَـنَاتـــــي

حَـــــــفِظْنَ وَدَادِي فـي الـبلَى وَحَفِظْتُهُ ** لَـهُـنَّ بـقَـلْبٍ دَائِــمِ الـحَسَرَاتِ

وَفَاخَرْتُ أَهْلَ الغَرْبِ، وَالشَّرْقُ مُطْرِقٌ ** حَـيَـاءً بـتلكَ الأَعْـظُمِ الـنَّخِرَاتِ

أَرَى كُــلَّ يَـوْمٍ بـالجَرَائِدِ مَـزْلَقَاً ** مِــنَ الـقَبْرِ يُـدْنيني بـغَيْرِ أَنَــــــــــاةِ

وَأَسْـمَـــــعُ لـلكُتّابِ فـي مِصْرَ ضَجَّةً ** فَـأَعْـلَمُ أنَّ الـصَّـائِحِينَ نُـعَـاتـــــي

أَيَـهْجُرُني قَـوْمي عَـفَا اللهُ عَـنْهُمُ ** إِلَــى لُـغَـةٍ لـم تَـتَّصِلْ بـــــــــــرُوَاةِ

سَـرَتْ لُوثَةُ الإفْرَنْجِ فِيهَا كَمَا سَرَى** لُـعَابُ الأَفَـاعِي فـي مَـسِيلِ فُرَاتِ

فَـجَاءَتْ كَـثَوْبٍ ضَـمَّ سَبْعِينَ رُقْعَةً ** مُـشَـكَّـلَةَ الأَلْــوَانِ مُـخْـتَلِفَـــــــاتِ

إِلَـى مَـعْشَرِ الـكُتّابِ وَالجَمْعُ حَافِلٌ ** بَـسَطْتُ رَجَـائي بَـعْدَ بَسْطِ شَكَاتي

فـإمَّا حَـيَاةٌ تَـبْعَثُ المَيْتَ في البلَى ** وَتُـنْبتُ فـي تِـلْكَ الـرُّمُوسِ رُفَاتي

وَإِمَّــا مَـمَـاتٌ لا قِـيَامَة بَـعْدَهُ ** مَـمَاتٌ لَـعَمْرِي لَـمْ يُـقَسْ بمَمَاتِ


Sans une langue officielle, unificatrice et de dialogue, il n y a pas d’Etat. Sans le respect et l’enseignement de toutes les langues du pays, il n y a pas de nation.

Pr ELY Mustapha

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Poésie de la douleur.