samedi 5 novembre 2016

Lettre à monsieur l’ambassadeur de France en Mauritanie. Quelle déclaration inamicale ?

Monsieur l’ambassadeur, excellence,
Comment osez-vous mettre en garde vos concitoyens français à propos du danger de circuler dans certains quartiers de Nouakchott ? Comment avez-vous pu oser engendrer la colère de notre gouvernement à propos d’un danger qui est loin de la dimension à laquelle vous pensez ?
Depuis l’arrivée des militaires au pouvoir et particulièrement d’Ould Abdelaziz, jamais une quiétude si grande n’a régné sur les habitants de Nouakchott et ses beaux quartiers. Les agressions physiques, les suicides quotidiens, les viols et autres criminalités que l’on retrouve dans les quartiers de Paris, en France, nous ne les connaissons pas. Notre police au garde-à-vous à tous les coins de la capitale est l’une de plus efficace et des mieux tenues (au sens propre et figuré) du monde. Elle protège le citoyen, la veuve et l’orphelin ; et tous vos concitoyens français qui circulent dans les quartiers sécurisés de Nouakchott, le savent quand ils abordent nos policiers et nos gendarmes souriants, affables et surarmés pour les protéger, contre un danger fictif que vous, excellence, vous vous appliquez à faire exister à travers vos mises en garde diplomatiques et consulaires.

Monsieur l’ambassadeur, excellence,



Depuis son arrivée au pouvoir,  Ould Abdelaziz est un homme de Dialogue, et même ceux qui sont potentiellement criminels, ont renoncé à exercer leurs talents par respect et devant tant de sollicitude et d’écoute de celui qui a fait ses preuves en renversant un Président élu, commis deux coups d’Etat et  fait mordre la poussière à toute une opposition farinée.
Alors, comment voulez-vous qu’il y ait de la criminalité dans les quartiers de Nouakchott, puisque tous les ménages sont dans l’abondance, les marchés débordent de victuailles et les mendiants n’existent que parce qu’ils cherchent à s’enrichir d’avantage.

Monsieur l’ambassadeur, excellence,
Quelle que soit votre réponse, à l’attitude froissée du gouvernement mauritanien exprimée par un porte-parole, attractif des jets de sandales, nous croyons ferme que la mise en garde que vous avez adressée à vos compatriotes est très « inamicale ». Non pas inamicale pour la Mauritanie, loin de là, mais pour vos propres compatriotes que vous privez de venir circuler dans nos beaux quartiers, pavés aux grés, fleuris et odorants qui ne doivent rien à la Cité Florale du XIIIe arrondissement (comme vous le savez, entre la Place de Rungis et le Parc Montsouris.)
C’est pourquoi vos compatriotes devraient faire une pétition pour le rétablissement de leurs droits inaliénables à visiter les quartiers de Nouakchott, leurs droits culturels et touristiques en sont gravement lésés.

Monsieur l’ambassadeur, excellence,
Jamais nos quartiers n’ont été aussi salubres que durant les mandats du « président des « pauvres » (les pauvres !). La pauvreté est devenue invisible est c’est l’un des acquis de ce régime, puisque les détritus s’amoncelant dans les rues et les avenues, ils cachent les pauvres. Mais ravisez-vous de dire « inamicalement » comme j’ose le dire,  « détritus »,  car en fait dans la politique actuelle du régime les immondices qui couvrent Nouakchott font partie de la stratégie de développement du pays visant à produire à l’échelle nationale un humus fertilisant des rues et des avenues afin de faire refleurir davantage les beaux quartiers de Nouakchott (le grain est dans le sable) . Le citoyen mauritanien l’a d’ailleurs très bien compris, lui qui se débarrasse de tout détritus par toutes les issues possibles (porte, fenêtre, portière de voiture, charrette au galop) ; et si l’un de vos heureux compatriotes, ayant (ô combien !) la chance de circuler à Nouakchott, reçoit une poubelle pleine sur la tête qu’il s’estime heureux, il participe à la dynamique du développement soutenue par l’Aide publique française au développement versée à la Mauritanie.

Monsieur l’ambassadeur, excellence,
Les homicides dont vous entendez parler dans nos quartiers sont pour la plupart… involontaires. Qu’on se le dise !  Car nos voitures n’ont pas de freins (ni à pied ni à main), nos piétons peuplent allégrement le bitume, nos taxis sont à vitesse unique, nos policiers ont depuis longtemps avalé leurs sifflets. Tout est involontaire, nous sommes, monsieur l’ambassadeur, un peuple innocent. Pourquoi donc privez-vous, par une déclaration inamicale, vos concitoyens de flâner dans nos belles de cités de « netteg jembe » l’odorante, de Baghdad, la flottante… ?
Ici, vos compatriotes développeront par des exercices quotidiens, leur odorat, là-bas ils apprendront à surfer dans nos rues sur les lacs d’eau saumâtres de nos blanchisseries à ciel ouvert. Et ils pourront même (ô bonté divine !) faire le saute-mouton sur les cadavres d’ânes au soleil.

Monsieur l’ambassadeur, excellence,
Vous voyez donc que, comme l’a si bien dit le porte-parole d’Ould Abdelaziz, vous avez pris un acte contraire à l’amitié qui doit lier nos deux pays. En ne pas laissant vos concitoyens se faire arnaquer, ni agresser, ni voler dans certains de nos quartiers, vous faîtes preuve d’un manque de solidarité avec la politique de développement de nos villes et cela ce n’est pas… diplomatique. Comment le policier véreux va mettre du beurre sur ses épinards (qui d’ailleurs sont inconnus en Mauritanie), comment le pauvre criminel lâché dans la nature par un régime incompétent, payera-t-il son loyer sinon en trucidant son bailleur et là, vous incitez vous-même au développement de la criminalité. Car sans vos compatriotes dans certains de nos quartiers quel avenir économique local sans euros subtilisés ?

Monsieur l’ambassadeur, excellence,
Une lettre explicative, d’excuses voilées et jetant quelques fleurs au régime putschiste d’Aziz (Dialogue salutaire etc. etc.) ne suffit pas, il faut que vous vous rachetiez, non pas auprès de la Mauritanie, mais auprès de vos compatriotes en publiant sur le site de l’ambassade de France à Nouakchott l’avis suivant :
« Tous nos compatriotes visitant la Mauritanie et particulièrement Nouakchott et certains de ses quartiers sont vivement encouragés à continuer leur visite.
Cependant les précautions suivantes sont à prendre avant de voyager dans ce beau pays :
  • Prendre des cours de twist pour savoir éviter les jets de seaux d’eau sale aux coins des rues ;
  • Emprunter une côte de maille (de préférence au musée national des armures médiévales) pour flâner l’esprit tranquille dans certains quartiers ;
  • Se faire tatouer tout le contenu de son passeport directement sur la peau pour faciliter à l’ambassade le rapatriement en cas de gentille subtilisation des documents personnels ;
  • De se munir d’un panneau de STOP pour traverser les rues et si impossible à trouver, prendre des cours de saut de kangourou (s’exercer à sauter le plus haut possible. Les camions font aussi le taxi) ;
  • Prendre des cours de zoologie animale pour pouvoir parler aux taximen et aux conducteurs de charrette (l’âne en est souvent le maître) ;
  • Ne pas utiliser son téléphone portable en cas d’urgence. Un portable exposé expose à une autre urgence.
  • Développer ses facultés olfactives, pour se guider dans les quartiers (l’air devient moins odorant à la périphérie et plus acre au centre).
  • Apprendre à être patient pour retirer de l’argent. S’exercer à utiliser sa carte de crédit dans une bouche à incendie, les distributeurs locaux (DAB) réagissent moins vite.
  • Ne prendre le taxi qu’en cas de catastrophe (exemple si Sarkozy revient au pouvoir) et vérifier la direction qu’il prend. Les taximen appliquent les théorèmes de Thales pour saler la facture. Autant dire qu’ils n’empruntent la ligne droite que pour les autochtones.
  • Enfin, dans tous les cas si quelqu’un parle de la déclaration inamicale de « votre ambassadeur » sur certains quartiers de Nouakchott et que vous êtes dans l’un deux, dîtes : « combien ? »
Ceci dit, l’Ambassade rassure tous les compatriotes sur la bonne situation de sécurité qui règne à Nouakchott et elle reste à l’écoute de tous les compatriotes visitant les quartiers visés, si, bien-sûr, ils en reviennent. »

Monsieur l’ambassadeur, excellence,
En publiant cet avis, l’ambassade de France en Mauritanie aura couvert la déclaration inamicale qu’elle a faite aux français visitant Nouakchott puisque, de toute façon, elle n’avait pas à adresser des excuses au gouvernement Mauritanien, dont, soit dit en passant, les membres ne vivent pas dans lesdits quartiers.
Quant au peuple Mauritanien et aux habitants desdits quartiers, ils savent que la criminalité de quartier fait moins de victimes que celle qui s’exerce au (et depuis) le sommet de l’Etat.
Recevez, excellence, l’expression de ma considération la plus offusquée par votre déclaration inamicale à l’égard de vos concitoyens français, contribuables, pourvoyeurs de l’aide publique française au développement que nous recevons (dans les poches de nos dirigeants).

Pr ELY Mustapha

Crédits images et graphiques : Ibrahima Sy, Mouhamadou Koita, Doulo Traoré, Moussa Keita, Baidy Lo, Marcel Tanner et Guéladio Cissé « Vulnérabilité sanitaire et environnementale dans les quartiers défavorisés de Nouakchott (Mauritanie) : analyse des conditions d’émergence et de développement de maladies en milieu urbain sahélien ». Vertigo – La revue électronique en sciences e l’environnement - Volume 11 Numéro 2 | septembre 2011. (https://vertigo.revues.org/11174)

jeudi 3 novembre 2016

Lettre à ceux qui veulent succéder à Aziz: sans poches pleines pas de place au pouvoir.


Tous ceux qui arrivent au pouvoir en Mauritanie, et qui veulent y rester s’empressent de s’enrichir. Ce sont des voleurs mais des voleurs avertis. Ils savent que nul ne peut accéder au pouvoir ni y rester sans avoir les poches pleines. De ce point vu, ceux qui dirigent, à coups d’Etat, la Mauritanie depuis 1978, ont tout compris : pour rester au pouvoir il faut en avoir les moyens. Et il faut tant qu’on est au pouvoir, les accumuler.

Ils ont compris que l’électeur mauritanien est par essence un électeur du ventre. Et que l’intelligentsia mauritanienne n’est point insensible au froissement des billets et aux avantages en nature.
Si le régime d’Aziz, comme les précédents qu’il a servis, se caractérise par des détournements de biens publics tous azimuts et par des responsables à tous les niveaux, qui, en toute impunité courent les rues et partagent leurs pécules avec qui de droit, c’est parce que la seule voie d’accès au pouvoir en Mauritanie (et d’y rester) c’est d’être riche.

Riche pour se payer les notables, les tribus, les intellectuels véreux, les gradés de l’armée et de la police, les fonctionnaires, les commissionnaires des marchés publics, les attentistes, les opportunistes de salon, les expectants aux nominations, les prêts-à-se dévoyer, les me-voici-malléables- corvéables- à-merci.

 Le pouvoir engrange, à travers les multiples canaux de l’autorité dont il dispose, sur les finances et les ressources du pays, les moyens matériels et monétaires de sa pérennité.

Machiavélique, il sait que tout un peuple appauvri tendant la main, ne suivra que celui qui pourra y déposer une obole, de quoi subsister. Appauvrir un peuple jusqu’à demander l’aumône, pour mieux acheter sa liberté au prix dérisoire.

Ne nous méprenons pas sur ces procès-bidons de personnalités, aux quatre coins du pays, qui détournent les biens publics. Ce n’est qu’une mascarade ; car ceux qui détournent les milliards savent qu’ils seront impunis car ils connaissent avec qui les partager.

Alors ne nous méprenons pas si le pouvoir en place - fort des ressources du Trésor public et des revenus confisqués de la Nation- mette en marche sa machines de zombies fonctionnant aux rétributions et autres nominations.

 Un porte-parole-zombie qui parle comme du papier à musique, des ministres-zombies qui vendent leur âme pour un mandat indu et qui jouent un jeu faustien si macabre que le Diable lui-même n’en voudrait plus.

Autant dire que les régimes successifs en Mauritanie ont compris face à la misère morale et matérielle, tout s’achète. Alors ils abrutissent le peuple, en achetant l’obscurantisme et en vendant écoles, en promouvant le mercantilisme morbide et en détruisant les valeurs sociales.

Ils jettent des générations dans l’indigence intellectuelle et matérielle pour les trainer ensuite par le cordon de leur bourse.

Alors tous ceux qui veulent accéder au pouvoir doivent savoir que la seule voie de salut est de jouer dans la Cour des riches potentats qui actuellement squattent le pouvoir ; et pour cela, il faut en avoir les moyens financiers et matériels.

Le peuple avilit ne répond plus aux idéaux, mais à l’appel du ventre. Que ceux qui comptent  sur les distinctions internationales pour faire comprendre au peuple leur juste cause, que ceux qui pensent qu’être constitué en parti leur ouvre la voie du pouvoir,  que ceux qui ont de nobles idéaux à faire valoir pour briguer le pouvoir doivent savoir que personne n’en a plus cure.

Ce qu’il faut pour lutter pied-à-pied avec le pouvoir aux prochaines élections, c’est la capacité de mettre en œuvre des moyens financier similaires sinon plus importants.

Acheter les tribus, les notables, les religieux, les fonctionnaires, le patron et la ménagère, l’officier supérieur et le BASEP.

Aucun chef de tribu ne résisterait aujourd’hui à la remise d’un « troupeau » de tout-terrains flambant neufs et de ressources pour creuser une dizaine de puits. Aucun notable phagocytant des postes indus ne refusera de monnayer ses prérogatives contre le sonnant et le trébuchant au bénéfice de sa personne. Quant à l’intelligentsia mauritanienne, elle comprend comme on le sait une frange prête à sauter dans le premier chaudron monétaire qu’on lui présenterait.

Alors les marches de l’opposition clamant sous le soleil des idéaux et des valeurs galvanisent ceux qui y sont sensibles mais ils le suivent jusqu’à ce qu’ils trouvent le « juste prix » de leur renonciation à les défendre. En Mauritanien ; à travers les régimes militaires corrompus qui ont corrompu toute une société, les valeurs sociales sont devenue monétaires et l’idéal s’est transformé en refuge auprès de celui qui pourrait assurer la pitance et le couvert.

Alors, au lieu de penser à marcher à tout vent clamant des idéaux, l’opposition doit regarder vers trésorerie et l’évaluer ; car la vraie bataille électoral en Mauritanie, n’est ni idéologique, ni idéelle, ni même de principes c’est un bataille de la Bourse et des nantis.

Ceux qui croient que le militantisme en savates et guenilles, même organisé en partis et le militantisme à la rhétorique enflammée pour galvaniser les foules, permettront d’accéder au pouvoir, sont des perdants d’avance.  

La formule pour accéder au pouvoir en Mauritanie est la suivante : Combien de millions (de milliards) d’ouguiyas (X) je dispose pour « m’allier » un nombre suffisant d’électeurs (Y) me permettant d’accéder au pouvoir par les urnes (Z). Tout l’art de la politique du ventre ici est d’optimiser le rapport entre Y (notables influents) et X (le budget comparé au budget concurrent) pour remplir les urnes (Z).

Cette formule est basée sur les postulats suivants :
  • -          Aller aux élections sans argent est un ridicule ….électoral
  • -          Les notables et autres espèces argentées ne sont sensibles qu’à la monnaie fiduciaire.
  • -          L’idéal social, patriotique, national etc. équivaut, dans cette formule, à zéro (il annule la multiplication des efforts et neutralise leur addition)
  • -          Les militaires qui appuient le détenteur du pouvoir (actuel et futur) conçoivent leurs privilèges comme des barbelés : qui s’y frotte s’y pique. Seul des privilèges plus « privilégiant » les feront ramper sous les barbelés (exercice militaire fréquent depuis les coups d’Etat).

En définitive, si aucun parti politique mauritanien n’a les moyens de faire une campagne électorale d’abondance (et de bombance) comme le feront les potentats du pouvoir qui ont pillé l’Etat depuis 1978, et plus récemment encore, qu’il aille se convertir dans les œuvres charitables.
Si le vote du Mauritanien était un vote basé sur un militantisme idéologique ou sur une conviction d’un idéal que pourrait représenter n’importe quel citoyen à ses yeux, croyez-vous que des militaires putschistes successifs auraient été plébiscités durant des dizaines d’années par des votes « populaires » ?

Allons donc !  Pour gagner les élections en Mauritanie, il faut soit avoir les poches pleines…soit avoir la force de son côté. Un trésor (public) …ou un Bataillon (de préférence ASEP).
Une opposition pauvre, ne représente qu’une chose aux yeux du peuple : elle lui renvoie l’image de sa propre misère….et il est vrai qu’elle y est (par ses compromissions, sa faiblesse et ses divisions) pour quelque chose.

Alors en matière électorale pour les électeurs du ventre la sagesse populaire (celle qui arrange) est plus que de mise : un tien vaut mieux que deux tu l’auras.
Aller aux élections les poches pleines vaut mieux que d’y aller les musettes pleines de principes ; les secondes ne peuvent payer ce que les premières peuvent acheter….dans un pays où les valeurs sociales sont fiduciaires.

Pr ELY Mustapha

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Poésie de la douleur.