Le terrorisme pour justifier la violence
Nous avions, six jours avant le coup d'Etat mis en garde contre un phénomène qui allait saper les fondements de l’Etat mauritanien, à savoir la désobéissance généralisée (Voir l’article : « la saga de la désobéissance ») . Cette désobéissance qui à tous les échelons de l’Etat (de la fronde au parlement, à celle des corps de sécurité présidentielle) allait mener à l'affaiblissement de l'Etat, à ce dont nous souffrons aujourd’hui : la violence à l’intérieur du pays et à ses frontières. Le coup d’Etat et les actes de terrorisme profitent de la faiblesse de leurs objectifs, se partagent un même moyen: la violence et visent un même objectif : l’accaparation du pouvoir. Et tous les deux sont des terrorismes institutionnels prenant naissance dans une institution républicaine, telle l’armée, ou dans des institutions extrémistes, telle El Qaida.
Aujourd’hui, ce que l’on remarque, à travers la tragédie de Tourine, c’est qu’une certaine violence se propage aux frontières, répondant à une autre violence putschiste qui a décapité l’Etat mauritanien.
L’acte accompli sur les corps des victimes de Tourine par les terroristes ou leurs commanditaires, n’est-il pas la reproduction exacte de ce qui s’est produit au sommet de l’Etat mauritanien ? Un ignoble message que les terroristes ont voulu faire passer en transfigurant nos morts.
Face à cette tragédie, tout ce que trouvent les officiels mauritaniens pour la parer se résume en une propagande, médiatisée à travers le ministre de la communication de la junte au pouvoir : « les terroristes nous attaquent parce que nous sommes proches de l’occident » ! Et ce ministre s’ingénie de façon extrêmement morbide à décrire avec détails la façon avec laquelle nos soldats ont été décapités.
Une telle attitude est d’autant plus répréhensible qu’elle fait fi de la morale, de l’éthique qui doit accompagner un hommage rendu aux morts et du respect dû aux familles des victimes et de leur douleur.
A quoi veulent donc arriver les officiels mauritaniens en voulant tant médiatiser l’atrocité du massacre de nos soldats ?
Certainement engendrer la compassion du monde occidental pour l’acte putschiste et justifier son existence. Certainement pour le verser au dossier de la levée des sanctions que la communauté internationale a engagé contre la Mauritanie et défendu par les émissaires de la junte. Certainement pour ne pas plaider coupable de ce qui arrive aux institutions politiques actuelles qu’ils ont pris en otage et réduit au silence.
Mais il est certain que de telles déclarations ne feront pas oublier que tout cela ne serait pas arrivé si la violence illégitime et illégale n’avait pas été donnée en exemple au sommet de l’Etat.
De telles déclarations ne font que mettre la violence au quotidien du citoyen et réveiller chez lui le sentiment d’insécurité qui est propice à toutes les perturbations de sa vie, en particulier et à l’instabilité sociale, en général.
De tels actes se gèrent avec le tact et la discrétion qui doivent être la qualité des hommes politiques responsables. Et quelle que soit sa violence, l’acte terroriste se doit d’être traité en mettant en œuvre les moyens matériels et humains pour le contrer. En somme agir avec une stratégie qui prendrait en considération, non seulement la gravité de la situation, mais qui préserverait les populations d’une psychose généralisée qui ne servirait ni le pays ni ses intérêts sociaux et économiques.
Ceci ne fera que mettre davantage le pays au ban de la société internationale comme un pestiféré.
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Voilà l’image que le monde entier a actuellement de la Mauritanie : pays sous-développé, géré par la violence , sombrant dans la violence…Mis au ban de la communauté internationale et soumis aux pires sanctions internationales
Un pays commandé par une junte putschiste, qui a pris en otage ses institutions républicaines, dont les populations sont dans une psychose de violence permanente, menacé par des terroristes sans vergogne à l’intérieur et à l’extérieur de ses frontières, dont les soldats se font massacrer sans moyens et sans défense et dont la société civile est divisée quant à son avenir . Un pays ou les medias nationaux sont soumis à la propagande officielle, dont les forces de police et de sécurité sont corrompues et dont les populations vivent la misère quotidienne…
Et lorsque des putschistes arrivés par la violence font la propagande de la violence en se servant d’une tragédie d’une violence extrême pour justifier leur sort , la question se pose de l’inconscience d’un tel geste.
Ce qui aurait dû être fait à la suite de cette tragédie, c’est :
- de ne pas enfoncer le pays davantage en dénaturant son image face au monde, en prenant en main à travers une stratégie concertée avec les forces armées et de sécurité la meilleure façon, compte tenu des moyens disponibles, pour contrer le phénomène terroriste.
- Entretenir à travers les médias le calme au sein des populations, en évitant l’aggravation médiatisée de la tragédie et en rassurant sur le devenir du pays.
- Demander le soutien logistique de la communauté internationale, mais ne pas aggraver la situation intérieure face aux médias internationaux car cela hypothéquerait toute l’économie mauritanienne dépendant de l’investissement étranger et des secteurs entiers de l’économie nationale en seraient gravement affectés.
Mais au vu des déclarations des officiels tout ceci n’est pas une priorité. Ce qui est une priorité c’est une junte qui emploie tous les moyens pour assurer son maintien à la tête de l’Etat. Que le peuple soit mis en état de psychose violente, que l’économie soit affectée durablement , que le monde entier ne perçoive plus la Mauritanie que comme un pays sous haute alerte terroriste, cela ne gène pas la junte. Sa reconnaissance, et celle des intérêts de ceux qui la soutiennent, est bien plus importante que les intérêts de la nation.
Aussi, quand on s’impose par la violence et qu’on emploie les actes de violence pour justifier son geste, alors on ne récoltera que ce que l’on aura semé.
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Une stratégie tragique pour justifier une tragique stratégie.
Pr ELY Mustapha
Salut PRof!
RépondreSupprimerNos amis militaires sont des abrutis certes, mais pas aussi fin manipulateurs, car tout ce qu'a fait Aziz depuis la transition de 2005, était cousu de fil blanc. Il est difficiel de croire qu'ils aient égorgé leurs copains pour se faire valoir aux yeux de l'occident.
il faut être anxieux pour croire que nos militaires peuvent penser à pareille chose.
RépondreSupprimermassacrer ses propres soldats pour une stratégie quelconque.
Cher prof,
cette zone est dangereuse dépuis quelques années, c'est un no man's land de bandits et tout est permis elle est infestée par toutes les bandes du sahel drogue contrebande et voleurs de poules.
la solution est de la déclarer zone militaire ou zone de guerre est de tirer sur tout ce qui bouge.
FILSDUBLED
Prof, un peu d'humilité, n'a jamais fait de mal à personne!!! Surtout pas à ceux qui en ont besoin!!!
RépondreSupprimerAttaque de Tourine : Responsabilité du Commandement à tous les échelons
RépondreSupprimerlundi 22 septembre 2008
Les corps des militaires disparus à Tourine et de celui de leur guide viennent d’être retrouvés, mutilés de façon barbare. Cette mutilation est la signature d’Al Qaïda au Maghreb. Cette organisation a d’ailleurs revendiqué l’attaque.
Selon le ministère de la Défense Nationale, « nos braves soldats » ont, « par leur sacrifice », protégé leur pays « contre une opération terroriste de grande envergure ». Une source sécuritaire dont les propos sont rapportés par l’Agence de Presse Africaine (APA) a opportunément suggéré que « probablement les installations industrielles de la SNIM » seraient celles qui étaient visées.
Le ministère de la Défense, en glorifiant l’action des militaires disparus et en les élevant au rang de « héros », leur attribue des exploits qu’ils n’auraient probablement pas revendiqués eux-mêmes s’ils étaient restés vivants. En faisant cela, son but est clair : tenter de provoquer une union sacrée autour du HCE contre le danger du terrorisme dans un moment si difficile pour lui, attirer la sympathie de la communauté internationale
– les déclarations du Colonel Bamby Ould Baye, permanent du HCE, vont dans ce sens - et surtout détourner l’opinion nationale des vrais responsables de ce qui nous arrivent.
Nos « vaillants » soldats ont été retrouvés décapités. Ce qui laisse supposer qu’ils n’ont engagé aucun combat avec l’ennemi avant d’être fait prisonniers ! Ce qui laisse supposer aussi qu’ils ne se déplaçaient pas avec le minimum de mesures de sécurité requis. Ce qui laisse supposer toujours qu’ils n’ont pas (ou pas pu) manœuvré(r) dans les règles de l’art : un peloton est un tout indivisible et une patrouille (2 véhicules) n’a pas vocation à remplir des missions seules, sans un soutien du reste du peloton. Ce qui laisse supposer enfin que les éléments du peloton n’étaient pas tous ensemble au moment de l’incident.
Dans tous les cas, tout indique que nos soldats ne sont pas préparés pour la mission qui leur est confiée. Et cette impréparation est imputable exclusivement au commandement à tous les échelons.
Nous sommes pourtant supposés être en guerre ouverte contre le terrorisme depuis au moins 2005 (attaque de Lemghaïty). Tourine est la troisième attaque dans la même zone et le scénario est presque le même. Les agresseurs aussi.
La zone de l’incident est stratégique à plus d’un titre : frontalière de pays où sévissent depuis des années des rébellions (algérienne et malienne) sans compter le conflit du Sahara qui couve encore sous les cendres ; lieu d’intenses trafics (de cigarettes, d’armes et de drogue) ; et depuis quelques temps, objet d’une prospection pétrolière que l’on dit prometteuse.
Il faut vraiment que le commandement de notre armée soit obtus pour ne pas avoir réfléchi à la situation sécuritaire du pays et cherché à trouver les solutions idoines.
Un quadrillage de cette zone par la multiplication des patrouilles et des points d’appui, un effort particulier pour la reconnaissance aérienne et une rotation de troupes fréquentes pour ne pas éprouver les soldats (leur matériel aussi) et éviter que s’installe parmi eux la routine : rien qui ne soit du domaine du possible pour un commandement qui gère une armée de 10 000 hommes et 17 347 800 000 UM (budget 2008 de l’armée nationale) et qui peut recevoir le cas échéant l’appui d’escadrons de la Gendarmerie et de la Garde.
Mais il est vrai que notre sécurité a tendance à devenir, de plus en plus, le cadet des soucis de notre commandement malgré tout ce qu’il affiche de volonté à combattre nos ennemis.
Ahmed Jiddou ALY
Al Mourabit (Mauritanie)
Tu es un Prof , brave et courageux
RépondreSupprimerdon't stop we need you
copiarpegar