vendredi 12 août 2016

Mauritanie : la diplomatie clé-à-molette.





Qu’advient-il lorsque la diplomatie d’un pays est ordonnée par un mécanicien auto et exécutée par un professeur de math ? Un moteur dont la  combustion interne est une inconnue. Et à la vitesse où il tourne,  c’est un moteur à explosion qui va…exploser.  

Appelons-là, mécaniquement, une diplomatie clef-à-molette et, mathématiquement, une conjecture insoluble…sauf dans l’intérêt personnel. 

C’est, en effet,  une diplomatie de l’exclusion et  non une diplomatie de la conciliation avec l’ensemble des Etats de la sous-région avec pour seul mot d’ordre l’intérêt premier du pays.
Depuis qu’Ould Abdelaziz est arrivé au pouvoir,  l’appareil diplomatique mauritanien est vissé, comme un écrou, à la plaque tournante des intérêts de la nomenklatura d’Etat.  .

 Il sert tout entier à s’acquérir les faveurs des potentats du golfe. Une diplomatie de la négociation utilitariste permanente. Ici on cède les terres arables du sud aux émirs du golfe, là on envoie des troupes mauritaniennes au Yémen pour les beaux yeux de qui on sait et on organise un sommet sous sa bénédiction. Le but ultime : obtenir  les dons et autres faveurs financières qui sont englouties  par la nomenklatura d’Etat. On cire,  diplomatiquement,  les pompes des princes  pour organiser un sommet arabe qui fut,  de l’avis de tous,  un fiasco national et international et dont le pays paiera longtemps les pots cassés. 

La diplomatie mauritanienne est extravertie. Une diplomatie qui se met à dos les plus proches voisins de la Nation, notamment le Sénégal et le Maroc pour aller plaire aux monarques du Golfe,  est une diplomatie de la différenciation irréfléchie qui ne mène que vers le désastre.

 L’avenir de la Mauritanie se construit avec ses voisins (arabes et africains)  immédiats. Le Maroc et  l’Algérie se doivent d’être traités diplomatiquement dans les mêmes termes. L’affaire du Sahara occidental se doit d’être traitée dans le cadre des conventions internationales, en prenant en compte les intérêts de toutes les parties prenantes  sans que ces intérêts puissent prévaloir sur les intérêts de la Nation. Or la diplomatie mauritanienne est un instrument qui sert moins le compromis positif et la résolution pacifique des différends que les intérêts mécaniques du détenteur du pouvoir en Mauritanie.

 C’est une diplomatie de l’alignement manifeste sur des positions tranchées ;  or « l’alignement », les  « positions » et les « tranchées » relèvent du langage militaire non de celui de la diplomatie. Cette confusion manifeste est porteuse de tensions dont les effets avant-coureurs sur l’environnement géopolitique de la Mauritanie,  se font déjà gravement sentir.

 Ainsi,  la diplomatie telle que voulue par Ould Abdelaziz et mise en œuvre par son ministre des affaires étrangères, ne peut être que biscornue. A quels résultats a-t-elle abouti ? Pas grand-chose, des dons de véhicules à l’occasion d’un sommet dévastateur, déjà oublié que des responsables trafiquent déjà en toute impunité. 

Quelle image de la Mauritanie,  notre diplomatie donne-t-elle  au reste du monde ? Des voisins sous tension,  des prises de position belliqueuses, une diplomatie tout orientée vers la collecte des « dons » et autres financements, donnant l’image d’une immense gamelle tendue.

 Elle a personnifié, au nom de son donneur d’ordre,  le principe d’action diplomatique : « un pays n’a pas d’amis, il n’a que des intérêts ». Principe  qu’un fameux général avait énoncé pour montrer l’importance de son pays par rapport au reste du monde. Mais il est vrai que les généraux se suivent et ne se ressemblent pas. De Gaulle ne faisait pas la diplomatie avec une clef à molette.

Pr ELY Mustapha

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