Officiellement,
c’est sur une visite inopinée, que le pot aux roses aurait été découvert. Plus
de 2 millions en euros et dollars,
détournés. Un trafic de liasses de billets, de faux billets et un jeu sur les
liasses fiduciaires.
Ce
seraient des saltimbanques jonglant avec les fonds en devises qui ont enfoncé
la BCM dans un trou..de Bâle. Les principes de Bâle, semblent être un pis-aller
quand il y a une infraction caractérisée
à des règles prudentielles élémentaires à savoir le contrôle comptable
permanent. Cette malversation se serait
même déroulée sur plusieurs années et c’est maintenant que l’on découvre
qu’elle a toujours existé.
Une
simple banque intermédiaire ne peut se permettre de ne pas exercer le contrôle
comptable permanent sur les fonds
qu’elle détient et au jour le jour sur
les opérations comptables qui y portent, que dire alors de la Banque
centrale ?
Les autorités
de la Banque centrale ignorent-elles les méthodes de contrôle comptablee
permanent ? Les exigences prudentielles et les celles en matière
d'information ?
Certes
non. Mais que s’est-il passé alors ?
Ce
qui se serait passé ne saurait s’expliquer que par l’un des facteurs destructeurs de toute gestion publique ou
privée : l’incompétence, la négligence ou la complicité.
Relativement
au premier facteur, l’incompétence. Il est certain que la BCM possède des
cadres qualifiés, formés dans de grandes universités et écoles et qui au sein
de la BCM ont acquis un savoir-faire appréciable.
S’il
y a, cependant, un élément absorbant de la compétence, c’est bien la
négligence. La négligence c’est le zéro dans la multiplication des compétences.
Et
il ne fait pas de doute que cette affaire porte les stigmates de la négligence.
Et lorsque la négligence, qui n’emporte que la responsabilité professionnelle,
se double de la complicité ou est mise à son service, il s’agira alors d’une
responsabilité pénale qui par son ampleur, pourra être qualifiée de crime
organisé.
Tout
en accordant le bénéfice du doute à tous ceux impliqués dans cette affaire, et
tout en respectant la présomption d’innocence, il reste que l’élément
générateur de l’acte criminel transparait bien dans la commission de cet acte.
La question est désormais de savoir qui est
responsable ?
La caissière, perceptrice de liasses monétaires
et véhicule de leur transposition dans les coffres de la BCM ?
Le
responsable du service, directeur ou chef de service dans la supervision des
caisses et des remises de fonds et valeur ?
Le
service d’audit interne dans l’accomplissement de sa mission à savoir fournir
« une évaluation indépendante de la qualité et de l'efficacité du
contrôle interne, de la gestion des risques et plus généralement de la
gouvernance de la Banque Centrale ; formuler des recommandations d'actions en vue
de mieux prévenir et maîtriser l'ensemble des risques de la Banque Centrale. »
(art 40 des statuts de la BCM) ?
Le
comité d’audit en charge de l'Audit interne et de ses activités, responsable du
suivi de l'efficacité des systèmes de contrôle interne ?
Le
Censeur de la BCM qui doit exercer une surveillance générale sur tous les
services et sur toutes les opérations de la Banque Centrale. Et contrôler les caisses, les registres et
les portefeuilles de la Banque Centrale ?
Une
pléthore d’agents qui peuple le
processus de contrôle et de vérification qui maille le fonctionnement de la BCM,
et pourtant le contrôle sur place et sur
pièce des avoirs en devises de la BCM au niveau de sa caisse centrale, lui
échappe.
Si
ce qui vient d’arriver signifie quelque chose, c’est qu’il emporte la
conviction de tout professionnel qu’il y a un manquement réel aux règles
prudentielles en matière de contrôle comptable permanent. Et que parmi les agents
précités le censeur de la BCM et l’auditeur interne sont en première ligne. Dans
le respect des recommandation de Bâle, la BCM ne semble
pas être la meilleure élève.
Toutefois,
s’il ne fait pas de doute que de cet acte nait une responsabilité professionnelle et/ou pénale, il demeure certain
que c’est une responsabilité en chaine
dont le fait générateur n’est pas récent à la BCM mais a pris naissance il y a depuis
plusieurs années et a bénéficié de la loi
du silence.
La
gestion de fonds et valeurs a donc fait l’objet d’une manipulation de
saltimbanques, de jongleurs qui ont utilisé leur dextérité pour aménager de
véritables trous de… Bâle dans les règles prudentielles devant régir les opérations de Banque.
Nous
avions déjà consacré des écrits à l’audit de la Banque centrale, et notamment
son audit externe où l’on a montré qu’il était déjà critiquable tant du
point de vue des informations comptables
et financières qu’il présentait que de son appréciation de la gestion de la BCM (Voir : http://cridem.org/C_Info.php?article=721091)
L’affaire
qui vient de se produire, n’est qu’une conséquence des défaillances des
différents audits et de la négligence de
responsables chargés de veiller à leur intégrité.
En
tout état de cause, la caissière n’est qu’une exécutante d’un ensemble de
pratiques dont elle n’est qu’un simple rouage. Il faudrait remonter bien plus
haut dans la hiérarchie et dans le temps pour situer l’ampleur de cet acte
criminel et en identifier les responsables.
Hélas !
Ce qui est certain, c’est que l’approche sociologique des institutions de
souveraineté dans notre pays, montre que face à de tels scandales, la
solidarité des délinquants contrebalance souvent la justice à travers une connivence
du pouvoir qui favorise la dilution des responsabilités. Nous avions déjà montré
récemment, que l’audit des institutions de souveraineté était en Mauritanie,
sinon une vue de l’esprit , du moins un pis-aller ( voir http://cridem.org/C_Info.php?article=727005)
En
définitive et face à l’impunité, des
saltimbanques continueront encore à accaparer les ressources de la collectivité nationale, à
se jouer des principes du contrôle comptable et financier, creusant encore
davantage des trous …de Bâle.
Pr ELY Mustapha
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