Tous ceux qui arrivent au pouvoir en Mauritanie, et qui veulent y rester
s’empressent de s’enrichir. Ce sont des voleurs mais des voleurs avertis. Ils
savent que nul ne peut accéder au pouvoir ni y rester sans avoir les poches
pleines. De ce point vu, ceux qui dirigent, à coups d’Etat, la Mauritanie
depuis 1978, ont tout compris : pour rester au pouvoir il faut en avoir
les moyens. Et il faut tant qu’on est au pouvoir, les accumuler.
Ils ont compris que l’électeur mauritanien est par essence un électeur du
ventre. Et que l’intelligentsia mauritanienne n’est point insensible au
froissement des billets et aux avantages en nature.
Si le régime d’Aziz, comme les précédents qu’il a servis, se caractérise
par des détournements de biens publics tous azimuts et par des responsables à
tous les niveaux, qui, en toute impunité courent les rues et partagent leurs
pécules avec qui de droit, c’est parce que la seule voie d’accès au pouvoir en Mauritanie
(et d’y rester) c’est d’être riche.
Riche pour se payer les notables, les tribus, les intellectuels véreux, les
gradés de l’armée et de la police, les fonctionnaires, les commissionnaires des
marchés publics, les attentistes, les opportunistes de salon, les expectants
aux nominations, les prêts-à-se dévoyer, les me-voici-malléables- corvéables- à-merci.
Le pouvoir engrange, à travers les multiples
canaux de l’autorité dont il dispose, sur les finances et les ressources du
pays, les moyens matériels et monétaires de sa pérennité.
Machiavélique, il sait que tout un peuple appauvri tendant la main, ne
suivra que celui qui pourra y déposer une obole, de quoi subsister. Appauvrir
un peuple jusqu’à demander l’aumône, pour mieux acheter sa liberté au prix
dérisoire.
Ne nous méprenons pas sur ces procès-bidons de personnalités, aux quatre
coins du pays, qui détournent les biens publics. Ce n’est qu’une mascarade ;
car ceux qui détournent les milliards savent qu’ils seront impunis car ils connaissent
avec qui les partager.
Alors ne nous méprenons pas si le pouvoir en place - fort des ressources du
Trésor public et des revenus confisqués de la Nation- mette en marche sa
machines de zombies fonctionnant aux rétributions et autres nominations.
Un porte-parole-zombie qui parle comme
du papier à musique, des ministres-zombies qui vendent leur âme pour un mandat
indu et qui jouent un jeu faustien si macabre que le Diable lui-même n’en
voudrait plus.
Autant dire que les régimes successifs en Mauritanie ont compris face à la
misère morale et matérielle, tout s’achète. Alors ils abrutissent le peuple, en
achetant l’obscurantisme et en vendant écoles, en promouvant le mercantilisme
morbide et en détruisant les valeurs sociales.
Ils jettent des générations dans l’indigence intellectuelle et matérielle
pour les trainer ensuite par le cordon de leur bourse.
Alors tous ceux qui veulent accéder au pouvoir doivent savoir que la seule
voie de salut est de jouer dans la Cour des riches potentats qui actuellement
squattent le pouvoir ; et pour cela, il faut en avoir les moyens
financiers et matériels.
Le peuple avilit ne répond plus aux idéaux, mais à l’appel du ventre. Que
ceux qui comptent sur les distinctions
internationales pour faire comprendre au peuple leur juste cause, que ceux qui
pensent qu’être constitué en parti leur ouvre la voie du pouvoir, que ceux qui ont de nobles idéaux à faire
valoir pour briguer le pouvoir doivent savoir que personne n’en a plus cure.
Ce qu’il faut pour lutter pied-à-pied avec le pouvoir aux prochaines élections,
c’est la capacité de mettre en œuvre des moyens financier similaires sinon plus
importants.
Acheter les tribus, les notables, les religieux, les fonctionnaires, le
patron et la ménagère, l’officier supérieur et le BASEP.
Aucun chef de tribu ne résisterait aujourd’hui à la remise d’un « troupeau »
de tout-terrains flambant neufs et de ressources pour creuser une dizaine de
puits. Aucun notable phagocytant des postes indus ne refusera de monnayer ses prérogatives
contre le sonnant et le trébuchant au bénéfice de sa personne. Quant à l’intelligentsia
mauritanienne, elle comprend comme on le sait une frange prête à sauter dans le
premier chaudron monétaire qu’on lui présenterait.
Alors les marches de l’opposition clamant sous le soleil des idéaux et des
valeurs galvanisent ceux qui y sont sensibles mais ils le suivent jusqu’à ce qu’ils
trouvent le « juste prix » de leur renonciation à les défendre. En
Mauritanien ; à travers les régimes militaires corrompus qui ont corrompu
toute une société, les valeurs sociales sont devenue monétaires et l’idéal s’est
transformé en refuge auprès de celui qui pourrait assurer la pitance et le
couvert.
Alors, au lieu de penser à marcher à tout vent clamant des idéaux, l’opposition
doit regarder vers trésorerie et l’évaluer ; car la vraie bataille
électoral en Mauritanie, n’est ni idéologique, ni idéelle, ni même de principes
c’est un bataille de la Bourse et des nantis.
Ceux qui croient que le militantisme en savates et guenilles, même organisé en
partis et le militantisme à la rhétorique enflammée pour galvaniser les foules,
permettront d’accéder au pouvoir, sont des perdants d’avance.
La formule pour accéder au pouvoir en Mauritanie est la suivante : Combien
de millions (de milliards) d’ouguiyas (X) je dispose pour « m’allier »
un nombre suffisant d’électeurs (Y) me permettant d’accéder au pouvoir par les
urnes (Z). Tout l’art de la politique du ventre ici est d’optimiser le rapport entre
Y (notables influents) et X (le budget comparé au budget concurrent) pour
remplir les urnes (Z).
Cette formule est basée sur les postulats suivants :
- - Aller aux élections sans argent est un ridicule ….électoral
- - Les notables et autres espèces argentées ne sont sensibles qu’à la monnaie fiduciaire.
- - L’idéal social, patriotique, national etc. équivaut, dans cette formule, à zéro (il annule la multiplication des efforts et neutralise leur addition)
- - Les militaires qui appuient le détenteur du pouvoir (actuel et futur) conçoivent leurs privilèges comme des barbelés : qui s’y frotte s’y pique. Seul des privilèges plus « privilégiant » les feront ramper sous les barbelés (exercice militaire fréquent depuis les coups d’Etat).
En définitive, si aucun parti politique
mauritanien n’a les moyens de faire une campagne électorale d’abondance (et de
bombance) comme le feront les potentats du pouvoir qui ont pillé l’Etat depuis
1978, et plus récemment encore, qu’il aille se convertir dans les œuvres charitables.
Si le vote du Mauritanien était un vote basé sur un
militantisme idéologique ou sur une conviction d’un idéal que pourrait
représenter n’importe quel citoyen à ses yeux, croyez-vous que des militaires putschistes
successifs auraient été plébiscités durant des dizaines d’années par des votes « populaires » ?
Allons donc !
Pour gagner les élections en Mauritanie, il faut soit avoir les poches
pleines…soit avoir la force de son côté. Un trésor (public) …ou un Bataillon (de
préférence ASEP).
Une opposition pauvre, ne représente qu’une chose
aux yeux du peuple : elle lui renvoie l’image de sa propre misère….et il
est vrai qu’elle y est (par ses compromissions, sa faiblesse et ses divisions) pour
quelque chose.
Alors en matière électorale pour les électeurs du
ventre la sagesse populaire (celle qui arrange) est plus que de mise : un
tien vaut mieux que deux tu l’auras.
Aller aux élections les poches pleines vaut mieux
que d’y aller les musettes pleines de principes ; les secondes ne peuvent
payer ce que les premières peuvent acheter….dans un pays où les valeurs
sociales sont fiduciaires.
Pr ELY Mustapha
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