mercredi 29 octobre 2008

La junte recto-verso

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Reconnaissance extérieure, intérieure

A défaut de reconnaissance à l’extérieur du pays la junte au grand complet s’est déplacée aux quatre coins du pays pour se faire reconnaître…à l’intérieur. Il est normal, en effet, que quand on n’est pas reconnu dans son propre pays, c’est bien par là qu’il faut commencer.

Plus de deux mois déjà que la junte ne s’est pas encore fait reconnaître, il fallait bien que quelqu’un le fasse. Alors qui pourrait le faire à moindre frais et qui ne viendrait pas de Côte d’ivoire ? Naturellement les quelques populations qui ont grand besoin de quelques subsides et qui diraient n’importe quoi pourvu qu’on puisse s’intéresser à elles.

Des marabouts tranquilles dans leur hameau et qui soutiendraient la junte au nom du fameux principe « obéissez à celui qui vous commande ». Facilité déconcertante dans l’allégeance au premier venu qui détient la force.

Des paysans qui n’en peuvent plus et qui regrettent le blé américain et qui voudraient bien que la junte débloque quelques fonds pour plaire à leurs vaches.

Des populations déshéritées d’adwabas si subjugués par le cortège rutilant qu’ils croiront que c’est la caravane de la providence.

Le verso de la junte au secours de son recto.
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L’envoyé spécial de Haut-et-fort a recueilli des témoignages vivants durant le passage du cortège à l’intérieur du pays.

Le chef de la junte s’adressant à un paysan :

- Bonjour je suis le général Ould Abdel Aziz…
- Qui ?
- C’est moi le chef de l’Etat..
- Mais c’est pas le vieux là de Lemden qui est notre chef ?
- Non maintenant c’est moi…
- Ah, c’est vous le putschiste ?
- Quoi ? Qui vous a dit ça qu’on l’enferme tout de suite !
- Radio France Internationale

Décidément l’extérieur le poursuit toujours à l’intérieur.
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Dans une zone reculée du pays l’un des membres du putsch, s’adressant à la population :

« Mes chers frères et sœurs, le changement du 6 avril 2008 est une « baraka » pour la Mauritanie. Cela nous a permis de nous débarrasser d’un homme qui mettait le pays en danger en voulant limoger les dirigeants de l’armée… »

Tout-à- coup un voix s’élève dans la foule et dit :

- C’est qui ce vilain homme, pour qu’on le lynche tout de suite ! Et sa femme aussi…

Aussitôt une autre voix s’élève du fond de la foule :

« Tais-toi Mohsen ! »

Durant son périple, la junte , a rencontré au fond d’une brousse, un viel homme qui, dît-on, est un sage parmi les sages qui s’est exilé là pour méditer. Connu pour ses pouvoirs de voyance et de guérison, le général arrêta son cortège et lui demanda une consultation :

- Mon cheikh, dîtes-moi comment me débarrasser du FNDD
- Mon fils, je vois...je vois... que le FNDD, dont tu parles c’est pas humain…
- En effet,, mon cheikh honorable..
- Est-ce parmi ce FNDD, il ya un certain Maouloud..
- Oui…
- Est-ce parmi ce FNDD, il ya un certain Jemil ?
- Oui..
- Est-ce parmi ce FNDD, il y a un certain Messaoud ?
- Bon alors, je ne peux rien pour toi..
- Comment ?
- Ce machin c’est du marxiste-léniniste-maïoste-kadihiste-islamiste-modéré-populaire-progressiste. Et mes gris-gris ne valent que pour des gens normaux.

Et le général s’adressant alors au cheikh lui dit :

- On ne peut rien faire alors pour détruire ce machin?
- Si, si , il ya une solution…
- Laquelle ? Vite mon cheikh honorable !
- Laisser AOD les rejoindre.
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Pr ELY Mustapha

lundi 27 octobre 2008

Considérations sur une condamnation sans justice

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La grâce et la disgrâce

Lorsque la politique entre au prétoire, la justice dit-on en sort. Et c’est ce qui ressort des chefs d’accusation à l’encontre d’Isselmou Ould AbdelKader présentés dans la déclaration de Presse du procureur de la république.

Des chefs d’accusation fragiles qui auraient à justifier la réclusion d’un homme ayant parlé du BASEP (I) alors que des chefs d’accusations encore plus graves, condamnent déjà le chef du BASEP (II). Une justice au service du moment..de la grâce et de la disgrâce.

I- Des chefs d’accusation condamnant un homme en disgrâce

Le premier chef d'accusation est celui découlant de l’article 81 du code pénal, à savoir qu'est « puni de la réclusion quiconque, en temps de paix, aura participé en connaissance de cause à une entreprise de démoralisation de l'armée ayant pour objet de nuire à la défense nationale. »

Le second chef d'accusation est celui découlant, suivant le procureur général, de l’article 306 du Code Pénal et qui serait le mensonge public qui est une atteinte à Dieu et puni en tant que tel.

Il est à notre sens de sérieuses failles dans ces chefs d'accusation, qui d’ailleurs ne trouvent nullement leurs fondements dans une quelconque justice.

Relativement au premier chef d’accusation, le prévenu n’a ni dans ses propos ni dans son attitude volontairement voulu porter atteinte à l’armée nationale, ni à son moral.

Ledit présumé a parlé d’un bataillon de l’armée; qui est loin de la représenter dans son ensemble, à savoir le BASEP. Cet article n’est donc pas applicable en la matière et est disproportionné par rapport à une quelconque gravité des propos du prévenu.

Le Procureur s’est basé sur un mauvais postulat de départ qui ruine toute justification au recours à l’article 81 du Code pénal Mauritanien.

D’ailleurs l’article 81 est clair, il puni la participation, « en connaissance de cause à une entreprise de démoralisation ». Il présuppose la préméditation de l’acte et son insertion dans un mouvement d’ensemble d’envergure visant cette démoralisation. Or ce n’est nullement le cas.

Le prévenu n’a ni utilisé de façon préméditée des moyens illégaux et n’a pas agit en complicité d'une « entreprise » orchestrée ayant pour cible la « démoralisation » prévue à l’article 81 précité .

Le prévenu a participé à une émission légale, officielle et programmée dans un organe de presse officiel. Il a exprimé son opinion et ses convictions à propos d’un bataillon de l’armée. Ces opinions sont publiques, ses propos aussi, donc , il ne s’agit pas d’une préméditation qui par définition présuppose la surprise et le secret jusqu’à son accomplissement. Elle ne présuppose pas non plus une atteinte à l’armée mais des révélations à propos d’un bataillon qui n’ont rien de « démoralisant » pour l’armée nationale, ni ne touchent à la sécurité.

Il aurait sufit dans un état démocratique que, face à ses propos, le ministère de la défense apporte la preuve contraire. Et non point demander la condamnation d’un prévenu qui fut lui-même bien au fait de l’armée nationale dont il fut un haut responsable. Mais, il est vrai, nous ne sommes pas dans un état démocratique.

Quand au second chef d’accusation, il tombe de lui-même, car nulle part l’article 306 ne parle de « mensonge notoire » qui enfreindrait les lois de Dieu.

Cet article traite de :

- l’outrage public à la pudeur et aux mœurs islamiques
- le viol des lieux sacrés et la complicité dans cet acte
- crime d'apostasie
- crime d'attentat à la pudeur
- Le refus de prier

On ne sait d’où ce procureur tire un tel chef d’accusation, à moins que les propos portant sur le Basep soient assimilés à une « apostasie ». Ce qui dans la situation actuelle n’est pas improbable eut égard à ce que bataillon a pris comme importance dans l’armée nationale. Puisque, désormais, le fait d’en parler conduit désormais aux enfers.
Ces chefs d’accusation sont d’une fragilité telle qu’ils n’auraient certainement pas mérité qu’on s’y attarde s'ils ne nous interpelaient pas sur le sens de justice.

II- Les chefs d’accusation condamnant un homme qui a la grâce du moment

Il n'est de justice que celle qui ne connaît de grâce que celle de la loi. Or la loi est aujourd'hui en disgrâce.
En effet si ce procureur réclame la « réclusion » pour un prévénu "de la parole" , qu’il nous dise pourquoi il ne met pas en œuvre les articles suivants du code pénal à l’encontre du général Abdelaziz ?

Le général Abdelaziz s’étant opposé au décret du Président de la République le limogeant voici ce qu’il devrait encourir, si justice il y a :

ART. 182. - Tout fonctionnaire public, agent ou préposé du gouvernement, de quelque état et grade qu'il soit, qui aura requis ou ordonné, fait requérir l'action ou l'emploi de la force publique contre l'exécution d'une loi ou contre la perception d'une contribution légale, ou contre l'exécution soit d'une ordonnance ou d'un mandat de justice, soit de tout autre ordre émané de l'autorité légitime, sera puni de la réclusion.

ART. 183. - Si cette réquisition ou cet ordre ont été suivis de leur effet, la peine sera le maximum de la réclusion.

ART. 189. - Tout fonctionnaire public révoqué, destitué, suspendu ou interdit légalement qui, après en avoir eu connaissance officielle, aura continué l'exercice de ses fonctions, ou qui, étant électif ou temporaire, les aura exercées après avoir été remplacé, sera puni d'un emprisonnement de six mois au moins et de deux ans au plus, et d'une amende de 5.000 à 40.000 UM. Il sera interdit de l'exercice de toute fonction publique, pour cinq ans au moins et pour dix ans au plus à compter du jour où il aura subi sa peine, le tout sans préjudice de plus fortes peines portées contre les officiers ou les commandants militaires par l'article 87 du présent code.

Et voici les articles 87 et suivants:

ART. 87. - Ceux qui, sans droit ou motif légitime, auront pris un. commandement militaire quelconque, ceux qui, contre l'avis du gouvernement, auront retenu un tel commandement, les commandants qui auront tenu leur armée ou troupe rassemblée après que le licenciement ou la séparation en auront été ordonnés seront punis des travaux forcés à perpétuité.

ART. 88. - Lorsque l'une des infractions prévues aux articles 83, 85, 86 et 87 aura été exécutée ou simplement tentée avec usage d'armes, la peine sera la mort.

Si l'on sait que les jugements des tribunaux sont prononcés au nom du peuple et exécutés au nom du président de la République, comment peut-on s’évertuer à prononcer des sanctions contre un homme pour ses propos alors que celui au nom duquel elles sont prononcées, le peuple, est pris en ôtage, et celui au nom duquel elles sont exécutées, est séquestré ?

Et il est évident qu’un procureur ne peut requérir la justice au nom d’un chef d’Etat autoproclamé qui est lui-même passible de son tribunal. La justice en disgrâce.


Pr ELY Mustapha
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Annexe: la déclaration de presse du Procureur:
وكالة الجمهورية لدى محكمة نواكشوط
بيان صحفي
مثل أمام وكالة الجمهورية لدى محكمة ولاية نواكشوط يوم 26-10-2008 المسمى إسلم ولد عبد القادر محالا من فرقة الدرك المختلطة بنواكشوط بعد ختم التحقيق الإبتدائي معه إثر شكاية مقدمة ضده من طرف وزارة الدفاع الوطني.
وقد تضمنت الشكاية طلب فتح تحقيق مع المعني ومتابعته عن الأقوال التي صدرت منه في برنامج تلفزيوني بثه النتلفزيون الوطني تضمنت افتراءات منه بحق قواتنا المسلحة.
وبعد دراسة محضر البحث الإبتدائي واستجواب المعني طبقا للفقرة الرابعة من المادة:36 من قانون الإجرءات الجنائية وجهت له تهمتي:
1- المساس بالدفاع الوطني بالإضرار بالروح المعنوية للجيش / الفعل المجرم والمعاقب بالمادة :81 من قانون العقوبات الموريتاني.
2- انتهاك حرمة من حرمات الله بالكذب علنا / الفعل المجرم والمعاقب بالمادة 306 من قانون العقوبات الموريتاني.
للعلم فقد أبدى المعني عند مثوله أمام وكالة الجمهورية استعداده للإعتذار عما صدر منه من إساءة للقوات المسلحة ولوزارة الدفاع الوطني وبعد ما طلب منه أن يتم ذلك طريق وسيلة الإعلام التي صدرت بواسطتها أقواله وافتراءاته موضوع الشكاية رفض ذلك وعندها اتخذت الإجراءات القانونية اللازمة في حقه.

dimanche 26 octobre 2008

Lisons pour mieux comprendre...

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En attendant la birmanisation ou le retour à la démocratie, lisons pour mieux comprendre.

Voici des livres, dictionnaires et encyclopédies bien à-propos pour comprendre la politique étrangère des Etats-Unis, la politique française, les droits de l’homme et la démocratie en Islam….

Des livres pour passer un temps utile...en attendant qu’une junte inutile puisse utilement quitter les lieux.

















































Est c'est sur Mauritania Libris.

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Pr ELY Mustapha

samedi 25 octobre 2008

Quand la France souffle le chaud et le froid


A quoi jouent les français ?

S’il est vrai que la communauté internationale recherche dans l’unanimité la paix, la tranquillité, et le respect des peuples de leur indépendance et la sauvegarde de leurs richesses, cette attitude accuse une distorsion sensible lorsqu’un Etat, pivot dans un processus multilatéral ou bilatéral (accord de coopération, organisation internationale) qu’il a initié ou dont il est le fondateur, devient le vis-à-vis direct d’un Etat membre de ce processus.

Dans les grandes assemblées (telle l’Assemblée générale des Nations unies ou la CNUCED) où la représentativité des plus faibles est assurée massivement, la volonté des Etats s’exprimant naturellement, à travers les résolutions générales, influence la prise de décision et les positions des puissances occidentales . Il n’en est pas de même dans les organisations et les accords régionaux ou sous régionaux dans lesquels un pays central , par son poids historique, financier , économique et son rôle de fondateur et d’animateur principal utilise ces organisations, non pas seulement pour assurer la mission qui est dévolue à la structure internationale, mais aussi pour assurer le respect de principes fondamentaux sans lesquels cette mission ne peut être réalisée. Il en est notamment du respect des droits de l’homme, des libertés publiques et des institutions démocratiques.

C’est dans cette situation que se trouve la France dans ses accords avec les pays membres, généralement d’anciennes colonies ou partageant un facteur commun tel que la langue française.
Ainsi depuis les accords de Cotonou entrés en vigueur en 2003, qui ont succédé à ceux de Lomé, l’aide au développement n’est plus automatique. Elle est désormais liée à des conditions parmi lesquelles on retrouve « les réformes institutionnelles ». Réformes institutionnelles, parmi d’autres conditions qui vont déterminer l’enveloppe financière accordée et gérée dans le cadre d’une stratégie de coopération nationale approuvée.

La conditionnalité de l’aide n’est pas en elle-même une particularité, ce qui le devient c’est lorsque l’Etat pivot des accords de Cotonou se place en interlocuteur privilégié des Etats membres. C’est le cas de la France vis-à-vis des pays africains. Alors que cet accord n’engage pas la France "ut singuli" mais l’Union Européenne dans son ensemble puisqu’il est conclu entre l’Union Européenne et les 77 Etats ACP.

L’exemple le plus illustratif de l’attitude de la France transparaît à travers le traitement qu’elle fait actuellement du « coup d’Etat », en Mauritanie. Soufflant le chaud et le froid, au nom de l’UE, dont effectivement elle assure actuellement la présidence tournante, elle ne semble cependant pas avoir oublié ses propres intérêts.

La volonté exprimée et accordée à la France de tenir les discussions avec les émissaires de la junte à Paris et non pas à Bruxelles, dénotait déjà d’un geste symbolique mais important aux yeux de la communauté internationale de montrer que la Mauritanie autant que les pays africains sont sa chasse gardée.

Et il était évident que cet « interrogatoire » que subirent les envoyés de la junte aux discussions de Paris, avait quelque chose de « colonial » et de volonté de « frustration » que la délégation des putschistes a certainement ressenti. En effet, la France savait pertinemment que les « putschistes » n’avaient rien à proposer , qu’ils n’apportaient pas un plan de solution et que les déclarations publiques du chef de la junte étaient depuis longtemps claires à ce sujet.

Alors que voulait la France en mettant en œuvre cette négociation de sortie de crise ?

Certainement pas arriver à une solution, ni même ses prémisses et ses diplomates le savent bien, mais plutôt une forme de pression qu’elle voudrait mettre, à travers l’accord de Cotonou, sur la Mauritanie. Est-ce pour l’intérêt de la Mauritanie, à savoir obliger la junte à restaurer la légalité ?

Cela est bien la position officielle, à laquelle elle se conformera, puisque le poids et la volonté de l’Union Européenne vont dans ce sens. Mais ayant en charge le « dossier de l’affaire Mauritanie», la France est en train de l’utiliser aussi pour des considérations d’intérêt économique et financier. Une pression dont la gestion se fera certainement au profit de la France et de ses intérêts politiques et économiques en Mauritanie

Aussi la France est train de souffler le chaud et le froid. Attitude qui s’exprime de deux manières : politiquement et économiquement.

Au niveau politique, il suffit de prendre connaissance, durant ces dernières semaines de crise, des déclarations des officiels français. On retrouve des déclarations, souvent volontairement contradictoires sinon ayant une forte charge d’ambigüité, dont on se douterait bien de leur caractère auto-entretenu. Stratégie politique du clair-obscur, si chère aux impressionnistes.
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Une diplomatie française qui peint la situation avec une aquarelle auto-lavable de son cru.

Les déclarations de la député des verts, fut le début de la saga impressionniste, où les ambigüités entretenues par cette dame sur la légalité du putsch et de sa reconnaissance, sonnaient déjà la position du « microcosme français » à ramification européenne dans sa gestion de l’affaire mauritanienne.

Puis ce furent les déclarations attribuées au ministre des affaires étrangères français sur un possible de règlement en négociation avec les putschistes, puis ce fut le secrétaire d’Etat à la coopération et à la francophonie qui joue au yoyo, en annonçant ses visites puis en les en annulant.
Puis l’ambassadeur de France en Mauritanie qui confirme les sanctions en cas d’impasse alors que le Secrétaire d’Etat à la coopération et à la francophonie confirme "comprendre" les militaires en affirmant à RFI : « Je veux surtout lancer un appel solennel aux militaires, un appel solennel pour que le président soit libéré. Je veux leur dire aussi que, sans doute, y’a-t-il des revendications des militaires qui ne sont pas toutes illégitimes,… » En déphasage complet avec les déclarations de l’Elysée qui condamne les putschistes et demande retour à la légalité constitutionnelle.. »

Ces attitudes du « oui et du non » sont une vieille stratégie qui dans les négociations font chavirer l’avis du côté le "moins disant", la France est en train, sous la couverture de l’Union européenne, de jouer à ce jeu là.

Cette stratégie permettra à travers des négociations ou la politique molle jouera le rôle d’expectative à des concessions au profit de la junte pour la maintenir dans un conditionnement qui pourra , en fin de parcours, lui permettre de lui demander bien des avantages en contrepartie d’une porte de sortie « négociée ».
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Et qui profitera de cette stratégie thermo-politique du chaud et du froid ? L’économie française, bien entendu.

Les entreprises françaises ont déjà imprimé à l’attitude politique française dans « l’affaire mauritanienne», la recherche de leurs intérêts. L'entreprise française "Total "qui vient d’avoir un grand marché d’Etat avec la junte en est l’exemple le plus apparent.
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La junte sous la pression politique et dans l’espoir d’avoir une issue fera tout pour concéder des avantages aux lobbies économiques et financiers français. Avec bien-sûr la bénédiction des financiers et commerçants mauritaniens qui ont depuis le mois dernier commencé à négocier des mesures en faveur de la junte à Paris même.
A ce propos voir notre article (« A combien vont-ils vendre la Mauritanie ») sur les interventions de banquiers et commerçants mauritaniens à travers des intermédiaires comme Karim Wade et autres personnes intéressées au bradage de l’économie mauritanienne au profit d’une reconnaissance de la junte.

Il n’est pas improbable donc que les dirigeants français veulent faire profiter l’économie française, suite à la crise qui la frappe à l’instar du reste du monde, de la situation mauritanienne . Et ceux qui illégalement dirigent la Mauritanie sont dans une situation de « fragilité évidente » dont le système concerté politico-économique français peut profiter.

Ceci est d’autant plus vrai que tous les secteurs de l’économie française sont touchés. A titre d'exemple, le marché français de l'investissement de l'immobilier d'entreprise a chuté de 54% en un an, à 8,4 milliards d'euros au 1er septembre 2008. L’impact de la crise (coût du risque + dépréciation ) sur le système bancaire a été de 17, 5 milliards d’euros de pertes. Les variations de chute des valeurs des actions des banques ont été impressionnantes sur l’année : -50% à (Crédit agricole) , - 41 % (Natixis), 40% (Société générale) , - 31 % Dexia, à -25% ( BNP) etc.

L’économie française a donc besoin de tous les moyens nationaux et internationaux pour financer les pertes à travers la levée de capitaux, l’investissement extérieur, les marchés internationaux etc. La Mauritanie est aujourd’hui , à cause de sa junte, un maillon faible qui offrirait aux français bien des avantages et des concessions en contreparties de décisions politiques de faveurs.

Les politiques français le savent bien et ils sont en train de le gérer. Après tout pourrait-on le leur reprocher ?

Chaque pays gère ses intérêts et profite de la conjoncture politique et économique pour son bien-être et celui de ses populations.
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La Mauritanie est aujourd’hui un gâteau à partager, qu’une junte sans scrupule est aujourd’hui en train de découper à travers les faveurs qu’elle offre. Et qu’elle continuera à offrir tant que ceux qui la mettent sous pression continueront à souffler le chaud et le froid et lui miroiter, pour en soutirer le maximum, une « certaine » solution.
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Une « certaine » solution que l’absence de lucidité des putschistes ne peut concevoir que c’est déjà une solution certaine.
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Pr ELY Mustapha

jeudi 23 octobre 2008

A Son Excellence Monsieur Nicolas Sarkozy, Président de la République Française, Président en exercice de l’Union Européenne


Monsieur le Président,

Le coup d’Etat du 6 Août 2008, est une atteinte directe à la volonté du peuple mauritanien qui, en Mars 2007, s’est exprimé par un suffrage universel salué par toute la communauté nationale et internationale et a élu à une majorité écrasante de 52 % son Président de la république.

Cette élection libre , transparente et démocratique depuis 1978 date de l'avènement des régimes militaires en Mauritanie, a été supervisée par d’éminents observateurs internationaux, personnes physiques et morales, et a bénéficié du soutien moral et financier de l’Union européenne et de sa caution en tant que berceau historique des démocraties.


Monsieur le Président,

La violence faite aujourd’hui au peuple mauritanien à travers le renversement de ses institutions démocratiquement élues, et le piétinement de sa volonté librement exprimée ne peut trouver sa justification nulle part et certainement pas dans un argumentaire inventé de toute pièce par une junte putschiste pour justifier son forfait. Argumentaire qui, au-delà du cynisme qui s’en dégage, n’étant autre que le « redressement de la Démocratie ».
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Un général, chef d’une garde présidentielle, qui renverse le président démocratiquement élu d’une nation en justifiant son acte par un tel argument pourra-t-il trouver dans un esprit rationnel raison d’écouter ?

Un général limogé par le Président de la République au nom de ses prérogatives constitutionnelles de « chef des forces armées », a-t-il le droit de contester un tel acte et à fortiori commettre un coup d’Etat ?

Qu’adviendrait-il de la Démocratie si chaque fonctionnaire se rebellait contre un acte administratif à lui défavorable et si chaque soldat se servait de ses armes contre son chef ?

Monsieur le Président,

Le putschiste qui a commis ce coup d’Etat, en bafouant toutes les lois constitutionnelles, le justifie par le danger qu’un tel décret le limogeant et le remplaçant par un autre officier entrainerait pour la stabilité du pays. Or il n’en est strictement rien. Tout officier est remplaçable par un officier de même valeur et cela ne justifie pas les coups d’Etat.

Un tel acte est aujourd’hui présenté à la communauté internationale, par une pléiade de commis malléables et corvéables à merci, comme un acte salvateur visant à protéger la Démocratie mauritanienne contre la politique menée par le président de la République renversé, ce qui ne correspond nullement à la réalité.

Durant ces quinze mois au pouvoir, le président Sidi Ould Cheikh Abdallahi, n’a jamais commis une infraction ni contre la loi , ni contre le jeu normal des institutions démocratiques. Il a été un président au dessus de tout soupçon.

C’est au contraire le général putschiste qui considérant, le Président comme son vassal puisqu’il a contribué à son élection, a voulu lui dicter ses choix et sa politique.

Face à sa résistance, il a déployé tout un mécanisme de déstabilisation institutionnelle, notamment un lobby parlementaire acquis à sa cause pour empêcher tout bon fonctionnement des institutions. Il a crée de toute pièce une fronde parlementaire qui s’est attaquée à l’institution présidentielle, qui a bloqué les choix gouvernementaux du Président et qui a généré des tensions jusque dans l’entourage familial immédiat du président.

Cette fronde, malgré les blocages qu’elle a générés durant des mois,, n’ayant pas abouti à déstabiliser le Président , il fallut alors recourir au coup d’Etat. Le décret présidentiel limogeant le général putschiste n’en fut qu’un catalyseur dans lequel les putschistes ont pu trouver mille et une raisons pour justifier leur forfait. Notamment la volonté du président de "décapiter" l’armée , de plonger le pays dans le chaos ou d’instaurer l’insécurité face au terrorisme. Raisons qui sont d’autant une cogitation mégalomane d’un général qui, hantant depuis longtemps les allées du pouvoir, se croyait indispensable. Un putsch pour reprendre ce qu’il a toujours considéré , à l'instar du chapelet de putschistes qui l'a précédé, comme son propre patrimoine : l’Etat.

Monsieur le Président,

Les militaires sont-ils les plus indiqués pour établir la démocratie ou constitutionnellement habilités à la « redresser » ? Le code militaire et les lois martiales s’établissent sur la discipline pas sur la démocratie. Une discipline à mettre au service d’une démocratie, pas sa destruction.

Aujourd’hui, la junte clame que les institutions démocratiques continuent à fonctionner normalement, ce qui est une aberration constitutionnelle. En l’absence du président de la République « incarnation constitutionnelle » de l’Etat, le parlement s’en trouve par la même neutralisé. Seul le président de la République a, constitutionnellement, autorité pour convoquer les sessions parlementaires. Les deux présidents de l’assemblée et du Sénat ayant depuis les premières heures du putsch refusé toute collaboration avec la junte , témoignant ainsi davantage de l’illégalité des sessions parlementaires convoquées d’autorité en violation de la constitution.

C’est autant dire qu’il s’agit d’un parlement fictif peuplé par un nombre de sénateurs et de députés d’une fronde toute acquise aux putschistes. Parlement qu’ils ont continué à convoquer pour entériner l’idée d’une continuité libre et démocratique des institutions de la République. Parlement présidé par des vice-présidents autoproclamés en vertu d’un règlement intérieur caduc . Le président du Sénat et le président de l’Assemblée nationale ayant pris leur distances face à cette comédie parlementaire et n’ont jamais participé depuis le putsch à ces mises en scènes « législatives ».

Parlement maintenu formellement en fonctionnement pour des objectifs de règlements de comptes personnels qui n’honorent ni le pays ni la République. Car durant ces deux mois du putsch son activité s’est exclusivement consacrée à humilier, par des convocations répétitives et sous contrainte, l’épouse du chef de l’Etat renversé et à mettre en place une Haute cour de justice pour dissuader et dégrader l’image du Président de la République devant l’opinion nationale et internationale. Une activité pseudo-parlementaire toute orientée vers la vindicte et n’a de législatif que le nom. Est-ce là la mission d’un parlement qui participe aux institutions démocratiques ?

Jamais un parlement n' a fonctionné et ne fonctionnera sans ce qui justifie l’existence et l’équilibre des trois pouvoirs dans l’Etat. L’exécutif, le législatif et le judicaire. Or l’exécutif mis sous séquestre et le judiciaire mis au service de la dissuasion opposante, que reste-il de la démocratie, des droits et des libertés publiques ?

Non seulement, l’esprit des lois est violé et les corps institués réduits à se consumer sous la volonté d’une junte qui veut imposer aux institutions républicaine son existence.

C’est ,en concaténant l’histoire, mettre Montesquieu au service de Machiavel et envoyer Talleyrand bénir Danton sur l’échafaud .

Monsieur le Président,

Ce qui se passe actuellement en Mauritanie, est une des plus grandes mascarades que nos institutions aient vécues depuis l’indépendance. Des putschistes qui prennent le pouvoir en instrumentalisant des parlementaires au garde-à-vous, acquis à leur cause corps et âme et dont la plupart leur doit son élection. Parlementaires qui ne sont pas eux-mêmes saufs de tous les reproches que l’on peut faire à l’entourage du président et à son dénigrement.

Monsieur le président,

Notre peuple épris de paix et de justice, demande instamment que cessent ces violences qui lui sont faites, que ces militaires qui ont pris depuis plus de trente ans le pli des coups d’Etat , et la manipulation des hommes et des institutions trouvent une dissuasion suffisamment forte pour les contraindre à ne plus jamais recommencer.

Et cette dissuasion ne peut venir que du peuple avec l’aide de la communauté internationale, celle éprise de justice et de liberté.

Or le peuple mauritanien après plus de trente ans de dictature militaire, n’en peut plus. Réduit à la misère dans un des pays parmi les plus riches .Classé parmi les pays les plus pauvres malgré des richesses faramineuses mais dilapidées durant tant d’années de régime militaire

Monsieur le Président,

Le terrorisme n’est pas né avec le Président Sidi Ould Cheikh Abdallahi. Le tragique 11 septembre en témoigne à l’échelle mondiale et les non moins tragiques évènements en Algérie notamment et en Mauritanie ( la tragédie de Lemgheity en Mauritanie), durant le régime qui a précédé celui de Sidi Ould Cheikh Abdallahi, en témoignent à l’échelle de la sous-région maghrébine.

Faire croire que le Président Ould Cheikh Abdallahi a permis le terrorisme en Mauritanie ou qu’il l’a encouragé est une contre-vérité. La vérité est à chercher ailleurs dans le développement du terrorisme dans la sous-région et son expansion . Expansion qui n’a pas trouvé devant elle une résistance militaire et sécuritaire puisque les chefs de l’armée obnubilés par le pouvoir, vivant dans ses allées, peu préoccupés des troupes ni de la mission de défense du territoire et son intégrité qui leur est constitutionnellement confiée, sont certainement les premiers fautifs.

Un général concentrant à Nouakchott, l’essentiel de l’armée , de ses munitions et des moyens dont elle dispose et qui tout orienté vers la conquête du pouvoir puisque c’est son deuxième putsch, n’a pu servir son pays qu’en détruisant ses institutions démocratiques.. Et la dernière tragédie de "Tourine" témoigne bien de l’état de vulnérabilité dans lequel se trouvent nos troupes face à un ennemi terroriste et sournois.

Monsieur le Président,

Toute personne, douée de raison, ne doit pas vous dire qu’il faut œuvrer dans le sens des sanctions contre la Mauritanie. C’est une option qui ne doit pas trouver auprès de vous et de vos alliés européens une quelconque sollicitude.

La Mauritanie à besoin de l’aide internationale, des moyens financiers provenant de toutes les institutions étatiques nationales et internationales, des organisations internationales pour continuer son développement.

En la privant de ces moyens financiers, ce n’est pas une junte que l’on sanctionne car elle a constitué durant ces trente dernières années, directement ou indirectement, au pouvoir des fortunes qui la mettraient certainement pour longtemps à l’abri du besoin, ce sont ces populations pauvres vivant au jour le jour et dont le moindre manque dans leur approvisionnement les ferait très vite chavirer dans une famine qui n’est pas une vue de l’esprit comme en témoignent déjà les rapports des organisations humanitaires internationales.

Les sanctions financières emporteront très vite une infrastructure économique et sociale fragile et hypothéqueraient pour longtemps tout espoir de développement. Les projets publics et privés s’arrêtant chaque jour du fait de cette crise, entraineront la mise à genou de tout un pays.

Aussi nous demandons à ce que la Mauritanie ne soit pas privée de ses moyens économiques et financiers pour que des millions d’innocents ne souffrent pas aujourd’hui et encore plus demain des turpitudes d’une poignée de militaires.

Ce que nous demandons ce n’est pas de sanctionner la Mauritanie et son peuple, ce que nous demandons c’est de sanctionner des militaires putschistes récidivistes pour le salut de toute une nation et le devenir de ses institutions démocratiques.

Nous voulons qu’ils quittent le pouvoir et que la légalité constitutionnelle soit restaurée. Nous voulons que le peuple mauritanien retrouve les institutions qu’il a élues et qui ont eut l’appui et l’assentiment de toute la communauté nationale et internationale. Et que toute solution à trouver le soit dans notre Constitution encore en vigueur , à travers une expression démocratique libre et populaire .

Monsieur le Président

Pour que le peuple puisse tenir debout face à ses tyrans, il ne faut l’affamer.

Il ne faudrait pas que l’arme du pain soit utilisée, elle ne servirait que l’objectif de ceux qui veulent le soumettre davantage à leur diktat. Un être affaiblit est vulnérable, une nation affamée est imprévisible.

Sanctionner les putschistes, les obliger à quitter le pouvoir.

Jamais le peuple mauritanien n'a cultivé la haine. Imbu des principes de tolérance issus de son islam et de ses cultures millénaires, il appelle à trouver une solution conforme à son idéal de paix et de justice. Trouver un accord, préservant la légalité et la dignité de tous les protagonistes pour le salut des institutions républicaines et pour la démocratie, se doit d'être la seule arme pour que la Mauritanie ne soit pas le bouc émissaire d’intérêts qui ne servent pas la Nation.

Nous ne voulons plus jamais ça. Au nom de l’idéal des nations et de la liberté des peuples.


Pr ELY Mustapha

mercredi 22 octobre 2008

Icare en Etat de Siège



« Combien de crimes ont été commis
simplement parce que leur auteur
ne pouvait supporter d'avoir tort » (A.Camus)


Il est important de se souvenir que ould Abdel Aziz est un militaire mauritanien et nous tenons à toute notre armée et respectons nos soldats et le rôle qu’ils jouent dans la défense du pays, et l’intégrité de notre territoire.

Il est en effet, un point à éclaircir et qui souvent passe inaperçu mais dont l’incidence sur la façon de traiter les choses est très importante.

En effet, depuis 1978, l’armée a toujours été perçue à travers ses officiers supérieurs. Surtout ceux qui sont dans les allées du pouvoir politique soit parce qu’ils le détiennent soit qu’ils en assurent le » gardiennage ». Ainsi aujourd’hui, lorsque l’on parle du général ould Abdel Aziz , il semblerait que cela est perçu comme s’adressant à l’armée mauritanienne. La confusion dans les esprits entre le général ould AbdelAziz et l’armée nationale se doit d’être absolument évitée et combattue dans les analyses faites du comportement de ce général.

Le général Ould Abdel Aziz, n’est pas le chef des armées ni la personnification de l’armée mauritanienne. C’est un officier supérieur comme tous les autres qui a par des circonstances historiques sous l’ancien régime a eu pour mission le commandement de l’unité chargée de la sécurité du Président. C’est un chef de bataillon. Un bataillon de l’armée nationale. Bataillon qui relève directement de l’Etat Major national et bien entendu du « chef suprême des armées », le Président de la République.

Le Général , commandant du BASEP relève donc organiquement et fonctionnellement du chef d'état Major national. Or ce général a pris une indépendance et un monopole tels sur les armes et munitions des unités nationales qu’il est devenu une espèce « d’Etat major dans l’Etat major » durant le régime de Taya. Puis il a évolué avec le régime de Sidioca, pour devenir « un Etat dans l’Etat» . Et enfin en reversant le président Sidioca par devenir « l’Etat lui-même».

En recherchant cette ascension vertigineuse vers le pouvoir , il est en train, comme Icare de se brûler les ailes. Il est aujourd’hui pris au piège de sa recherche constante d’autorité et il est certain qu’il n’en mesure pas encore la dimension exacte.

Comment le pourrait-il ?

En effet, comme on a pu le démontrer ailleurs, le titulaire du pouvoir est très vite anesthésié par le microcosme politique mauritanien. Ses randonnées dans les quartiers populaires et la recherche du « bain de foule » est le premier signe avant-coureur d’un comportement qui vise à revitaliser une chute dans le moral et que le « populisme », tel un remontant aurait pour rôle de rehausser.

Le recours à l’exacerbation du sentiment national, à l’égard de la position de la communauté internationale et des organisations nationales est encore une forme de recherche d’un soutien dont on connait les limites mais dont on ne mesure pas les conséquences sur la stabilité nationale. Ceux qui ont exacerbé le sentiment national en savent quelque chose et tentent encore de s’en expliquer devant les tribunaux internationaux.

Pris entre la gangue d’un populisme qui ne donne pas ses fruits, un microcosme politique envahissant et anesthésiant et le reste du monde qui menace le pays et qui a commencé à mettre en exécution ses décisions, le général ould Abdel Aziz est en train d’expérimenter la dissuasion et l’intimidation. Des interpelations, des convocations musclées, des citations devant la police et la sécurité sont le lot actuel d’anciens responsables mais aussi de membres de partis politiques.

Que recherche le général à travers une telle attitude d’intimidation ?

La situation dans laquelle se trouve actuellement le général, correspondrait en tout point à la situation que les militaires appellent sur le terrain de combat « l’état de siège ». Mais ce n’est pas de cet état de siège là dont on parle mais bien de celui qu’Albert Camus a si bien décrit dans sa pièce théâtrale du même nom.

« L'État de siège est une pièce de théâtre écrite par Albert Camus en 1948, qui traite de la peur, et plus exactement de la mise en place d'un régime totalitaire par l'instrumentalisation de la peur (. ..) Cette pièce dénonce le fonctionnement des régimes totalitaires en démontant le mécanisme de soumission de la peur.

Mais le discours universel de cette pièce de théâtre concerne tous les hommes. Camus veut avant tout prévenir contre un éventuel retour de ce type de régime. Il aborde ainsi les thèmes de la résistance, de la révolte et de la liberté comme garde-fou contre la manipulation, la résignation, la soumission, la passivité... » (wikipédia)

Ce état de siège là est bien celui qui caractériserait un usurpateur de pouvoir qui, ayant épuisé toutes les voies pour "convaincre" du « bien-fondé » de son acte , retourne vers ce qu’il maîtrise le plus : la violence.

Camus, dans sa fameuse pièce nous apprend alors que pour venir à bout de la volonté de totalitarisme « c'est de ne pas en avoir peur » mais « de lui opposer la solidarité. »

Icare en état de Siège, voilà comment apparaît aujourd’hui ould Abdelaziz. Mal conseillé , mené par le bout du nez par une pléiade de courtisans porteurs de faux espoirs en sa pérennité au pouvoir. Et qui disparaitront à la vitesse où ils sont apparus. Spécialistes de la défection au premier coup de vent contraire, or la tempête commence déjà à se lever.

Quel peut-être le moral d’un général qui prend d’assaut une place forte et qui se rend compte qu’il ne peut ni la garder, ni y renforcer ses positions, et qu’il ne peut y rester puisqu’il y est assiégé? Il ne peut demander ni des renforts intérieurs, ni compter sur l’extérieur qui l’a déjà condamné… à en sortir.

Dans cet univers, le général putschiste est bien pris au piège. Le sait-il? Certainement. Il doit être certainement en train de revoir toutes les techniques apprises à l’école militaire pour se sortir de situations difficiles. Du camouflage à la diversion en passant par l’ultime sursaut du soldat assiégé : forcer une voie de sortie.

Alors il faut sauver le soldat ould Abdelaziz, avant que la dernière solution ne s’impose à lui. Car personne n’acceptera plus les solutions forcées ni les coups de force.

Aussi la seule solution est le dialogue et l’imposition de l’esprit de tolérance pour une solution durable de sortie de crise. Une solution qui sortira le général de son état de siège et le pays du danger économique qui le menace.

Pourtant les solutions concrètes proposées ne sont pas infinies et se résument concrètement en quatre possibilités :

- Celle avec le général et avec le président : Entériner le putsch et l’illégalité mais Instaurer une cohabitation à penser et à codifier

- Celle sans le général et avec le président : restaurer la légalité constitutionnelle en rejetant le putsch et l’illégalité

- Celle sans le président avec le général : entériner le putsch et l’illégalité

- Celle sans le général et sans le président : entériner le putsch et l’illégalité sans restaurer la légalité constitutionnelle.

Quelle que soit la solution, il faudrait la trouver rapidement pour le salut de la nation. L’auteur de « l’état de siège », n’a-t-il pas écrit :« Combien de crimes ont été commis simplement parce que leur auteur ne pouvait supporter d'avoir tort » (Albert Camus) ?

Et il vaut mieux avoir eu tort que d’avoir mis sa nation en danger.

Pr ELY Mustapha

Sondage au bas de cette page.

mardi 21 octobre 2008

Motus et bouche cousue. Mystère et boule de gomme.


Et si le Président Sidioca s’exprimait, que dirait-il ?

Partant d’un principe infaillible régissant les canaux de communications en Mauritanie , on dira que tout se sait.

La question est : Que dira le Président Sidioca que l’on ne sait pas ?

Mystère et boule de gomme. Qu’est-ce qui serait si exclusif pour entrainer une reconsidération de l’image que chacun s’est faite, durant ces quinze mois de gestion, du régime de Sidi Ould Cheikh Abdallahi ?

Voilà une gageure.

S’il nous dit que tout un complot a été ourdi contre lui à travers une connexion militaro-parlementaire, on le savait déjà. Probablement qu’il fournira plus de détails, mais cela ne change rien à la chose.

S’il nous dit que les militaires l’ont mis sous contrainte durant son mandat, cela ne nous apprend rien. C’était évident, cela se voyait au grand jour.

S’il nous dit qu’il n’avait pas le libre-arbitre, ni la liberté de ses gestes et des ses actes, cela se comprendrait. Mais ça aussi on le sait.

Que pourrait-il alors révéler qui serait si sensationnel, qu’il entrainerait un lever de bouclier général et renverserait la vapeur en alliant ses contradicteurs à sa cause ?

Mystère et boule de gomme… Et pourtant…

Pourtant, quelque chose pourrait bien se déclencher et cela ne peut être que sur la base de la connaissance que le Président aurait eu de certains dossiers sensibles qu’il aurait eu à gérer, dont il a la preuve et qui seraient éminemment explosifs pour entrainer le tollé général.

En effet, où sont passés les dossiers de la drogue et de ses trafiquants impliquant des réseaux politico-admistrativo-économiques nationaux ?

Où sont passés les dossiers de la Mafia mauritanienne soulevés par Interpol et son impact sur la sécurité de la nation?

Où sont les dossiers impliquant, dans ces processus, de hautes personnalités de l’Etat du régime précédent et actuel dans les problèmes de sécurité nationale?

Quel impact cela-t-il eu sur le mandat du président et la volonté des putschistes de s’en débarrasser ?

Y ‘a –t-il eu une pression constante sur le président afin d’étouffer tous ses dossiers et qui s’est traduite par un conflit ouvert entrainant l’acte du président voulant se débarrasser nuitamment du général?

Le général en renversant Sidioca, voulait-il protéger non seulement ses intérêts, sa personne mais aussi d’autres personnes dont l’implication dans ces dossiers pouvait entrainer des révélations compromettantes?

L’affaire du décret de limogeage, serait-elle l’arbre qui cache la forêt ?

Toujours est-il que Sidioca se devra bien de parler mais pas de ce qu’on sait, mais de ce que l’on soupçonne.

En définitive, Sidioca à le choix : soit rompre la « loi du silence », soit garder le silence. Dans ce dernier cas, comme on dit "tout ce qu'il dira sera retenu contre lui."

En effet, s’il devait, avec ce qu’il sait , puisque baignant pendant quinze mois dans le secret des Dieux, briser « la loi du silence » ( qui plane sur ce qui détruit le pays, à savoir la drogue, la mafia organisée, la criminalité financière et économique ainsi que les personnes qui autour de lui et dans les centres de décisions organisent tout cela, s’en servent pour maintenir les réseaux des stupéfiants et autres trafics dont ils s’enrichissent et assujettissent politiquement le pays grâce aux moyens illicites dont ils disposent ) et permettre de voir les choses autrement, alors tant la communauté nationale qu’internationale saisira, au-delà de leurs discours salvateurs, la motivation réelle de ceux qui l’on renversé.

Par contre, s’il devait parler pour nous dire qu’on lui a fait du tort de le renverser, et que tout ce qu’on lui reproche est faux et que les militaires l’ont mené en bateau et l’ont mis sous pression à travers le général et ses complices au parlement , et que son épouse est innocente de tout ce qu’on lui reproche et qu’il est victime d’une incompréhension, alors Sidioca ferait mieux de garder le silence.

En effet, Le silence lui profiterait mieux. Il en lui-même un cri pour une personne que l’on incarcère. Et le silence lui préservera une aura positive qu’il ne devrait pas déchirer en parlant pour ne rien révéler autrement que ce que chacun sait.

Ce serait, encore une fois ,une mauvaise stratégie et ne rendrait nullement service à ceux qui appellent à la restauration de la légalité, à travers son retour.

Motus et bouche cousue. Mystère et boule de gomme.

Pr ELY Mustapha

Comité militaire pour le redressement de la démocratie (CMRD)

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Communiqué numéro 4: plus ingrata , tu meurs.


Le Comité militaire pour le redressement de la démocratie (CMRD) ex-HCE, informe l’ensemble des mauritaniens, ceux pris en otage et ceux qui courent encore, que son putsch étant dès le début voué à l’échec vient de se voir confirmer la même chose, après Addis-Abeba par Paris et Washington.


Aussi toutes les personnes, objet du communiqué n°1 (qu'on peut consulter ici ), que le retournement de vestes à commencé et que tous ceux qui veulent le faire sont priés de vérifier d’abord qu’ils ne sont pas définitivement fichés dans la liste des personnes indésirables publiée aujourd’hui par Washington. Pour ceux-là le CMRD ne peut plus rien, car il en fait lui-même partie.

De même le CMRD, informe toute la population non encore abrutie par les deux mois de sa dictature que les élections objet du communiqué numéro 2 ( qu'on peut consulter ici) , ne peuvent plus être tenues du fait que l’Union Européenne ne lui laisse plus qu’un mois pour quitter les lieux, Mais que si elle veut bien, il y a un certain Ahmed Daddah, (très connu au bataillon) qui voudrait bien prendre leur place même pour quelques secondes.

De même aussi, le CMRD informe tous les mauritaniens que le communiqué n° 3 (qu’on peut consulter ici ) n’a plus d’objet non plus car comment voulez-vous que le général Abdelaziz tienne sa promesse de « résoudre tous les problèmes de la Mauritanie » en un mois ? Mais proposerait bien un Grand Sénateur Mauritanien (GSM), du côté de Rosso, pour continuer à vous mener en bâteau législatif en attendant le prochain putsch.

Enfin, comme les membres de la junte et leurs supporters sont déclarés "persona non grata" aux States et qu’ils le seront bientôt en Union européenne et un peu partout dans le monde, le CMRD a le plaisir de vous informer que le 20 novembre, date d’expiration de l’ultimatum, il sera pris en charge par l’ANAIR au titre de réfugié de l’intérieur.

Et pour finir et afin de bien lire ce communiqué et pour respecter la bienséance prière de ne pas prononcer « CMRD » , en un seul mot mais en plusieurs lettres. C’est la seule chose de positive que nous aurons laissé à la Nation, vu que nous savons maintenant que notre nom était prémonitoire de la chose qui nous est arrivée.

Signé au palais provisoirement présidentiel

Par le chef de la junte ( persona non grata en chef )

Et les membres de la junte (plus « ingrata » encore)
Pr ELY Mustapha

lundi 20 octobre 2008

La stratégie qu’il faut, là où il faut, quand il le faut.

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Défendre l’institution pas la personne.

Des membres de la société civile auraient rendu visite à Sidi Ould Cheikh Abdallahi. Et comme d’habitude la presse officielle, n'a pas fait son travail d’information. Un entrefilet pourtant : Sidioca aurait exprimé sa volonté de défendre publiquement sa gestion. Et voilà.

Un homme séquestré depuis plus de deux mois, privé de ses mouvements et de sa liberté de parole n’aurait eu rien à dire à ceux qui viennent s’enquérir de sa situation que de vouloir faire le bilan de son régime ?

En vérité, si Sidi Ould Cheikh Abdallahi, va justifier son retour sur la base de sa gestion des affaires publiques durant sa présidence, c’est là une très mauvaise stratégie. Car ce n’est pas sur ce plan qu’il aura le satisfécit de qui que ce soit ni la mention la meilleure. Il suffit au lecteur de lire tout ce que l’on pu écrire ici sur les errements politiques économiques et sociaux des gouvernements sous sidioca. La dernière lettre que nous lui avons adressée après son renversement résume les quinze mois d’évaluation de sa politique et de celle de son gouvernement (lire la lettre ici) .

Il ne faudrait pas que Sidioca se trompe de stratégie et se mette à défendre sa gestion. Ce n’est pas celle que nous défendons et c’est prêter le flanc à une critique qui ne sera pas dans beaucoup de ses aspects exagérée.

La stratégie de Sidioca ne doit pas être de dire « j’étais un bon président », je dois donc être réinstallé dans mes fonctions mais de dire je suis le président légal et légitime de la République islamique de Mauritanie et le peuple m’a choisi à 52 % contre tous les détracteurs qui étaient en lice avec moi aux élections présidentielles et qui ont approuvé à l’instar de la communauté internationale mon élection transparente et sans fraude.

Il ne faudrait pas que Sidioca se trompe de stratégie, ce n’est pas le Sidioca gestionnaire que nous défendons et s’il revenait nous le descendrons encore dans nos critiques comme nous l’avons toujours fait de tous ceux qui gèrent notre pays.

Ce que nous défendons c’est le président élu par le peuple et dont le renversement est l’expression du piétinement du peuple et de sa volonté. Car seul le peuple qui l’a élu est habilité dans les formes constitutionnelles à le destituer, pas un militaire légalement limogé.

Que Sidioca, sache que en tant que président de la république, il est le symbole d’une démocratie naissante qui lui a conféré légalité et légitimité. C’est uniquement sur ce plan qu’il doit se battre pour réintégrer ses fonctions.

En effet sa gestion, à travers notamment tous ceux qu’il a nommés aux emplois politiques et administratifs n’est pas brillante, ni ne peut être donnée en exemple. Ses détracteurs y trouveront à manger et à boire pour la retourner contre lui.

D’ailleurs quel président de République en quinze mois de gouvernement pourrait se vanter de résoudre les problèmes de sa nation ? Quinze mois ne suffiraient même pas un ministre pour entamer un programme respectable dans son département.

C’est au bout de plusieurs années que le programme d’un président peut être évalué. C’est à la fin de son mandat que ses réalisations sont comparées avec ses promesses et particulièrement le programme pour lequel il a été élu.

Que Sidioca , ne se trompe donc pas de stratégie. Le bilan de sa gouvernance est fortement mitigé, certes avec quelques points d’éclaircie (« retour des réfugiés, réforme de l’éducation ») mais ce n’est pas cela qui justifierait son maintien en tant que Président.

Si Sidioca se doit de suivre une stratégie , elle serait la suivante :

- Affirmer haut et fort sa légalité et sa légitimité et ne pas en démordre ni accepter de compromission sur ce principe

- Accepter le dialogue pour la sortie de crise en proposant des aménagements institutionnels qui peuvent consister en l’écourtement de son mandat pour organiser des élections présidentielles

- Accepter de donner des garanties pour les putschistes et leurs alliés à travers une amnistie et un retour dans leurs fonctions ou des fonctions similaires

- Accepter d’éloigner sa famille de toutes les affaires publiques et procéder à la régularisation financière administrative ou juridictionnel de l’institution gérée par son épouse. En recourant au règlement à l’amiable et à l’équité.

- Initier un renouvellement des institutions parlementaires par le recours à des élections législatives anticipées.

- Demander à son ancien gouvernement de déposer sa démission et constituer un gouvernement de transition constitué de membre de la société civile

- Initier un vaste programme de dialogue avec les acteurs politiques et sociaux dans des forums nationaux afin de fixer pour le pays des orientations sociales, politiques et économiques concertées et non plus parachutées par les gouvernements successifs.

- S’engager solennellement à associer tous les acteurs politiques à la gestion du pays.

- De se mettre au service de la nation en allant vers les populations et en résolvant leurs difficultés. A sanctionner sévèrement et publiquement la corruption, les dilapidations des biens publics.

- A donner à travers sa personne l’exemple du décideur qui s’adresse par les médias au peuple et qui ne l’ignore pas en se cantonnant dans sa mosquée et son palais à défaut d’une carlingue d’avion.

Toutes les solutions sont possibles dans l’intérêt du pays et la mise à terme de la crise. Mais il ne faut pas se tromper de stratégie. Le président de la république et son retour ne se justifieraient pas par sa gestion précédente (quel président au monde pourrait d’ailleurs en si peu de temps se prévaloir de la sienne ?), mais bien plus que cela : une légalité constitutionnelle et une légitimité populaire que ceux qui l’on renversé n’ont pas.

Pourquoi tenons-nous au retour même conditionné du Président de la République à ses fonctions ?

Simplement parce que si cela n’est pas fait comme préalable à toute solution de résolution de la crise, les putschistes auraient réalisé deux choses qu’il ne faut pas accepter à moins d’une catastrophe pour l’avenir démocratique du pays ;

- Ils auraient piétiné tout un peuple et sa volonté en destituant son président légal et légitime.

- Ils auraient mis fin à une expérience démocratique qui malgré ses errements se doit d’être continuée.

- Ils auraient repris le fil des putschs successifs qui depuis 1978 détruisent le pays. Et n’importe quel soldat n’hésitera plus à faire son putsch à lui.

- Plus une « démocratie « , à l’avenir ne sera plus à l’abri des putsch puisque ce dernier putsch les aurait légitimés au nom d’un argument fallacieux de « redressement » de la démocratie .

Demander le retour, même provisoire, même conditionné du Président de la république et des institutions légitimes est le seul garant de la continuité de la démocratie et la mise à terme du mal de nos institutions, les putschs.

Et si dans un élan radical Sidioca renonce, de son plein gré sans aucune contrainte, à ses fonctions en démissionnant, cela n’empêche nullement la continuité de la légalité et de la légitimité démocratique par la mise en œuvre des articles 40 et 41 de la constitution en vigueur de la République Islamique de Mauritanie :

ARTICLE 40 : En cas de vacance ou d'empêchement déclaré définitif par le Conseil Constitutionnel, le Président du Sénat assure l'Intérim du Président de la République pour l'expédition des affaires courantes. Le Premier Ministre et les membres du Gouvernement, considérés comme démissionnaires, assurent l'expédition des affaires courantes. Le Président intérimaire ne peut mettre fin à leurs fonctions. Il ne peut saisir le peuple par voie de référendum ni dissoudre l'Assemblée Nationale. L'élection du nouveau Président de la République a lieu, sauf cas de force majeure constaté par le Conseil Constitutionnel dans les trois (3) mois à partir de la constatation de la vacance ou de l'empêchement définitif. Pendant la période d'intérim, aucune modification constitutionnelle ne peut intervenir ni par voie référendaire ni par voie parlementaire.
-
ARTICLE 41 : Le Conseil Constitutionnel, pour constater la vacance ou l'empêchement définitif, est saisi soit par :

- le Président de la République
- le Président de l'Assemblée Nationale
- le Premier Ministre.

La légalité toujours, c’est ce que nous défendons. En dehors de la violence, du fait accompli et du piétinement de la volonté du peuple.

Ainsi donc nous ne défendons pas une personne, nous défendons une institution. Les personnes étant éphémères, seules les nations sont durables.

Pr ELY Mustapha

dimanche 19 octobre 2008

Le putsch du 6 août 2008


Un coup d’Etat bénéfique

En trente ans, et suite aux coups d’Etats successifs, la société mauritanienne a subi des transformations qui, imperceptiblement, ont dénaturé cette société qui cultivait des valeurs éternelles (I). Mais aussi paradoxal que cela puisse paraître, le dernier coup d’Etat du 6 août 2008 lui fit bénéfique (II)

I- Ce qui advint de la société mauritanienne

La société mauritanienne était bâtie sur une universalité de codes éthiques et de valeurs sociales qui lui donnaient sa dimension de respect et de tolérance. Celle où l’on ne pouvait regarder dans les yeux les grandes personnes, celle où l’on devait courber la tête quand toute personne aux cheveux grisonnants nous adressait la parole, celle où l’on mettait le petit doigt sur le bord de l’assiette de repas commun pour ne pas importuner les invités. Celle où l’on ne pouvait élever la voix en présence des parents et des grandes personnes, celle ou l’on se devait d’être bon, sage et meilleur en tout. Non pas seulement pour soi mais aussi pour sa famille et pour son pays. Il y avait dans cette société une fierté et une dignité qui prenaient leurs sources non pas dans l’appropriation matérielle, mais dans la possession de l’éducation et du savoir. Cadres et repères de l’homme en société.

Cette société dans laquelle l’on sacralisait la relation humaine où tous ceux qui tournaient autour de nous étaient notre famille, pourvu qu’ils aient foulé le sol de la maison familiale, prié avec les parents à la mosquée, partagé un bureau de travail ou habité le voisinage. Cette société où la parole était d’or et où l’attachement se faisait plus à la personne elle-même, à son origine, à son savoir, à son éducation qu’à ses biens et ses atours.
Une société matériellement pauvre et spirituellement gigantesque. Cette société où l’ami de la famille était aussi la famille et chacun cherchait à voir dans l’autre ce qui le grandissait. Une société où les valeurs nous venaient de contes d’autrefois ou s’entremêlaient la foi, la dignité et le courage. Une société où le courage n’ignorait pas la tolérance et la dignité le pardon.

Aujourd’hui, la société mauritanienne, s’entre-déchire autour d’une personne, d’un bien, d’une autorité, d’un pouvoir. Elle a perdu la foi qui maintenait sa cohésion et la conviction en un devenir commun. La société, a force de faire du pouvoir son centre d’intérêt et son ultime sujet, est devenue le reflet de ce pouvoir. Elle a confectionné ses attitudes, ses valeurs et son mode de vie à l’image de ce qui la préoccupe depuis des décennies : le pouvoir.

Ce n’est pas la société qui a imprimé ses valeurs au politique mais l’inverse. Entrainant ainsi une reproduction jusque dans la sphère sociale, des tensions qui l’animent et des tares qui le minent. Les dissensions, l’agressivité partisane, la corruption, le népotisme, l’inimitié, l’esprit revanchard et l’intolérance ont conquis une société entièrement assujettie au politique.

Les conséquences en sont une perte de repère pour toute une société et à travers elle sa jeunesse. Les batailles qui se livrent au sommet trouvent leur reproduction dans la violence sociale et la criminalité galopante. Le respect des anciens et des grandes personnes n’a plus de sens puisque ce sont ces personnes qui au pouvoir donnent le mauvais exemple et qui montrent les formes les plus évidentes de l’intolérance et de la cupidité.

Brassée durant des décennies par des régimes politiques entièrement extravertis ne se préoccupant que de conquérir, d’assujettir et de s’enrichir, au mépris du peuple et de sa culture, au mépris de son idéal et de ses valeurs, la société en est devenue le reflet.

Aussi tout ce que se passe actuellement au sommet de l’Etat et tout ce qui s’y est passé durant ces dernières années n’a pu trouver une réaction de rejet du profond de la société, car elle en est une fidèle reproduction. La société n’est plus le frein au rejet des valeurs, elle accompagne ce rejet, l’applaudit et l’admet. Et tous ceux qui ont conquis le pouvoir par la force savent pertinemment qu’ils peuvent compter sur l’immobilisme de cette société qui » accusera le coup » et qu’ils sauront l’associer à leurs méfaits.

Une société conditionné, préparée à l’assujettissement et dont « l’élite » cupide et intéressée, véritable courroie néfaste de transmission entre la société et le pouvoir, la mettra dans l’escarcelle de ce dernier. Une élite participant à l’instrumentalisation politique d’une société sans repères et sans idéal.

Voilà pourquoi ceux qui usent de la violence pour conquérir le pouvoir, bafouer la société ; ses valeurs et son idéal le font parce qu’ils savent qu’ils trouveront toujours dans cette société ceux qui l’aideront à l’assujettir.

Cette société est-elle donc arrivée à un point de non-retour ?

Cette société a-t-elle définitivement pris les traits de ceux qui la gouvernent par la violence, la cupidité et l’égoïsme depuis plus de trente ans ?

Cette société est elle réactivement morte pour tolérer toutes les violences qu’on lui fait depuis tant d’années à travers des putschs successifs hypothéquant sa volonté, son développement et son devenir ?

Cette société est–elle définitivement classable dans les rayons de l’ethnographie sous l’étiquette : « société détruite par absorption de son énergie vitale par un pouvoir parasite » ?
Heureusement l’espoir est permis pour que cela ne soit pas le cas et voici pourquoi.

II- Les bienfaits d’un coup d’Etat

Outre qu’une société imbue de culture millénaire et de valeurs islamiques pourra toujours résister à l’invasion barbare, la société mauritanienne vient de réagir de façon remarquable au dernier putsch. Elle a réagit à l’invasion, politiquement hégémonique, qui détruit les croyances et les espoirs d’existence.

En effet, si le putsch du 6 août 2008 a révélé quelque chose, c’est bien que la société mauritanienne a pu réagir à la violence et à la confiscation de son avenir.

En effet, pour la première fois, depuis 1978, date du premier coup d’Etat en Mauritanie, la société mauritanienne exprime son désaccord face aux putschs et à ceux qui le réalisent.

Pour la première fois la société mauritanienne n’applaudit pas dans un élan d’ensemble.

Et pour la première fois une résistance organisée s’est mise en place pour réfuter ce mal qui a miné depuis plus de trente ans la Mauritanie, son avenir et qui confisque son développement.

C’est en cela que le putsch du 6 Août 2008, constitue une date charnière dans l’évolution de la société mauritanienne.
Une société qui a pu dire « Non » est une société porteuse d’espoir.

Une société qui depuis trente années a été forcée à dire « oui » en tout et à toutes les occasions, vient de dire « Non » Et ce « Non » est précieux a plus d’un titre.

C’est un « Non » à la violence, à la confiscation du pouvoir.
C’est un « Non » au diktat de la force d’où qu’elle vienne.
C’est un « Non » qui désormais prévaudra à la perpétuation de toute volonté de recommencer à user de la force.

En cela le coup d’Etat du 6 Août 2008 a eu des conséquences que ceux qui l’on perpétré ne prévoyaient pas. Et leur surprise fut grande quand les scénarii qui ont jalonné leurs putschs précédents ne furent pas reconduits à l’identique.

Et si aujourd’hui les putschistes savent qu’ils ne resteront pas au pouvoir, que leur acte est condamné par tous y compris la communauté internationale, c’est bien parce que de tels actes ne leurs sont plus permis car ils ne retrouveront plus dans la société le soutien de leurs forfaits. Ni ne se feront accepter pour et par leur violences. Tout comme ceux qui leurs servent de courroie de transmission pour assujettir le peuple.

Le coup d’Etat du 6 Août 2008, a rendu service à la nation en la sortant de son laxisme et de sa torpeur dans lesquels le régime précédant l’a plongée. Il a déclenché une résistance que plus rien désormais ne saurait arrêter et qui aura raison de tous les actes de violence contre la société dans le futur. La société mauritanienne vient d’expérimenter pour la première fois la résistance à l’oppression. Et c’est bien comme cela que les nations libres ont inauguré leur liberté.

En effet, au-delà des régimes précédents, au-delà du régime que chacun veut rétablir, il est un acquis que nul ne saura désormais nier: plus rien ne sera comme avant.

Et la société pour ses valeurs, et le devenir de ses institutions, n’en sortira que grandie.

Pr ELY Mustapha