vendredi 9 avril 2010

Contre l'extraversion de la Nation

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Manifeste pour la Mauritanité

La Mauritanie est un pays extraverti qui regarde vers des pays qui ne regardent pas vers lui. Pris dans son songe d'arabité, d'africanité,  de berbérité (et que sait-on encore ?), il s'oublie pour aller  pourfendre des rêves-moulins à vent. La Mauritanie, un pays-Don  quichotte.

Rappelons-nous en 2007, si les chefs d'Etats des pays arabes ne se sont pas déplacés pour  l'investiture du président de la République mauritanien, c'est que pour eux la Mauritanie n'est rien d'autre qu'un arrière-pays, sous développé. Un grenier pour demain auquel on miroite un avenir commun qui n'a de commun que ce que l'on veut en faire.
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De ce qui se dit tout haut (de hasseinein heykal à Gueddafi) à ce qui se dit tout bas (et que nous présumons bien), la Mauritanie est un  pays qui, pour le monde arabe, est une contrée éloignée de tribus et d'ethnies en transhumance qui vivent encore au temps de leurs ancêtres. Elle n'intéresse ses frères arabes que le temps d'un investissement, d'un soutien au sein d'une organisation  internationale ou d'une acclamation quelconque qui ne lui profite jamais.

La Mauritanie n'entre dans les préoccupations d'aucun des pays du  Maghreb et encore moins du Machrek. Elle est tolérée pour ce qu'elle peut apporter matériellement à ces pays mais elle n'est acceptée que dans le discours.

Alors, que la Mauritanie s'érige en donneuse de leçon de Démocratie, cela est intolérable.

C'est intolérable parce que justement dans la stratégie de ces pays,  elle compte pour des prunes. Disons-le sans détours, la Mauritanie est orpheline de son arabité qu'elle poursuit à perdre haleine.

C'est pourquoi nous avions appelé dans un livre largement distribué  pour demain ») à ce que la Mauritanie prenne en main sa destinée  par elle-même et qu'elle construise son avenir sans compter sur aucun  autre pays qu'elle-même. C'est en enracinant sa mauritanité qu'elle  aura sa place dans le concert du monde arabe et africain.

Hélas, le Mauritanien ne sent pas mauritanien au sens ou le Tunisien se sent tunisien ou l'Egyptien se sent egyptien…. Le Mauritanien vit  encore une arabité et une africanité qui contrairement à ce qu'elles  devraient lui apporter le déracinent. Le Mauritanien n'a pas tiré de  ces deux richesses, une Mauritanité, une unicité une identité qui  fait sa spécificité, il vit indéfiniment le supplice de  l'écartèlement culturel.

Tant que l'Etat Mauritanien n'a pas développé cette « Mauritanité »  nécessaire pour la construction d'un pays en tirant l'identité du  Mauritanien de son propre espace socioculturel (arabo-bérbéro- africain) et en faisant une spécificité qui l'identifie par rapport aux autres pays, il n' y'aura jamais de Mauritanie.

En regardant le drapeau mauritanien, nos enfants devront un jour pouvoir se dire « je suis Mauritanien ».
Non pas au sens fragile et culturellement dévoyé qui prévaut dans  les esprits d'aujourd'hui. Mais dans le sens où « je suis  mauritanien » signifie, mon pays c'est la Mauritanie, ma culture est mauritanienne, mon territoire se situe entre les 15èmes et 17èmes degrés de latitude Nord et les 5èmes et 7èmes degrés de longitude  Ouest, mon Etat est mauritanien. Je fais partie d'un ensemble naturel arabe et africain qui m'a servi une part de mon identité historique, mais je suis avant tout « Mauritanien ».

Et je mettrai ce pays au devant de tous les autres ; à l'image de ce que tous les autres Etats (arabes et africains) font de leurs pays.
L'intégration continentale, régionale, sous-régional sont des  préoccupations de peuples consentants et de nations démocratiques,  j'y adhère mais avec mon identité et mes spécificités.

Mauritanien d'abord, arabo-africain ensuite. C'est dans cet ordre que l'on devra concevoir les choses et c'est ainsi que les dirigeants arabes et africains initient leurs peuples.
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Un peuple qui n'a pas une identité et qui poursuit des chimères ne  pourra jamais accéder à un avenir radieux. Car pendant que ses  enfants se cherchent une identité pour que demain ils aient une  nation, une patrie, l'Etat se cherche encore dans des espaces  maghrébin, arabes, africains au mépris du besoin du peuple d'être lui-même, de maîtriser son destin culturel par lui-même.
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Or qu'on se le dise, ni les pays arabes ni les pays maghrébins, ne  voudront (même au nom de la fraternité) dans leur rang d'un maillon  faible. Identitairement, économiquement et socialement faible.

En somme, le Mauritanien devrait se regarder car son avenir demain, au-delà des regroupements continentaux ou régionaux, c'est son  identité. Celle par laquelle, il reconnaîtra son frère mauritanien.
Son frère qu'il saura identifier dans la multitude des peuples. Et avec lequel, il construit un pays appelé Mauritanie et dans lequel tous les deux ils se retrouvent.

La « mauritanité » en tant qu'identité, n'est cependant ni  nationalisme, ni isolement, ni refus du dialogue culturel.

La mauritanité c'est de se savoir appartenir à un groupe d'hommes et de femmes qui  partagent une culture commune que leurs ancêtres  ont forgée par eux-mêmes sur un territoire spécifique au cours des  siècles et qui n'envie rien à celle des autres peuples. Qu'elle leur  est égale et qu'ils défendront contre toute volonté de la dissoudre  dans un espace géographique quelconque ou de la réduire à une  dépendance d'un espace géopolitique ou géostratégique quelconque.
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La « mauritanité » est aussi une dynamique respectueuse des volontés  des peuples de se regrouper pour un avenir commun (à toutes échelles continentale, régionale ou sous régionale) mais elle est l'unique  rempart contre le sacrifice du peuple mauritanien aux intérêts  quelconque d'une nation, d'un Etat ou d'un regroupement proche ou lointain.

L'identité mauritanienne c'est la mise en œuvre du « dialogue des  civilisations » pour un avenir commun dont le dénominateur n'est autre que la « mauritanité» d'abord et en fin.

Pr ELY Mustapha.
 2007

1 commentaire:

  1. Nous avons raté le coche et pourtant c'était bel et bien une vocation que de construire un état basé sur la citoyenneté. Ceux qui doutaient de leur identité ou qui se voyaient en manque de reconnaissance dans leur volonté d'affirmation identitaire ont plongé le pays dans cette cacophonie identitaire.
    Ceux, qui n'avaient pas ce problème eux, ont fait les frais de leur inertie face à cette fuite en avant. il est peut-être encore grand temps de se ressaisir. le sud attend les boutiquiers, le sud accueille encore les boutiquiers. Elle a volé en éclat notre vocation à être un trait d'union et donc forcement une nation et des citoyens jouissant de tous leurs droits civils et politiques.
    Cher professeur nous avons raté le coche.
    En attendant le prochain veillons à préparer nos voyageurs pour un meilleur partage des sièges l'aventure ne pourrait qu'en être plus facilité.
    Si ce discours avait été tenu depuis la bataille pour la reconnaissance aux nations unis où seule la Tunisie était de notre bord nous nous serions peut-être mieux portés aujourd'hui.
    Première participation à une réunion de la ligue arabe 1969, Reconnaissance effective de la ligue 1973. Combien d'énergies perdues ? Combien d'opportunités ratées ? Trois millions d'âmes bien organisés avec leurs ressources bien valorisées par de véritables citoyens auraient pu servir de courroie entre le Maghreb Arabe et l'Afrique sub-saharienne. Que n'aurait put être la Mauritanie si notre énergie et notre patrimoine culturel dans sa diversité avaient été canalisés et exploités à des fin citoyenne et à sa vocation de trait d'union ?
    Il est peut-être encore temps de se ressaisir.
    Réglons les pré requis (justice, vérité, réconciliation, introspection ) et c'est encore possible.
    Merci cher professeur que tu sois entendu et la Mauritanie revienne à elle même.

    Djibril BA

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Pr ELY Mustapha