mardi 31 mai 2016

Stratégie de Croissance Accélérée et de Prospérité Partagée (SCAPP) ou « Stratégie de concussion accélérée et de Pillage public (SCAPP) » ?



Quelle croissance, Quelle prospérité ?

Il y a de concepts économiques d’une ineptie telle qu’ils n’engagent que ceux qui les promeuvent. Il en est ainsi de la « Stratégie de Croissance Accélérée et de Prospérité Partagée (SCAPP) », adoptée par le conseil des ministres du 17 septembre 2015 et dont l’actuel gouvernement a fait tout un plat- programme.

La SCAPP est présentée comme le  « nouveau référentiel sur lequel le gouvernement va bâtir la politique de développement pour la période 2016/2030, sur la base des Objectifs de Développement Durables (ODD), adoptés par l’Assemblée Générale des Nations Unies (ONU) en septembre 2016, et de l’Agenda 2063 de l’Union Africaine (UA). »

Elle est, pompeusement, présentée à l’échelle nationale comme étant le résultat d’une évaluation globale et indépendante des trois plans d'action successifs du Cadre Stratégique de Lutte contre la Pauvreté, elle est censée s’étendre sur l’horizon 2016-2030.

Comme le ridicule ne tuant pas, le gouvernement ne présente nulle part aupeuple le résultat de « l’évaluation globale et indépendante » des trois plans d'actions successifs du Cadre Stratégique de Lutte contre la Pauvreté.  Pire encore, il ne fournit aucune définition de la croissance, pour pouvoir prétendre à une croissance accélérée !

Comme chacun sait, et n’en déplaise aux institutions de Bretton Woods qui mènent notre gouvernement (et ceux passifs du reste du monde) par le bout du nez, la croissance en Mauritanie est nulle. Or le Zéro étant un élément absorbant de la multiplication, une croissance nulle ne saurait accélérer... le développement économique et social du pays. 

En fait, cette « Stratégie de Croissance Accélérée et de Prospérité Partagée (SCAPP) », ne serait encore qu’un énième mécanisme pour « piéger », à travers les déclarations d’intention de gouvernements mauritaniens successifs, les capitaux (nationaux et étrangers) et ceux issus de l’emprunt et de l’aide internationaux dans les sables mouvants de la mauvaise gestion, la gabegie et les détournements des biens publics dont les médias font chaque jour échos.
La SCAPP, c’est davantage une « Stratégie de concussion accélérée et de Pillage public » et cela sur le long terme...jusqu’en 2030 !

Elle ne saurait être que cela, car voyons le ridicule des deux composantes de cette stratégie, non pas prises dans l’absolue, mais appliquée au cas mauritanien :

-          - Croissance accélérée
-        -   Prospérité partagée

I-                    La Croissance accélérée : accélération du vide.

 S’inscrivant dans l’économie, la Stratégie de croissance accélérée (SCA) a pour objectif premier d’accroître le rythme de la croissance économique pour que puisse en bénéficier les pauvres. Cependant cette stratégie ne saurait se départir de la relation économique fondamentale entre :

-           la croissance économique, elle-même (1) ,
-          la réduction de la pauvreté, sa finalité (2),
-          et la distribution de revenus qui est son indicateur principal (3).

Or, en Mauritanie, ces points cardinaux économiques de la stratégie sont déjà viciés à la base.

1-      1.   La croissance économique. 

Pour qu’il y ait croissance accélérée, il faut qu’il y ait eu croissance tout court. Ce qui n’est pas une réalité.
La Stratégie de croissance « accélérée », est corrompue à la base puisque les chiffres officiels de la croissance économiques sont faux et ceux, à deux chiffres, fournis par le FMI le sont encore d’autant puisque basés sur des éléments de définition de la croissance économique totalement erronés. D’ailleurs, les déclarations en « yoyo » du FMI relatives à la croissance en Mauritanie sont l’expression même de cette mascarade.

« La croissance économique devrait ralentir à environ 4,5 % pendant 2015 dans un contexte caractérisé par la maîtrise de d’inflation... » (Déclaration de la mission FMI en juin 2015),

Puis nouvelle déclaration : « La croissance s’est décélérée pour se situer à environ 2 % en 2015 en raison de la baisse de l’activité minière et du ralentissement de l’activité dans la construction et la pêche à cause d’effets de base, et devrait rebondir à 4,1 % en 2016. »


De quelle croissance s'agit-il ?


La Mauritanie n'a aucune industrie qui exporte un produit national compétitif et générateur d'emploi et de revenus, la Mauritanie ne produit rien technologiquement qui vaille la peine d'être exporté. Et pourtant le taux de croissance est estimé à deux chiffres !

Voilà la désinformation qui s'inscrit dans d'autres désinformations dont les "chiffreurs" de notre économie ont fait une gymnastique politique.

Depuis les fameux chiffres "falsifiés" livrés au FMI (qui nous ont coûté des centaines de millions de dollars du fait du report de six mois de l'effacement de la dette) le plus grand mensonge actuel fut celui de la croissance à deux chiffres, et l’énorme mensonge à venir est celui de « la croissance accélérée »

Si la croissance économique résulte de la production totale de tous les biens et services d’un pays au cours d’une période donnée, alors on comprendra qu'en Mauritanie la croissance est bien nulle à défaut d’être négative ; car où sont les biens et services qui en Mauritanie engendreraient une telle croissance à deux chiffres ?


En fait ce chiffre est trompeur et porte sur la croissance au sens de "l’expansion du revenu national", c’est-à-dire ce "fourre-tout" dans lequel on fait figurer le revenu de la Nation qu’elle que soit sa provenance !

Et le revenu national mauritanien provient des entrées de l’extraction de ressources naturelles, exploitées à outrance (ressources minières et halieutiques) par lesquelles on gonfle les chiffres de la croissance.

La croissance sur laquelle nos « géniaux décideurs » veulent bâtir leur stratégie est ainsi celle du "revenu national" provenant des entrées de l’extraction de ressources naturelles, exploitées à outrance (ressources minières et halieutiques) par lesquelles les chiffres de la croissance sont dénaturés.

« En 2015, la croissance de Mauritanie a décéléré pour se situer à environ 2 % en raison de la baisse de l’activité minière et du ralentissement de l’activité dans la construction et la pêche. » (Mission FMI mai-juin 2015)

 Cette croissance-là est une fausse croissance exprimant l’évolution d’un Revenu National, aléatoire et fluctuant (puisque indexé sur les matières premières) et non pas des performances, en terme de production de biens et services industriels et commerciaux de l’économie nationale !


En effet, la « croissance économique », telle qu’elle est présentée officiellement, ne mesure que la variation quantitative d’un agrégat économique, elle n’est donc pas synonyme de développement. Les taux de croissance affichés ne sont que ceux du revenu national (rente nationale).

La vraie croissance économique doit résulter de la somme des valeurs ajoutées des unités économiques du pays et qui s'exprimeraient par des variations du Produit Intérieur Brut (PIB) réel (corrigé de l'inflation) ou nominal (exprimant la valeur marchande des biens et des services produits par un pays.). La vraie croissance repose sur la fonction de production et non pas d'accumulation de revenu national (issu de la rente).

La vraie croissance économique traduit la variation quantitative, durable, auto-entretenue et non réversible de la production de biens et services.
 La fausse croissance en Mauritanie traduit la variation quantitative non durable, auto-entretenue et réversible d'un revenu national (d'une rente pétrolière et autre) au profit d'une minorité qui a depuis longtemps (et depuis toujours) planifié son détournement au détriment du développement.

La Stratégie de Croissance Accélérée n’a donc point de sens sinon accélérer le pillage des ressources qu’au nom de cette stratégie, les pouvoirs publics entendent drainer à travers les capitaux publics et privés.

On comprend davantage la dimension du ridicule qui frappe les pouvoirs publics mauritaniens à travers l’objectif fixée à la SCAPP : « S’inscrivant dans l’économie, la Stratégie de croissance accélérée (SCA) a pour objectif premier d’accroître le rythme de la croissance économique pour que puisse en bénéficier les pauvres. »

Ainsi l’instrument de répartition des richesses n’est autre que « l’accroissement du rythme de la croissance économique » ! On comprend l’ineptie de cet objectif.
En effet, la croissance économique mauritanienne étant le résidu de l’exploitation des ressources naturelles, l’accroissement du rythme de la croissance économique, serait une surexploitation de ces richesses du sol et de la mer avec les conséquences incalculables sur le pays, son environnement et sur l’appauvrissement des générations futures.


2 2.  La réduction de la pauvreté

L’Etat mauritanien ne met en œuvre aucun plan de développement économique et social appuyant sa politique socio-économique à long terme. Il navigue à vue par tâtonnements successifs au gré d’orientations politiques dont l’objectif est davantage de (mal) dépenser que de concrétiser une vision économique de réduction de la pauvreté.

La conception des pouvoirs publics mauritaniens visant la « réduction de la pauvreté » est d’une étroitesse telle qu’elle n’indexe que «la pauvreté monétaire ».

Le caractère pluridimensionnel de la pauvreté est loin d’être pris en compte. La pauvreté n’est pas simplement monétaire elle est liée aux infrastructures publiques, à l’alphabétisation et la scolarisation, à la santé et à l’emploi. La réduction de la pauvreté passe par l’amélioration structurelle des conditions de vie (habitat, assainissement, voirie, services publics, sécurité...)

Aucune réduction de la pauvreté ne peut se faire par une simple augmentation du revenu « per capita » si elle n’est pas accompagnée de l’environnement institutionnel propice à l’épargne et  à l’investissement ;  par le contrôle économique et social et la mise en œuvre de politiques financières et monétaires  capable de « gérer » l’inflation pour la stabilisation   le pouvoir d’achat des ménages et  la compétitivité des unités économiques de production.

Cela, malgré les déclarations officielles ne s’est jamais réalisé.

Ce qui n’a pu se faire durant tant d’années à travers  tous les  plans et stratégies déjà adoptés , exécutés et devenus caducs, ne se fera pas de façon accélérée sur 15 ans !

La pauvreté est toujours là, elle a même empiré alors que la Mauritanie a reçu les flots de financement de toute nature durant  la période 2001 à 2015 au titre du Cadre stratégique de Lutte Contre la Pauvreté (CSLP), soutenant les projets couverts par le programme économique et social, approuvé par le Club de Paris.

15 ans d’une stratégie de lutte contre la pauvreté qui ne furent que 15 ans d’une période de gabegie où les ressources mal utilisées, détournées ou tout simplement rappelées par  l’investisseur du fait de l’incapacité de l’administration mauritanienne à pouvoir les utiliser  (incompétence, absence  de ressources humaines qualifiées, d’expertise et de savoir-faire.).

L’administration mauritanienne est elle-même gérée dans l’incompétence, elle est pauvre en moyens et en qualifications, elle ne saurait donc être le vecteur crédible de   mise en œuvre de quelque stratégie qu’elle soit appelant la compétence, l’éthique,   le professionnalisme et la transparence des méthodes et des procédures de la gestion des ressources publiques (du simple contrat de services aux grands marchés publics) .

Pourtant les bailleurs de fonds, connaissent pertinemment de telles incapacités et une évaluation du dernier du Cadre stratégique de Lutte Contre la Pauvreté (CSLP), est déjà une image cinglante de ce que sera la Stratégie accélérée de croissance et de Prospérité partagée sera : un échec annoncé et un sous-développement encore plus criant ...en 2030 !


La stratégie de « croissance accélérée » médiatisée par le gouvernement mauritanien n’est qu’un leurre. Elle n’est d’ailleurs qu’une pâle copie de celle prônée déjà au Sénégal avec ce que ce dernier pays a comme atouts institutionnels et socio-économiques que la Mauritanie ne possède pas.

Et même dans ce pays il a été démontré que,  par certains de ces aspects, la stratégie de croissance accélérée « n’est pas pro-pauvres » et qu’elle contribue (par l’analyse  de  la  courbe  d’incidence  de  la  croissance  et  du  calcul  des différents  indices  de  croissance  pro-pauvre)  à « accroître le revenu annuel moyen par tête des non pauvres, de façon plus que proportionnelle que celui des pauvres ».  (François Joseph Cabral . La Stratégie de croissance accélérée du Sénégal est-elle pro-pauvre ? Cahier de recherche / Working Paper 09-05 - Groupe de Recherche en Économie et Développement International. Université de Sherbrooke).


3. La distribution de revenus


Depuis des décennies, la majorité de la population souffre de misère et l'infrastructure publique est un champ délabré au milieu des détritus et des immondices qui couvrent les rues et les avenues ?

Les rues sont peuplées d'enfants et de vieillards mendiants ; les hôpitaux sont des cimetières à ciel ouvert, le parc automobile national du transport est un ramassis de carcasses rouillées qui sentent la mort à plein nez.

Où sont passés les bénéfices de la croissance mauritanienne à deux chiffres ?

Pour qu’il y ait partage, il faut qu’il y ait prospérité. Et cette dernière est l’apanage d’une minorité qui détient 95 % des ressources nationales et des moyens de production.

Dans une ultime perspective, la « Stratégie de Croissance Accélérée et de Prospérité Partagée », est un aveu d’échec et un vouloir de consécration d’une ère post-ajustement. Ajustements par lesquels les institutions de Bretton Woods ont appauvri des peuples entiers en justifiant le mal-acquis de leurs gouvernants.
Voir à ce propos la lettre que j’avais adressée à la directrice du FMI (http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/lettre-ouverte-a-madame-christine-116932)


Pourquoi un pays qui compte un peu plus de 3 millions d'habitants qui dispose d'énormes ressources naturelles (le pétrole, le gaz, la pêche, le fer, le cuivre) et de bien d'autres richesses encore (découvertes ou à découvrir), dont la dette extérieure fut à certaine époque  épongée, ne peut-il se développer ?

Comment peut-on croître sans grandir ? Comment une croissance affichée ne se traduit pas en richesses nationales distribuées ou en infrastructures partagées ?

Cette situation de pauvreté de la population s’explique simplement par le fait que jamais le revenu national n’est distribué, il fait l’objet de politiques de gestion non concertées au profit d’une oligarchie, dont les accointances avec le pouvoir et son instrument l’administration publique, sont l’essence même de la mécanique du favoritisme, de la corruption et des détournement des biens publics.
La stratégie de « croissance accélérée », ne fera qu’accélérer cet état de fait, car le pillage sera à la dimension des ressources financières reçues des bailleurs de fonds  au titre du pseudo-partage de la prospérité.

II-                 Prospérité partagée : le mensonge en partage


Membre du FMI depuis 1963,  la coopération financière de la Mauritanie avec cette institution est ancienne. Elle est même antérieure au programme d’ajustement structurel de 1985.

En 1979, la Mauritanie avait déjà bénéficié de l’assistance du FMI à l’ occasion de son programme de redressement économique. Le plan de redressement économique et financier (PREF), le Plan de consolidation et de relance (PCR) asseyaient déjà la philosophie des Plans d’investissements publics (PIP) et la grande saga des cadres de lutte contre la pauvreté (CSLP), des Cadres des dépenses budgétaires à moyen termes (CDMT)et autres Budget consolidés d’investissement (BCI).

L’ajustement structurel démarra effectivement en 1985, avec son défilé de missions du FMI et ses financements. Le FMI, devînt une manne pour les autorités mauritaniennes qui, au-delà d’un semblant d’ajustement structurel (dont on mesure aujourd’hui, après plus de 30 ans d’application, les résultats !), affina la stratégie d’autorités publiques corrompues et budgétivores à se spécialiser dans l’utilisation des mécanismes de l’endettement pour « pomper » les moyens du FMI.


Ainsi pour mieux bénéficier des avantages d’un tel système la Mauritanie déclara son éligibilité à tous les mécanismes de la pauvreté internationale. Ses dirigeants la déclarèrent parmi les PMA (les pays les moins avancés), puis pour encore mieux bénéficier d’un régime plus favorable, ils déclarèrent la Mauritanie PPTE (Pays Pauvres Très Endettés).


Mais qu’a tiré la Mauritanie de mendicité internationale ?

Le déficit budgétaire s’est-il résorbé ? Nos entreprises sont-elles devenues plus compétitives ? Notre tissu industriel est-il devenu une référence ? Nos infrastructures portuaire et routière sont-elles un exemple du genre ? …. Et pourtant à chaque mission du FMI, on annonce une croissance économique (rarement en deçà de 4%), un progrès dans le rétablissement des équilibres macroéconomiques, alors que notre balance des paiements est plus que jamais déficitaires et que l’endettement s’accroît. Le chômage est plus qu’inquiétant et le pouvoir d’achat des citoyens rivalise avec le niveau de la mer. Bien que d'ailleurs, suite à la fonte des glaces, le niveau de la mer monte... alors que le niveau de vie du citoyen baisse suite à la contraction du patrimoine national... un réchauffement climatique, un gel économique.

 Plus de 30 d’ajustement structurel et nous sommes encore pauvres parmi les pauvres et pourtant la mission du FMI vient de nous dire « que les indicateurs de performances sont satisfaisants ». La seule chose que nous ne savons pas encore c’est pour qui profite la performance et la croissance ?

Depuis 30 ans que la Mauritanie tire des Droits de tirage spéciaux, DTS (unité de compte du FMI), elle n’arrive plus à lâcher cette mamelle. Et le FMI n’arrivant pas à la sevrer est pris au piège d’un pays dont les problèmes résident moins dans le besoin d’assistance que dans l’intégrité morale des hommes qui l’ont dirigé.


La Mauritanie est aujourd’hui endettée à 93% de son PIB et elle veut mettre en œuvre une stratégie de croissance accélérée « post-ajustement » pour générer la prospérité !

Il ne fait pas de doute que cette « croissance accélérée » engendre encore un endettement accéléré (vu le mode de financement). Le ratio richesse/endettement ira certainement en s’aggravant, puisque les intérêts de la dette se capitalisent et son principal est dû d’avance ; et puisque la « croissance » va s’accélérer (au sens de l’accélération de l’exploitation de ressources naturelles non renouvelables), on comprend donc qu’il n’y aura, à terme, aucune prospérité à partager, mais des générations futures appauvries par un tarissement des ressources naturelles et une destruction de l’environnement naturel.

Stratégie de Croissance Accélérée et de Prospérité Partagée (SCAPP) ou « Stratégie de concussion accélérée et de Pillage public (SCAPP) ?

Dans 15 ans, ceux qui la mettront en œuvre ne seront pas là pour rendre compte de leur gestion. Ils auront disparu, avec leurs pactoles, comme aura disparu tout espoir d’un avenir meilleur pour un peuple, trompé par ses gouvernants d’hier et d’aujourd’hui avec le soutien cynique d’institutions financières internationales et la bénédiction d’Etats « amis » qui, au nom de leurs intérêts propres, le laissent saigner au nom de stratégies qui ne disent par leur nom.

Pr ELY Mustapha

jeudi 26 mai 2016

Une opposition qui dialogue n’est pas une opposition.



Appelez-là ce qu’il vous conviendra de l’appeler : juxtaposition, transposition, permutation, interversion, inversion...mais ne l’appelez pas opposition. Cette opposition qui recherche ou qui va au dialogue avec le pouvoir est le pire des maux que la Mauritanie puisse subir. S’opposer à cette opposition-là est le premier devoir de tout citoyen concerné par l’avenir politique de son pays.

Une opposition s’organise, collecte ses moyens matériels et financiers prépare son programme politique, le vulgarise, rencontre ses militants, génère des alliances, déploie son énergie à rassembler une opinion qui lui soit favorable, en d’autres termes prépare avec militantisme sa participation aux prochaines élections.

Mais une opposition toute tournée vers la contemplation du pouvoir et attendant de son détenteur qu’il l’apostrophe, est un réceptacle d’une misère partisane tendant sa gamelle pour y recueillir les postillons d’un dialogue qui est devenu tout son programme.
Le devoir de tout Mauritanien, est de ne pas intégrer cette opposition-là mais plutôt de la fuir comme une peste institutionnelle. Si aujourd’hui, Aziz piétine tout un peuple et accapare le pouvoir ce fut et c’est toujours à cause de cette opposition-là.

Vivant sur les relents d’un accord de Dakar mort-né, croyant qu’elle a encore un poids dans les institutions de l’Etat, pour mener Aziz vers quelques concessions,  l’opposition s’est gourée et continue de l’être.

Elle réclame une réponse écrite, mieux encore un engagement écrit d’Aziz sur les points de discorde qu’elle lui a fait parvenir et conditions du dialogue.... Opposition du ridicule. 

Aziz n’a pas demandé à l’opposition son avis en prenant de force le pouvoir, il ne lui a pas non plus demandé de s’exprimer en se faisant « légaliser » par les urnes. L’opposition ne sert à rien pour Aziz et Aziz le sait.

Ce qui sert Aziz c’est qu’elle continue à saliver, comme un cabot attendant un os, en lui miroitant le dialogue. Le dialogue, c’est pour Aziz, un instrument machiavélique. Il l’avance quand sa mauvaise foi l’y pousse et il le retire chaque de fois que l’opposition y croit.  
Cette opposition-là, fait le jeu du pouvoir. Et c’est en cela qu’elle est dangereuse. Elle est composée de groupes d’individus, sous-fifres, qui constituent une sorte de courroie de transmission avec le pouvoir. Ce sont ces groupes-là qui constituent les « poignées » dont se saisit le Pouvoir pour appâter l’opposition.
Ces « poignées » sont composées de dirigeants aigris par le pouvoir et qui ne savent plus comment y accéder, mais aussi d’individus membres qui « monnayent » leur participation au pouvoir et qui émulent au sein de l’opposition une espèce de « psychose » du dialogue où le délire de l’intéressement matériel n’est pas absent.
Toujours est-il que cette opposition intéressée au dialogue, est le dindon de la farce.


Rappelons-nous que si le pays en est arrivé là, c’est à cause de l’opposition. Si aujourd’hui Ould Abdel Aziz est au pouvoir, c’est à cause de l’opposition. L’opposition juillettiste n’a donc que ce qu'elle a semé.

Cette opposition-là qui s’est précipitée pour négocier à Dakar la réédition d’un président élu, n’a aujourd’hui que ce qu’elle mérite. En Mauritanie, le peuple n’a pas seulement les gouvernants qu’il mérite il a aussi l’opposition qu’il mérite. Et c’est à cause de cette opposition-là, ses dissensions internes, son opportunisme et sa course en rangs dispersés à la présidence lors des dernières élections, que le pays et aujourd’hui ainsi gouverné. 

Une opposition qui dialogue, pour pérenniser sa forfaiture, n’est pas une opposition.

Pr ELY Mustapha