mardi 28 juin 2011

Cynisme politique d’une opposition instrument du pouvoir.

 

Après le goudron, la (dé)route.

dangergeneral-f« Le président de l’Assemblée nationale mauritanienne, Messoud Ould Boulkheir, a remis, mercredi en début de soirée, au président Mohamed Ould Abdel Aziz la feuille de route de dialogue, préparée par la Coordination de l’opposition démocratique, a constaté APA à Nouakchott. »

Information importante : la feuille de route à été remise à Aziz « en début de soirée » ! C’est bien la feuille d’une route qui commence au crépuscule. Et qui veut en fait maintenir dans l’obscurité les véritables raisons de son existence.

L’opposition sait que Aziz n a pas besoin de « dialoguer avec elle. C’est lui le maitre à bord. Il y a donc quelque chose de pas très net.

En effet, à y voir de plus près, Aziz est en train d’instrumentaliser l’opposition et cette dernière visiblement est en train de jouer le jeu.

Et ce jeu le voici :

- Le mouvement de contestation de la jeunesse qui a secoué la Mauritanie (mouvement du 25 février) a en fait été fatal pour l’opposition qui n’ayant pu le récupérer ni l’intégrer s’est vue obligée de trouver une stratégie pour le contourner. Cette stratégie est justement matérialisée par cette feuille de  « route » qui devrait « re-légitimer » l’opposition dans son rôle qu’elle ne joue plus depuis longtemps et relancer un dialogue fictif qui se base sur un accord non moins fictif : l’accord de Dakar.

- Aziz de son côté, dans une volonté de neutraliser le mouvement de la jeunesse, après que toutes les manipulations que sa majorité a voulu faire pour lui rallier des transfuges de ce mouvement n’aient pas réussies, a fait un appel du pied à l’opposition pour s’en servir contre le mouvement du 25 février et surtout neutraliser toute contestation d’autres mouvements qui pourraient en naitre.

Et comme d’habitude, une certaine opposition est en train de jouer le rôle qu’elle a toujours joué depuis 2005, œuvrer à l’encontre des intérêts du pays.

En définitive, cette feuille de « route » là, joue deux rôles :

- C’est une manière des plus cyniques de maintenir certains leaders de cette opposition dans leurs privilèges et leurs postes . En effet, Messaoud, à défaut de pouvoir rallier la «Majorité», s’est fait le facteur de l’opposition. Il faut bien qu’il s’exerce à un métier d’avenir, d’autant plus qu’il est au perchoir de l’Assemblée nationale à cause de circonstances historiques non légitimes et qu’il n y tient que grâce à Aziz. Quant à Ahmed Daddah, son statut de leader de l’opposition vaut son ralliement (d’ailleurs ne s’est-il  pas toujours rallié au plus fort depuis 2005)?

- D’autre part, cette feuille de « route » a pour rôle de museler une vraie opposition qui est en train naître à travers l’élan de la jeunesse contestataire. Et qui menace une vieille opposition qui s’est assise sur ses privilèges et sur la volonté de ses militants.

Cette feuille de « route », n’est donc en fait que le plus récent moyen trouvé par une certaine opposition pour détruire l’espoir de renouveau politique mauritanien. Renouveau de sa classe politique vieillissante intéressée et incapable de se départir de son opportunisme politique. Et encore une fois, elle sacrifie sur l’autel de ses intérêts, ceux du pays.

Quant à Aziz, il utilise cette feuille de route avec la bénédiction de l’opposition, pour entrainer la « déroute » de son véritable adversaire qui n’est pas le semblant d’opposition vieillissante qui veut « le dialogue », mais le mouvement de fond qui est en train de naitre et qui le menace autant qu’il menace « l’opposition » elle-même.

La feuille de route n’est donc en réalité qu’un accord tacite entre ceux qui veulent protéger leurs acquis en tant qu’opposants et ceux qui veulent conserver leurs intérêts que personnifie Aziz, le semblant de « majorité ».

Pr ELY Mustapha

lundi 27 juin 2011

Le supplice de la question

 

CensureSupposons un instant que vous soyez l’objet d’un recensement  civil et que  l’enquêteur vous pose  la question: “En quelle année fut brulée Jeanne D’arc?” dans le but de vérifier si vraiment vous êtes de nationalité “française”, comme vous l’affirmez. Ou encore si vous connaissiez Auschwitz, si vous êtes Allemand.

Eh bien c’est ce qui arrive en Mauritanie, dans ce pays d'Afrique de l’Ouest où se déroule un recensement de la population en vue d’établir… des pièces d’état civil. Surtout si vous êtes de race négro-africaine, vous êtes soumis au supplice de la question pour prouver que vous êtes Mauritanien. Pour établir votre “Mauritanité” vous devez répondre à des questions du genre: “parlez-vous arabe?”, “Connaissez-vous votre voisin un tel…”

Un avocat mauritanien, en l’occurrence maitre Lo Gourmo,  s’est insurgé à juste raison contre cette mascarade de recensement civil en écrivant: “J’ai honte et je proteste” contre de telles pratiques (voir ici). Négro-mauritanien, cet avocat s’est vu lui-même posé la question: “connaissez-vous un avocat untel habitant tel immeuble de Nouakchott…! “ .

Ce qui est étonnant  c’est que  si je devais moi-même me présenter à ce recensement on ne me posera jamais de question parce que je suis, par mon apparence et ma langue, un Maure. Donc forcément je suis Mauritanien. Et paradoxalement cela me fait encore plus honte que ce qui arrive à mon frère, ami de faculté et connaissance de longue date, maitre Lo Gourmo. C’est pourquoi, n’en déplaise aux autorités mauritaniennes, je ne me ferai pas recenser. Ce n’est pas l’inscription dans un registre qui fait le mauritanien. On est Mauritanien, par le droit du sang ou du sol ou les deux à la fois. Et à cela aucun recensement n y pourra rien.

Comment en est-on arrivé là. Comment accepte-t-on d’humilier les fils de ce pays? Parce qu’ils ne parlent pas l’arabe, parce qu’ils ne sont pas arabes, ni maures?

En 2001, de retour en Mauritanie, et après plusieurs années d’absence, je recherchais naturellement mes amis et surtout mes amis d’enfance. Ceux avec lesquels j’ai étudié à Nouakchott jusque dans les années soixante–dix et j’appris avec consternation que certains d’entre-eux avaient été chassés au Sénégal parce qu’ils n’étaient pas mauritaniens. Et curieusement parmi eux se trouvait un ami qui, bien que négro-mauritanien, était le meilleur en langue et en littérature arabes! C’est autant dire ma peine et celle de tous ceux qui ont été forcés de quitter leur pays parce que des illuminés pensaient qu’ils étaient bien plus mauritaniens qu’eux!

Aujourd’hui quand, en Mauritanie,  on se sert d’un recensement pour faire de l’épuration administrative sur des bases ethniques ou raciales, je ne crois plus en  ce pays. Non seulement je jette ma carte d’identité aux oubliettes, mais je m’insurge violemment contre un tel recensement, auquel ni ma conscience ni ma vision du devenir de mon pays, de la fraternité et de la concorde de ses enfants ne me pousse à participer. Et si le dernier à recenser se devait d’être vous, dîtes :”Niet! Mon frère négro-mauritanien d’abord!”.

C’est cela que devrait être la Mauritanie de la fraternité, de la justice et de l’honneur.  Tout le reste est aussi éphémère que nos dirigeants.

Pr ELY Mustapha

mercredi 22 juin 2011

De quoi vit la Mauritanie?

 

De la charité et de la vertu

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: عن المقدام رضي الله عنه عن رسول الله صلى الله عليه وسلم قال

" ما  أكل  أحد  طعاما  قط  خيرا  من  أن  يأكل  من  عمل  يده ، وإن  نبي  الله  داود  عليه  السلام  كان  يأكل  من  عمل يده"

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chariteDe l’aveu même des autorités publiques mauritaniennes, la Mauritanie “importe 70% de ce qu’elle consomme” (voir ici). Bien que ce chiffre nous semble en-deçà de la réalité, prenons-le pour tel et posons-nous la question d’où viennent les 30 % restants?

La réponse ne se fait pas attendre: de l’aide alimentaire internationale.

En effet,  pour cette année, le Ministre des affaires économiques vient de déclarer, “l’Arabie saoudite va apporter une aide de 75 millions de rials saoudiens à la Mauritanie pour sa sécurité alimentaire(voir ici). Mais les exemples de l’assistance ne manquent pas: 

“La France a alloué, en juillet dernier, pour le second semestre 2010, un financement de 500 000 euros au PAM Mauritanie en complément des 650 000 euros versés début 2010 pour contribuer à la prise en charge de la malnutrition aiguë modérée. (voir ici)

La Mauritanie a reçu jeudi des Etats Unis d’Amérique une aide alimentaire de 310 tonnes de vivres dont des huiles végétales et des lentilles.
Cette aide, d’une valeur de 273.000 dollars, a été stockée jeudi dans les magasins du Commissariat à la sécurité alimentaire à Nouakchott et sera distribuée dans le cadre des programmes de nutrition de Counterpart International. Les populations de 4 régions mauritaniennes en bénéficieront.
Elle s’ajoute à une autre cargaison de 6810 tonnes de blé américain d’une valeur de 1.371.900 dollars, réceptionnée par les autorités mauritaniennes il y a un mois. Les deux dons américains entrent dans le cadre de la subvention d’un programme quinquennal de 20 millions de dollars accordés par l’USAID Mauritanie en 2007. (
voir ici)

L’Italie va financer, pour 288 millions d’ouguiyas (environ un million de dollars), 55 microprojets et la mise en place de 65 nouveaux centres de nutrition communautaires au nord de la Mauritanie (voir ici)

Le PAM a fourni une aide alimentaire à 11 500 habitants de Rosso.  L'UNICEF collabore avec la compagnie nationale des eaux pour installer des pompes hydrauliques, tandis que le Haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR) a distribué 1 350 conteneurs d'eau.  (voir ici)

La dernière phase du programme d’aide alimentaire de l’Ambassade de France vient de s’achever avec succès. Ce programme d’aide alimentaire et de relance vivrière communautaire (PROFAREVCO), d’un montant de 500 000 €, soit plus de 180 millions d’ouguiyas, a été mis en œuvre par un consortium de trois opérateurs (GRDR, Action Contre la Faim et ECODEV), en relation avec le Commissariat à la Sécurité Alimentaire (voir ici)

Un programme d'aide alimentaire d'urgence du Secours populaire français dans la région de l'Hodh El Gharbi, cofinancé par le Centre de Crise du Ministère des Affaires Etrangères et le Ministère des Affaires Européennes, permettra la distribution de 105 tonnes de nourriture à plus de 6000 personnes  (voir ici)”

 

Les exemples sont nombreux, de cette charité internationale qui ne dit pas son nom, mais posons nous sérieusement la question , voyez-vous un pays qui se targue d’une croissance de 5,2% (voir ici notre article ) et qui importe 70% de ce qu’il consomme et vit pour le reste de la charité internationale.

En effet, un pays qui croît est un pays qui produit. Car nous le rappelons, le produit intérieur d’un pays n’est que la somme des valeurs ajoutées de ses agent économiques. Alors à 70% de dépendance du commerce  extérieur (pauvre balance commerciale, voir ici ) et à dépendance structurelle de l’aide internationale, où est la production de la Mauritanie et donc  la croissance?

Mais au-delà des considérations purement économiques, nos décideurs se sont-ils rendu compte qu’ils poursuivent un développement chimérique et que leur pays ne survit que parce qu’il tête aux mamelles de l’aide internationale (voir ici)?

Cela n’offusque-t-ils pas nos oulémas (voir ici sur nos oulémas) qui voient leur pays se nourrir à la sueur du front du “mécréant “ agriculteur” américain ou européen? Ne doivent-ils pas interdire de faire que, nous musulmans imbus de notre religion du travail et de notre fierté nous nous nourrissions au pain mal acquis?

عن المقدام رضي الله عنه عن رسول الله صلى الله عليه وسلم قال :" ما  أكل  أحد  طعاما  قط  خيرا  من  أن  يأكل  من  عمل  يده ، وإن  نبي  الله  داود  عليه  السلام  كان  يأكل  من  عمل يده

Ce blé qui nourrit nos enfants est-il le produit de la sueur du front  de leurs pères. Non.

Doit-on admettre que c’est le texan qui, loin là-bas dans son ranch, nous envoie ses excédents pour nourrir notre progéniture? Eh bien oui, qu’on l’appelle “aide internationale” ou autre, c’est toujours la sueur du front de l’autre et de son travail que l’on reçoit.

Notre prophète, que la paix éternelle soit sur lui, n’avait-il mis en garde contre la mendicité en ces termes:

"ما يزال الرجل يسأل الناس حتى يأتي يوم القيامة وليس في وجهه مزعة لحم"

Et aussi curieusement que cela puisse paraitre , nos médias,nos journaux publient en gros titre cette aide, cette charité;   et même nos dirigeants l’annoncent en fanfare. La honte instituée en vertu.

Nos ministres semblent en faire une fierté et l’inscrivent même dans leur performances !

Ainsi recevoir une aide internationale est “une fierté”!  Un mendiant est-il fier de recevoir la charité. Allez le lui demander.

La fierté appartient à celui qui donne, pas à celui qui reçoit. Comme le dit le  proverbe africain: La main qui donne est toujours au-dessus de celle qui reçoit. Et c’est la fierté qui nous manque.

Certes, il ne fait pas de doute qu’aucun pays au monde n’est à l’abri de catastrophes humanitaires ou naturelles  (sècheresse, tsunami, guerre etc.) requérant une aide internationale d’urgence qu’il pourra lui-même fournir à d’autres en d’autres circonstances. Mais ce qui est grave c’est qu’un pays en paix, ayant la capacité et les moyens de faire face à son propre destin, de se développer continue à vivre de la charité internationale. Sinon en faire un recours permanent, sans chercher à lui substituer sa propre production par ses moyens propres.

La Mauritanie s’est inscrite malheureusement dans une logique d’assistance permanente, qui a fait de cette assistance un pan  important de sa stratégie économique et ses dirigeants en ont fait un moyen pour compenser leur incompétence et l’inefficacité de leur politique économique. N’est-il pas plus facile de tendre la main pour recevoir que de produire?

Mais si seulement, il ne s’agit que cela. L’aide internationale reçue est détournée et remplit les boutiques et autres comptes de commerçants et décideurs. Et il est probable que c’est là tout son intérêt pour nos décideurs qui y tiennent, et qui en font une politique de la corruption et du vol généralisé. Et dans son éternelle sagesse Dieu a pourtant bien averti:

قال تعالى: “وكم أهلكنا من قرية بطرت معيشتها

Pour la Mauritanie, le développement ne sera pas pour demain. A cause de la mendicité de ses gouvernants instituée en économie du développement, et du leurre permanent dans lequel ils plongent leur peuple qu’ils nourrissent  au pain du Texan.

Sans une fierté nationale, sans une vision politique, sans les lumières de sa religion, sans le  labeurs et ses fruits à la sueur de son front, il  n y a ni pays ni nation. il n y a que des individus qui se refusent à changer leur misérable condition. 

قال تعالى:  إن الله لا يغيّر ما بقوم حتى يغيروا ما بأنفسهم

 

Pr ELY Mustapha

mardi 21 juin 2011

Le bouc Commissaire

 

Prisonnier de droit peu commun

loupUn mouvement s’est formé pour la libération de Ould Dadde et  appelle à manifester à Paris ce 26 juin 2011.  Un mouvement qui voudrait clamer haut et fort l’innocence de l’ancien commissaire aux Droits de l’Homme, à l’Action Humanitaire et aux relations avec la Société Civile.

Mais si à la question : “faudrait-il libérer Ould Dadde”, la réponse par l’affirmative ne fait pas de doute, il reste que l’autre question qui la sous-tend ,“qui doit libérer Ould Dadde?”, doit aussi trouver une réponse. Est-ce la Justice? Si  cela était, Ould Dadde ne serait pas aujourd’hui incarcéré après plus de 9 mois de prison. Il aurait été jugé, relaxé ou incarcéré à la suite d’un jugement juste et équitable. mais il n’en est rien.Il croupit en prison. Alors où est la justice? Eh bien la réponse ne pourra certainement pas venir de l’appareil judicaire qui ne semble pas remplir son rôle. C’est la raison pour laquelle nous croyons fermement que le sort de ould Dadde dépend non pas d’une quelconque justice mais du bon vouloir de l’exécutif et plus précisément de Ould Abdel Aziz lui-même.

Mais qu’à fait Ould Dadde pour mériter tout cela,  alors même que des enquêtes sont lancées contre la plupart  de ses collaborateurs qui ont certainement bien plus de responsabilités que lui dans cette affaire de détournement des biens publics?

Nous avions sur ce blog, montré le “piège” dans lequel s’est fourvoyé Ould Dadde en acceptant un poste aussi sensible que celui du  Commissariat aux Droits de l’Homme, à l’Action Humanitaire et aux relations avec la Société Civile (voir article ici). Ould Dadde est bien moins un prisonnier de droit commun qu’un prisonnier politique. Il sert d’exemple  pour une politique qui veut, à l’encontre des droits des personnes, donner  un exemple d’intégrité qu’elle n’a pas su se forger elle-même.

L’IGE  a fait  ses rapports, et ses inspecteurs en mission commandée ont rempli leur mission. Mais si tout cela est vrai, pourquoi un homme croupit-il encore en prison? Pourquoi la justice ne se prononce-t-elle pas?

A quoi sert-il de maintenir en prison un individu dont le seul tort est d’avoir cru pouvoir diriger une institution dont il n’a pas pu saisir la démesure  et qui a défaut de pouvoir crier avec ses loup s’est fait prendre dans la bergerie. Mais de mouton, il n’en avala point. Mais se fit , tout au long de sa présence au sommet du commissariat,  avaler des couleuvres.

Ould Dadde s’est rallié à Ould Abdel Aziz. il reçut une récompense. Un commissariat, héritier d’une suite d’institutions voraces éclatées et qui sert de refuge à une pléiade d’ogres publics, qui ont trouvé en lui un petit chaperon rouge. Et la galette fut bien avalée.

S’il faut chercher la défense de Ould Dadde, ce n’est pas  sur le terrain du droit commun mais sur celui du droit peu commun que s’arroge Aziz pour mettre en prison ceux qu’il juge pouvoir mieux servir sa politique au fond d’un cachot.

En effet, la politique de Aziz, à défaut de résultats,  est basée sur la recherche permanente de sa crédibilisation. A défaut de résultats tangibles et de preuves socio-économiques de sa réussite, c’est  à travers les mises en accusation et les emprisonnements, de ceux qu’il accuse, que Ould Abdelaziz, veut crédibiliser de sa politique. C’est en quelque sorte, un processus pathologique qui à l’inverse des processus connus, veut éliminer le “malade”, en conservant la maladie.

Le commun des mortels pourrait se demander quelle est l’envergure de Ould Dadde après quelques mois à la tête d’un Commissariat, par rapport à cette foule d’individus qui ont absorbé, sinon mis à genoux des institutions économiques entières et qui peuplent les couloirs du pouvoir et des entreprise publiques et privées?

Tout simplement parce que le Commissaire, comme bien d’autres d’hier et d’aujourd’hui, n’est qu’un bouc émissaire. Le général le veut ainsi, jusqu’à ce qu’il trouve qui lui fera entendre raison. Et il est fort à parier que le général connait bien les fables de la Fontaine.  A défaut d’agneau, un bouc….Commissaire. “Qui te rend si hardi de troubler mon breuvage ?”.

Pr ELY Mustapha

---------------------------------------------------------------------------------------------------------Communiqué reçu--------------------------------------------------------------------------------------------------------

Libérez Mohamed Lémine Ould Dadde !!

Lémine est innocent !!

Tous présents le dimanche 26 juin à Paris

Mohamed Lémine Ould Dadde, ancien Commissaire aux Droits de l’Homme en Mauritanie, a été arrêté le 21 Septembre 2010, puis placé en détention provisoire à la prison civile de Nouakchott, sans être jugé jusqu’à maintenant.

Sa détention est arbitraire et sans fondement. Nous demandons sa libération immédiate et souhaitons le faire savoir aux autorités Mauritaniennes en organisant une manifestation et un sitting devant l’ambassade de Mauritanie le 26 Juin prochain. Nous vous invitons à nous rejoindre. Nous devons mettre la pression sinon il ne retrouvera pas sa liberté.

Détail sur l’affaire : Au nom de la lutte contre la corruption, il a été accusé de malversations financières sur le fondement d’un rapport de l’IGE (Inspection Générale de l’Etat). La Justice Mauritanienne lui demande de rembourser la somme de 279 975 784 UM (soit environ 718 000 euros) correspondant à l’achat tentes-kits de survie à un prix trop élevé. Ces achats ont été faits suite à des catastrophes naturelles (inondations), il fallait trouver une quantité importante de tentes en quelques heures pour secourir ceux qui avaient tout perdu. Non seulement il n’a pas du tout été tenu de ces conditions d’urgence mais les prix de IGE sont totalement absurdes et basés sur aucune preuve alors qu’il suffit de consulter les prix proposés sur internet, pour constater que ceux-ci sont nettement supérieurs à ceux payés par le Commissaire aux Droits de l’homme et donc aussi très loin de ceux estimés par le rapport de l’IGE.

En fait ce défenseur des droits de l’Homme est victime de ses opinions, de sa détermination à aider les plus démunis et notamment la communauté Haratine (anciens esclaves). Les nombreuses initiatives entreprises pendant l’exercice de son mandat dérangent manifestement ceux qui souhaitent que surtout rien ne change en Mauritanie.

Les nombreuses anomalies de procédure viennent étayer ce constat :

· Dès le début de sa détention, il a réclamé d’être jugé  par la Haute cour de Justice, seule habilitée à juger un ministre, mais cette requête lui est refusée.

  • Il a été auditionné par un juge en décembre 2010, à trois reprises. A l’issue de ces auditions, le juge a lancé des commissions rogatoires pour réouvrir l’enquête auprès de la police économique. Ce juge a alors été « promu » à d’autres fonctions quelques jours après.
  • Le 3 Mars 2011, il a reçu un rapport de la Cour des Comptes. Ce rapport provisoire diffère beaucoup de celui de l’ IGE, à la fois sur le montant réclamé qui s’élève cette fois à 161 768 917 UM (soit 414 000 euros) et sur le contenu : de nombreux points du rapport de IGE ne sont pas repris par la cour des comptes et sur les sujets en commun les calculs sont très différents. Il avait un mois pour répondre. Pour avoir accès aux dossiers, il a fait une demande de liberté provisoire. Celle-ci lui a été refusée. Il a de sa prison répondu à la cour des comptes mais celle-ci n’a toujours pas délivré son rapport définitif ni accepté comme la procédure le prévoit de l’entendre.

· Les contrôles effectués ont été bâclés, à en juger le nombre et l’importance des erreurs : le rapport de l’IGE compte pas moins de dix erreurs de calcul dont une grossière de 6 501 525 UM. Et celui de la Cour des Comptes a imputé à tort à l’ex Commissaire un montant de 21 355 400 UM dont l’origine et le paiement sont antérieurs à la sa nomination.

  • Le 23 Mai le nouveau juge en charge de son dossier a émis 8 mises en demeure à des hauts responsables du commissariat et des fournisseurs pour leur réclamer des sommes initialement imputées à Ould DADDE, sans pour autant statuer sur sa détention, ni lui notifier de montant à payer. Mais coup de théâtre une semaine plus tard le juge de la cour d’appel a annulé ces mises en demeure. Ould Dadde est toujours en prison, sans savoir maintenant si on lui reproche encore quelque chose. Son dossier se perd dans les méandres des différentes juridictions mauritaniennes.

Cette comédie risque de durer encore longtemps car il est manifeste que certaines personnes souhaitent qu’il reste en prison, même si les juges cherchent une porte de sortie, ils sont stoppés. C’est pourquoi nous vous invitons à manifester notre indignation au Pouvoir Mauritanien en participant à la manifestation et sitting que nous organisons devant l’ambassade de Mauritanie le 26 Juin 2011.

Le Comité de Soutien

Lieu de la manifestation :

Ambassade de Mauritanie
5 Rue Montevideo
Paris  XVIème (16)
Métro : Porte Dauphine

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dimanche 5 juin 2011

Dimi n’est plus

 

Une « griote » s’est tue, une culture en souffrance.

 

Plume-noireDimi tout court.

Dimi–sedoum, Ould Abbe, Ould khalifa.

Quel Mauritanien n’a pas écouté Dimi ; seule ou parmi tant d’autres qui avaient autant de belles voix. Mais Dimi rehaussait le chant de sa voix à nulle autre pareille. En disparaissant c’est un peu le calamus de cette fameuse plume de l’art, richetou el venni, qui s’est émoussé. Et qu’elle avait si bien chantée.

Il est des morts qui nous interpellent au-delà de la souffrance qu’elles génèrent. Celle de Dimi n’est pas passée inaperçue. Et pourtant c’est une simple « griote », une affidée d’une sous classe. Une classe qui se dispute avec les forgerons les bas fonds de la hiérarchie tribale mauritanienne, juste avant celle des haratines. Et pourtant qui, aujourd’hui, n’a pas senti avec la disparition de Dimi, l’effondrement d’un pan de la musique mauritanienne de ces  trente dernières années ?

Mieux encore qui n’a pas senti un lancinant pincement au cœur en se rappelant les vibrantes tonalités et les hauteurs de sa voix qui, en nous émouvant, réveillaient en nous, une sensibilité millénaire. Et c’est cela que représentait, physiquement Dimi, mais qui la dépassait pour nous interpeler davantage sur le devenir de notre art et de notre culture.

On aura compris que l’apport de Dimi, se devra d’être perçu différemment que comme une activité lucrative d’une sous-classe sociale à laquelle elle appartient et qui ne s’assimilerait qu’à une collection d’individus animant des soirées et autres rondes de thé que l’on paierait pour une prestation et pour laquelle , ils iraient mourir au bout du monde.

Il est temps en effet, de comprendre que la musique mauritanienne est non seulement un patrimoine, mais un véritable ciment qui unit tous les mauritaniens et dont l’apport est bien plus important que ce que toutes les autorités publiques, en terme de solidarité,  ont essayé de faire depuis l’indépendance.

Qui dans la rue se rappelle encore des inepties politiques de nos gouvernants depuis l’indépendance mais se rappelle encore, et toujours, des envolées de nos griots et de nos poètes ?

Qui d’entre-nous n’entend encore résonner dans ses oreilles, el hikayat de Feu Ould Sidibrahim et ses successeurs, des envolées de Dimi, et de ses prédécesseurs et ne se rappelle plus des éphémères discours de nos dirigeants.

Et pourtant, en seigneurs, nos musiciens et nos poètes se meurent sans clameurs ni trompettes alors que nos saigneurs s’en vont en fanfare.

Oui, la culture, contrairement à la bêtise, est pérenne et c’est elle qui maintient la nation en vie. C’est elle qui nous permet de survivre aux coups d’Etat qui déchirent notre dignité de citoyen, de survivre à l’injustice de nos gouvernants, de résister à l’asservissement et de faire de la pauvreté un pis-aller.

Mais que fait-on pour la culture ? Rien. Un ministère, une coquille vide, un budget ridicule. Mais pire que tout, une mentalité qui maintient ceux-là mêmes qui font vivre nos âmes et notre sensibilité par leur musique et leur art dans une situation de sous-classe inféodée et qui ne bénéficie de ce qu’elle reçoit que parce que justement elle appartient à cette sous-classe. Ses membres exploitant tant bien que mal ce statut, n’ont d’autre reconnaissance que d’être des griots.

Cette liaison de la culture mauritanienne à cette conception féodale, fait justement que notre culture se développe pas. Elle végéte toujours entre le maitre et le griot, entre l’Etat stérile et la difficile survie du musicien. Nos musiciens ne sont pas des « artistes », ce sont des griots. Ou assimilés. Ils iront alors chanter au bout du monde et en mourir.

Mais c’est justement quand leur voix s’éteint que l’on se rend compte de l’injustice qu’ils subissent et de la perte que nous subissons jusque dans nos racines.

Griots, sous-classe. Gardiens de notre culture. Ingratitude d’une société qui disparaitra certainement, lorsque ces gardiens disparaitront, car ce qui distingue le Mauritanien c’est cette musique qui lui est spécifique , qui joue dans son cœur et qui rythme son âme où  qu’il se trouve.

La disparition de Dimi, nous interpelle sur le sens que nous devons donner à notre culture, sur le statut de ceux qui la font vivre et sur sa place dans notre destinée commune. Et en cela, Dimi n’a pas disparue. Elle s’est simplement tue. Mais qui parlera pour que ne disparaisse pas notre culture en souffrance ?

Pr ELY Mustapha

Ecouter : RICHETOU EL VENI